Actualités of Wednesday, 12 March 2025

Source: www.camerounweb.com

22 ans de service: comment Nkoumba Édouard est mort dans la misère totale

Nkoumba Édouard Nkoumba Édouard

Enseignant de philosophie, Nkoumba Édouard est mort il y a quelques jours après une crise cardiaque. En 22 ans de service, le système l'a broyé, l'a rendu malade et finit par le tuer.

Gregoire Nzomo, un des proches de Nkoumba fait un témoignage sur ce dernier.


"Je suis M. NKOUMBA Édouard, PLEG de philosophie, matricule 575075-Y, sorti de l'ENS de Yaoundé dans les années 2000. Après 5 ans à Tignère, je me retrouve au lycée bilingue de Sangmélima où j'aurais plus jamais la possibilité de partir.

Enseignant dévoué et assidu, ma réputation s'étend très vite dans la ville de Sangmelima et des contrées voisines. Certaines de mes épreuves reviennent au Bac. Je suis un passionné de philosophie et des lettres modernes.
Après 22 ans de service j'ai à mon actif:

- zéro avancement;
- zéro nomination;
- toutes les demandes de mutation sont nulles.

À 52 ans je continue à tenir la craie du lundi et vendredi, et de là je commence à développer certaines maladies telles que l'hypertension artérielle. Pire encore en mi-2021, par inadvertance ma solde est suspendue.

Je plonge dans l'extrême précarité. Je suis obligé de m'endetter pour survivre et envoyer les enfants à l'école en septembre 2021. Les moyens me manquent pour avoir un véritable suivi médical. Lorsque ma solde est rétablie je ne reçois aucun rappel et je passe le temps à essayer de rembourser les dettes contractées. Ma santé se détériore davantage. Jeudi le 26 mai 2022, je fais un dernier tour au lycée où je rentre avec les dernières copies. Samedi 28 mai je corrige ces copies et je relève les notes dans une fiche. Dimanche 29 mai, matin je lis et fais un dernier cours de philosophie, en journée je me promène une dernière fois dans la ville de Sangmelima pour essayer de comprendre quel a été le sens de ma vie. Lundi 30 mai 2022, au petit matin je rend l'âme de suite d'arrêt cardiaque, seul dans mon vieil appartement. »

AINSI S'ACHÈVE LA VIE D'UN GRAND PROF. Être enseignant au 237, c'est le sacrifice de sa vie. Il faut respecter ceux qui ont décider de rester malgré tout, car les conditions poussent inévitablement n'importe vers la sortie".