Sans grande annonce sur son programme politique au terme de sa réélection le 25 février 2017, le président national de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP) promet un repositionnement de son parti sur l’échiquier national.
71 ans déjà. Mais l’homme rêve encore d’un revirement de la situation en 2018, l’année pressentie comme celle des « Quatre élections ». Suivant les pratiques, tous les mandats aux postes de président de la République, sénateurs, députés, maires seront arrivés à leur terme au plus tard en novembre 2018. Maigari Bello Bouba pense alors que son heure a sonné. Celui de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP), son parti aussi. Le 25 février 2017, il rempilait à la tête de la formation partisane créée en mars 1991 dans le but d’accéder à la magistrature suprême et prendre les commandes de la nation Cameroun qui lui a tout donné.
D’abord sous le régime d’Amadou Ahidjo, le premier président du Cameroun indépendant. Sous le régime du Renouveau en vigueur depuis 35 ans, Bello Bouba est souvent présenté comme l’un des héritiers d’Amadou Ahidjo. Mais l’est-il réellement ? Difficile de l’affirmer. Puisque le natif de Garoua est la conséquence du pouvoir discrétionnaire de Paul Biya. En effet, le choix d’Ahidjo, président démissionnaire pour le poste de Premier ministre était bel et bien Dr. Maïkano Abdoulaye, qui plus souvent, assurait l’intérim du Premier ministre Paul Biya, lorsque celui-ci était absent, révèle dans un livre repère historique Henri Bandolo, l’auteur de « La flamme et la fumée ».
Dans ce livre témoignage, l’on apprend qu’au moment de sa démission, c’est Dr. Maïkano Abdoulaye qu’Ahidjo aurait proposé à Paul Biya pour être son Premier ministre, mais, dans son statut de chef de l’Etat, Paul Biya a finalement préféré Bello Bouba. Certainement à cause de sa jeunesse, 36 ans pour le PM et 49 ans pour Paul Biya en 1982. Mais, Henri Bandolo met aussi sur la balance l’éphémère mais profonde collaboration entre les deux hommes quand Bello Bouba était ministre de l’Economie et du Plan entre janvier et novembre 1982.
Disgrâce d’un ancien « 2ème personnage de l’exécutif » À 36 ans, Bello Bouba « que ni l’âge, ni la formation, ni l’expérience politique, ni quelque assise populaire, ne semblaient vouer à un rang aussi honorable, qui par un coup de baguette dont le destin a le seul secret, devient le deuxième personnage de l’exécutif » relate Henri Bandolo. Ce statut de Bello Bouba fera long feu. Puisque, le 22 août 1983, Bello Bouba est remplacé par Luc Ayang. Il rentrera par la suite en disgrâce notamment à la suite des évènements du 6 Avril 1984 avec la tentative de coup d’Etat. En près d’une décennie, celui qui avait aussi occupé les fonctions de Secrétaire général du ministère des Forces armées en 1972 et 1975 restera loin des affaires publiques.
Un mutisme qui fait d’ailleurs aujourd’hui l’une de ses caractéristiques principales. Vous l’entendrez rarement se prononcer sur les affaires brûlantes de la nation. Que ce soit la récente crise anglophone déclenchée en octobre 2016, pas de prise de position officielle du tout premier Premier ministre de Paul Biya ou encore les grandes interviews aux médias nationaux. Peut-être consigne-t-il tout dans des mémoires indispensables pour un homme de cet acabit.
Sur les évènements de Buea et Bamenda, l’actuel ministre du Tourisme et des loisirs ne s’est exprimé officiellement que le 25 février 2017 lors du congrès de son parti. Dans les colonnes du très influent journal « L’oeil du Sahel », Bello Bouba a reconnu « l’effort fantastique du gouvernement qui en créant le comité ad hoc et en s’appuyant sur le dialogue a pu produire des résultats probants ». Et de se réjouir en ces termes : « aujourd’hui, on ne peut pas nier l’existence d’une certaine accalmie dans les villes de ces régions, Bamenda et Buea notamment ».
Tout est dit. Bello Bouba ne peut nier son attachement aux idéaux défendus par Paul Biya. La théorie du musellement La plateforme qu’il a signée en 1997 avec Rassemblement démocratique du peuple camerounais, le parti au pouvoir en est une illustration. Sauf que les retombées ne suivent pas. Bello Bouba est donc comptable « des misères de la vie quotidienne qui résulte de la gouvernance calamiteuse du pays, alors que ces misères auraient été atténuées si la Plateforme UNDP-RDPC que nous avons signée avait été mise en oeuvre. Ces erreurs seront un jour corrigées » reconnaît et prévient Célestin Bedzigui au sortir du congrès du 25 février 2017.
Ce dernier, malgré son statut de vice-président de l’UNDP n’a pas pu prendre part aux travaux. Durant le congrès, il était en bonne compagnie. Sur « ordre de sa haute hiérarchie », ce sujet brillant en économie a été mis en quarantaine grâce à « un déploiement de trois commissionnaires dont le Commissaire Central en personne appuyé par une trentaine d’éléments lourdement armés » explique Célestin Bedzigui dans un communiqué de presse signé du 26 février 2017.
Au sortir du congrès du 25 février 2017, un vent de scission s’annonce donc au sein du l’UNDP, la troisième force politique à l’Assemblée nationale. Puisque, au lendemain du congrès, Célestin Bedzigui a pris rendezvous avec les Camerounais en ces termes : « Nous nous retrouverons alors dans un vaste mouvement de citoyens dont vous serez le socle central pour bâtir cette prospérité tant souhaitée. Prenons rendez-vous avec l’avenir. Il nous attend. » En rassurant sur la poursuite de l’alliance avec le RDPC représenté au congrès du 25 février 2017, Bello Bouba fait aussi table rase sur les dissensions observées durant la campagne pour l’élection des tout-premiers sénateurs du Cameroun en 2013.
Au cours de cette sénatoriale, Bello Bouba avait assisté sans défense à l’alliance stratégique entre le RDPC, son allié et le Social democratic front (SDF) dans la région de l’Adamaoua. Perdant les sept sièges de sénateurs face au SDF, le parti de Bello Bouba se contentera d’un siège de sénateur après la nomination des 30 par Paul Biya. Il s’agit de l’un de ses plus proches collaborateurs en la personne de Pierre Flambeau Ngayap, Secrétaire général de l’UNDP.
Cette stratégie d’ouverture et de réceptions des gadgets politiques du président du RDPC fait dire à une certaine opinion que Bello Bouba et ses plus proches collaborateurs sont biens des créateurs de Paul Biya. Ce qui n’est pas sans conséquence sur son poids politique. Au départ présenté comme alternative pour l’ensemble des trois régions septentrionales du pays, Bello Bouba enfanta ses propres opposants. Il en est ainsi d’Amadou Moustapha exclut de l’UNDP en 1997, aujourd’hui ministre chargé de mission à la présidence de la République sous les couleurs de l’Alliance pour la démocratie et le progrès (ANDP). Idem pour Issa Tchiroma, l’actuel ministre de la Communication, ancien cadre de l’UNDP devenu président du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC). Avant son entrée au gouvernement, Bello Bouba a tout de même montré sa capacité à mobiliser une base électorale. Puisqu’il sera élu à deux reprises député à l’Assemblée nationale.