Des notes de piano, un refrain chanté et un flow. Lavoyel, tout en slam, plonge dans l’antre mémoriel de la Nation. Hommage à un héros, hommage au chantre de l’indépendance, la vraie, du Cameroun, hommage au martyr, sacrifié, il y a 65 ans sur l’autel du colonialisme et du néocolonialisme. Ruben Um Nyobe, le Mpodol, doit sourire dans sa tombe, car du bas de sa jeunesse (19 ans), Lavoyel, a reçu en héritage l’histoire et le combat de Ruben Um Nyobe, pour la liberté du vert, rouge, jaune.
« Histoire, écoutez l’histoire de notre héros », clame la slameuse. Les paroles fusent, telles des flèches conquérantes, pour innerver les esprits de ce passé glorieux : « Les héros ne meurent jamais, ce sont eux les élus de l’espoir ». On établirait presqu’un parallèle avec l’épopée du Sauveur qui donna sa vie pour le salut de l’humanité. Le Mpodol, à l’échelle humaine, donna sa vie pour le Kamerun. Lavoyel parle de cet « éclair blanc », sousentendu le colon, décidé à maintenir notre pays dans son giron.
« Il y avait eu un violent éclair il y a fort longtemps. Il avait tout détruit et l’on avait juste remarqué qu’il était blanc. Le pays était enfoui dans l’obscurité de sa volonté. Plus de libre-arbitre, les règles sont fixées par lui, plus de live and be. Le noir qui régnait s’empirait avec des années, et nos âmes se retrouvaient pieds et poings liés », dénonce la jeune artiste dans cette galette. Elle voit en la naissance de ce fils bassa, l’essor d’une Lumière, un espoir pour l’humanité Kamerunaise, « le porte-parole de nos voix » qui « distingue le bien du mal ».
C’est contre cet éclair blanc qu’Um Nyobe livra une lutte sans merci. La liberté ne se donne pas, elle s’arrache, même si dans cet effort de quête du Graal, l’homme y laissa des plumes. Qu’à cela ne tienne, il affronta l’adversité avec bravoure. Il laissa au travers de la gorge du monde son discours à la tribune des Nations Unies en 1952. De quoi susciter l’admiration de la jeune artiste : « De Boumnyebel à l’Onu, la Lumière tentait d’évincer le règne de l’éclair blanc… le combat fut long entre la Lumière et l’éclair blanc. L’arrivée du Mpodol ruinait tous les plans. C’est pourquoi il sera dévoré comme le « petit » qu’il était pour avoir osé affaiblir le géant éclair blanc ».
Lavoyel narre, elle conte, elle martèle, elle déifie la douleur provoquée par la mort il y a 65 ans de ce leader de l’Union des Populations du Cameroun, « mère du changement ». Justement, « 65 ans ». C’est le titre cette œuvre musicale, dont le clip et l’audio sont disponibles depuis minuit sur toutes les plateformes légales.
Parcours
Lavoyel, de son vrai nom, Esther Gabrielle FOYET, se passionne pour les mots dès son enfance. Entourée de sa famille, elle évoluera dans cette passion jusqu’à sa rencontre avec MYNAME LE SLAMASTER. Cela lui donnera la possibilité de faire sa première scène au Centre Culturel Camerounais à l’occasion du Festival Ecran Slam en 2020. Ce fut le top départ pour cette jeune artiste de 19 ans qui, depuis lors, a multiplié les scènes où chaque fois, elle exprime son amour pour les mots. Cette année, après l’obtention de son baccalauréat, elle a décidé de se lancer pleinement dans son art. Un début de carrière de slameuse concrétisé par son premier projet « 65ans » qui sonne comme un hommage à l’une des plus grandes figures de l’histoire de notre pays, Ruben Um Nyobe.