Actualités of Sunday, 9 February 2025

Source: www.camerounweb.com

Affaire Martinez Zogo : Amougou Bélinga voulait succéder à Paul Biya (Exclusif)

Le plan caché d'Amougou Belinga Le plan caché d'Amougou Belinga

Le 6 février 2025 marque le deuxième anniversaire de l’arrestation de Jean-Pierre Amougou Belinga, cité dans l’affaire de l’assassinat du journaliste Martinez Zogo. Depuis, le milliardaire et influent homme d’affaires demeure en détention. Et si, derrière les faits qui lui sont reprochés, se cachait une affaire d’État encore plus grave ? Une équipe menée par le célèbre journaliste d’investigation ghanéen Anas Aremeyaw Anas a enquêté sur cet assassinat. Il s’avère qu’Amougou Belinga planifiait de succéder à Paul Biya à la tête du Cameroun.

Le 22 janvier 2023, la dépouille de Martinez Zogo, de son vrai nom Arsène Salomon Mbani Zogo, a été retrouvée dans un terrain vague à 15 km de Yaoundé. Quelques jours auparavant, des informations faisaient état de son enlèvement par des hommes cagoulés devant le poste de gendarmerie de Nkol-Nkondi à Yaoundé. Les sévices infligés à son corps étaient indescriptibles. Martinez Zogo avait été longuement torturé, et son cadavre profané.

Paul Chouta, journaliste et lanceur d’alerte camerounais, collabore avec le site Camerounweb.com et gère une page Facebook intitulée TGV de l’Info. Il connaissait bien Zogo. Avant sa mort, ils travaillaient ensemble sur des affaires de détournements impliquant Jean-Pierre Amougou Belinga et plusieurs personnalités du régime de Paul Biya. Depuis, Chouta vit en exil en Allemagne. Pour lui, la mort de Martinez Zogo est un avertissement adressé aux journalistes d’investigation.

« Personne ne souhaite vivre en exil. C'est une forme d'emprisonnement. Vous ne pouvez pas retourner dans votre pays. Mais je préfère être un lâche vivant qu'un héros mort. (…) Ce qu'on a fait à Martinez Zogo est un signal. (…) Dès que vous parlerez, nous vous brimerons », déplore-t-il dans un reportage d'Al Jazeera.
Conscient des risques qu'il encourait, Paul Chouta a quitté le Cameroun après la mort de Zogo. Le 10 mars 2022, il avait lui-même été enlevé dans des circonstances similaires avant d’être torturé par des hommes cagoulés qui l’avaient laissé pour mort.

Une affaire dans l'affaire

Officiellement, l’homme d’affaires Amougou Belinga, régulièrement cité dans l’affaire de l’assassinat de Martinez Zogo, a été inculpé pour « complicité de torture ». Le lieutenant-colonel Justin Danwé, haut cadre de la Direction générale de la Recherche Extérieure (DGRE), l’a désigné comme le commanditaire de l’opération. Ces accusations n’ont pas surpris les Camerounais, car Amougou Belinga, patron du groupe L’Anecdote, était l’un des grands bénéficiaires des lignes budgétaires dénoncées par Zogo et d’autres journalistes.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Au sein du régime au pouvoir, plusieurs camps se sont créés et Amougou Bélinga était considéré à tort ou à raison comme le protégé du ministre de la justice Laurent Esso. Il bénéficiait également de la bienveillance du ministre des finances Louis-Paul Motaze qui ne cache pas son admiration pour lui. Mais Amoguou Belinga serait bien plus qu’un bon petit de ces barons du régime de Paul Biya qui combattent le camp d’en face composé du secrétaire général de la présidence de la République Ferdinand Ngoh Ngoh et Chantal Biya, la première dame du Cameroun. D’après les révélations du journaliste d’investigation Anas Aremeyaw Anas, Jean-Pierre Amougou Belinga planifiait de succéder à Paul Biya.

« Nos investigations ont révélé que Belinga lui-même aspirait à devenir un possible successeur de Paul Biya. Nous avons décidé d'aller au fond de l'affaire Martinez Zogo. C'est complexe, c'est politique : il s'agit du cas d'une personne qui a transmis des informations à notre collègue et l'a probablement pourchassé par la suite », déclare Anas Aremeyaw Anas.

Ces révélations compliquent encore davantage l’affaire Martinez Zogo. Le journaliste a-t-il été piégé par son informateur ? Amougou Belinga est-il victime d’un procès politique ? Comment comptait-il prendre la place de Paul Biya ? Autant de questions qui illustrent la complexité de cette affaire.