Le procès du journaliste camerounais Bruno Bidjang pour propagation de fausse a été reportée pour une deuxième fois. Fait curieux, aucun de ses collègues n’était présent lors de la séance. Bien qu’ayant reconnu les faits qui lui sont reprochés, Bidjang voit son procès trainer pour un simple problème de casier judiciaire. CamerounWeb vous propose extrait du récit du journaliste Christophe Bobiokono, Directeur de Publication du Journal KALARA.
Inculpé de «propagation de fausse nouvelle» suite à une banale opinion diffusée sur les réseaux sociaux, le journaliste voit son procès s’enliser. Les réquisitions finales attendues depuis la première audience ont encore été renvoyées au prétexte de l’absence du casier judiciaire de l’homme des médias. Une procédure judiciaire qui va de curiosité en curiosité.
M. Bruno Bidjang, poursuivi pour «propagation de fausses nouvelles», attendra encore un mois avant de connaître officiellement ce que requiert le Commissaire du gouvernement (CG) du Tribunal militaire de Yaoundé (TMY) dans l’affaire pour laquelle il est incarcéré à la prison principale de Yaoundé – Kondengui. Le 11 avril dernier, lors de la deuxième audience de cette affaire, l’homme des médias a fait pour rien le déplacement entre le pénitencier et la salle d’audience.
Il avait rendez-vous avec le ministère public afin que ce dernier prenne ses réquisitions finales et ouvre la voie à la clôture des débats, après la plaidoirie de son avocat. Mais, prenant prétexte de la non-possession par lui du casier judiciaire du prévenu, le commissaire du gouvernement a sollicité du tribunal un renvoi supplémentaire pour effectuer les «diligences» permettant d’obtenir ce document. Demande que le juge a aisément agréée, renvoyant la suite du procès au 9 mai 2024.
Et pourtant, lors de cette deuxième audience de l’affaire Bruno Bidjang, Me Massi Georges, le conseil du mis en cause, a longuement parlé pour obtenir que le tribunal ignore la demande du parquet et lui ordonne de présenter Ses réquisitions finales. L’avocat a rappelé que son client a plaidé coupable et qu’il s’agit d’une demande de pardon. Il a aussi évoqué la bonne tenue de son client à l’audience, pour dire que ce dernier méritait d’être rapidement fixé sur son sort.
Dans un ensemble Lin de couleur blanche, l’homme des médias est resté debout tout au long de ces échanges. Sans mot dire. Dans la vaste salle d’audience de la juridiction clairsemée d’un maigre public dont le père, la mère, frères et quelques amis et parents du prévenu, mais aucun de ses collègues. Le président du tribunal a estimé que l’avocat gâchait ses munitions avant l’heure de la plaidoirie, le renvoi étant nécessaire selon lui pour permettre au parquet de «requérir à charge et à décharge».
L’absence du casier judiciaire du prévenu est déjà l’argument évoqué par le capitaine Gaspard Mabe, représentant du ministère public, lors de la première audience de l’affaire, le 14 mars 2024, pour obtenir l’ajournement de la suite du procès. Dans les juridictions correctionnelles ordinaires, ce souci fait rarement l’objet de renvoi, les diligences pour se faire délivrer un extrait de casier judiciaire étant tout, sauf ardues, surtout pour un «parquet suffisamment puissant», comme l’est celui du commissaire du gouvernement. C’est ce qu’a rappelé avec insistance l’avocat du prévenu, cherchant ses mots pour éviter de dire que son client est victime de dilatoire alors qu’il est poursuivi dans une procédure de flagrant délit.
Depuis le déclenchement de l’affaire, le 7 février 2024, le commissaire du gouvernement et le président du tribunal sont en harmonie parfaite pour faire durer le procès Comme dans l’exécution maîtrisée d’une pièce de théâtre.