C’est l’annonce faite le 30 juin 2023 devant les députés par le ministre délégué à la présidence de la République, chargé de la Défense.
« Nous avons déposé en gestation bien avancée le plan de construction d’une cartoucherie à Garoua. Nous pourrons produire des munitions de guerre et même des munitions pour les fusils de chasse à Garoua ». La déclaration est de Joseph Beti Assomo, le ministre délégué à la présidence de la République chargé de la Défense. Il a fait cette annonce à l’Assemblée nationale ce 30 juin 2023 lors des Questions orales aux membres du gouvernement. Le Cameroun veut désormais produire ses propres munitions, et sur son propre territoire. Mieux que des slogans, Paul Biya est déjà assez avancé dans son ambition : « La plupart des jeunes gens que nous envoyons comme élèves‐officiers d’active dans les pays parte‐ naires, c’est essentiellement pour aller suivre des formations à caractère scientifique et tech‐ nique. Nous envoyons désormais très peu d’éléments dans les filières générales des armées. C’est des filières de pointes, des filières scientifiques et tech‐ niques.
Que ce soit en aéronau‐ tique, en ingénierie, en médecine, en informatique, c’est pour qu’ils aillent prendre le feu de la science et le ramener ici pour nous per‐ mettre de bâtir, conformément au plan mis en place sur instruc‐ tion du président de la République, le plan d’industriali‐ sation militaire de notre pays », a indiqué le ministre délégué. Ledit plan est donc déjà en cours de réalisation, à travers divers projets. Pour ce qui est du projet de cartoucherie de Garoua, « les diligences foncières et domaniales sont déjà termi‐ nées ; le terrain a été identifié et limité. Et nous sommes en négo‐ ciation avec nos partenaires turcs avec lesquels nous allons travail‐ ler pour que ce projet devienne une réalité », a précisé le patron de la Défense camerounaise. « Dans le même ordre d’idées, nous avons aussi un projet en gestation à Mengong dans la Mvila, région du Sud : la construction d’une industrie textile, d’abord militaire, mais dans la mesure du possible, le textile civile », renseigne-t-il les députés. « Là aussi les diligences domaniales et foncières sont déjà terminées, le terrain a été identifié et délimité », assure-t-il.
LES TURCS PARTENAIRES
Ainsi, Paul Biya ne veut plus être éternel consommateur des produits conçus et fabriqués ailleurs ; mais veut se rendre autonome et consommer ce qu’il produit. Le Mindef a annoncé les Turcs dans ce partenariat ; et l’on sait que la Turquie est désormais un des partenaires privilégiés du Cameroun. Cette coopération a été longtemps perçue sous l’angle commercial ; le pays d’Atatürk étant très connu pour son expertise dans le textile. Et la visite de Paul Biya en Turquie en 2013, avait davantage une coloration commerciale : le président camerounais avait participé au Forum du commerce et de l'investissement turco-camerounais.
Trois ans avant, l’ex président turc Abdullah Gül avait déjà effectué une visite au Cameroun. Il est fort probable que le volet militaire ait été un sujet au menu des échanges entre les dirigeants turc et camerounais. Il est aussi possible que d’autres pays soient impliqués dans ce projet révolutionnaire, tant les volets évoqués par le patron en second de la Défense, notamment l’aéronautique, l’ingénierie et l’informatique, laissent penser entre autres au Portugal et à Israël, qui reçoivent régulièrement des stagiaires militaires camerounais. Cela survient dans un contexte marqué par des crises qui rongent le tissu social national et sapent la quiétude des populations : avec la secte Boko Haram qui a perdu la guerre déclenchée en 2014, mais qui refuse de mourir définitivement aux frontières avec l’Extrêmenord ; les séparatistes qui résistent aux Forces de Défense et de sécurité dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, et même quelques troubles irréguliers à la frontière avec la République centrafricaine