L'interpellation musclée de l'avocat Richard Tamfu le 27 novembre dernier à Douala cristallise les tensions récurrentes entre la profession d'avocat et les forces de l'ordre camerounaises, révélant des dysfonctionnements préoccupants dans le système judiciaire.
Alors qu'il assistait une cliente lors d'une intervention de gendarmes, Me Tamfu a été brutalement interpellé et aurait subi des violences physiques. Une vidéo, rapidement diffusée sur les réseaux sociaux, montre une intervention qui a rapidement dégénéré, avec des coups de pied et des étranglements rapportés par l'avocat lui-même. Gravement atteint, il a dû être admis aux urgences de l'hôpital Laquintinie.
La réaction des autorités a surpris. Après la condamnation initiale des « actes de torture » par le secrétaire d'État à la Défense, l'enquête judiciaire rendue le 6 décembre a pris un tournant inattendu. Paradoxalement, les conclusions accusent Me Tamfu de « violences sur un fonctionnaire » et « obstruction à la justice », tandis que les gendarmes ne sont que légèrement mis en cause pour « abus de pouvoir ».
Cet incident s'inscrit dans un historique de confrontations entre avocats et forces de l'ordre. Depuis novembre 2020, plusieurs avocats ont été arrêtés, parfois brutalisés, dans des circonstances contestées. Le barreau du Cameroun, par la voix de son président Me Mbah Éric Mbah, dénonce une « injustice flagrante » et réclame une nouvelle enquête impartiale.
Me Claude Assira, avocat inscrit aux barreaux de Paris et du Cameroun, offre une lecture nuancée de la situation. Sans verser dans le complotisme, il reconnaît des tensions intrinsèques entre les forces de l'ordre et les avocats, appelant à un « respect mutuel » et au strict respect des déontologies respectives.
L'affaire Tamfu met en lumière la fragilité des droits de la défense au Cameroun et l'urgence de restaurer un dialogue constructif entre les différents acteurs du système judiciaire.