En rappel c’est le 21 janvier 2017 que Paul Ayah Abine l’avocat général près la cour suprême a été arrêté dans son domicile dans le cadre de la crise anglophone. Conduit au Secrétariat d’Etat à la défense (Sed) cette semaine encore la justice n’a pas agréée à la demande de sa relaxation formulée par ses avocats. Le Quotidien Emergence édition du 24 mars 2017 qui a approché les experts pour débattre sur le sujet souligne que l’arrestation du magistrat selon bon nombre de personnes a violé les règles. «Selon l’article 629 du Code de procédure pénale : lorsqu’un magistrat de l’ordre judiciaire est susceptible d’être inculpé d’une infraction, le Procureur général compétent présente une requête au président de la cour suprême qui désigne un magistrat chargé d’instruire l’affaire et trois autres, d’un grade au moins égal à celui du mis en cause, en vue du jugement éventuel de l’affaire en premier ressort», note le journal. La question qu’il se pose par la suite est de savoir si les magistrats sont de grands taiseux.
L’avocat Me Emmanuel Simh trouve que le mutisme des magistrats sur la détention de Paul Ayah Abine est frappant. «Les magistrats que nous rencontrons en privé disent qu’ils sont très mécontents de ce qui se passe. Mais ces magistrats sont soumis à une certaine loi du silence et donc, ne peuvent pas s’exprimer de manière publique sur leur mécontentement. Cela pose le problème de la nécessité de la mise en place d’un syndicat des magistrats comme c’est le cas au Tchad où le syndicat des magistrats parfois pose des revendications concernant leur corporation. Dans un système comme le nôtre où le Chef de l’Etat nomme les magistrats où il peut les sanctionner, les muter à sa guise et où chacun essaie de préserver ses avantages ou son poste. Ils ne peuvent pas se plaindre publiquement. Mais il est assez frappant que les magistrats soient restés absolument muets devant l’arrestation cavalière de l’un des leurs», déclare-t-il.
L’avocat d’affaires Me Souop Sylvain pense que les magistrats doivent créer un syndicat. «Le silence des magistrats est surprenant si l’on se situe dans un pays normal, où la justice est un véritable pouvoir. Et si l’on considère qu’il s’agit là d’un très haut magistrat qui a fait l’objet d’une arrestation et d’une garde-à-vue qui se prolonge. Mais il n’est pas surprenant si on est au Cameroun où certains corps ne connaissent même pas leur force. Certains corps notamment ceux des fonctionnaires donnent l’impression d’être muselés par on ne sait qui, il est surprenant que des magistrats ne prennent pas la parole d’une manière ou d’une autre pour protester contre une telle arrestation. Ce qui arrive à M Paul Ayah Abine à n’importe quel magistrat. Raison de plus pour s’inquiéter de ce silence, parce que si on en arrive à arrêter celui-là, on peut arrêter le premier président le procureur général», déclare l’avocat.