Actualités of Monday, 16 January 2023

Source: La Nouvelle N° 683 du lundi 16 janvier 2023

Bataille contre le journal la Nouvelle : Frayeur pour Amougou Belinga, second round avec un nouveau acteur en jeu

Regard d’un juriste de Reporters sans frontières Regard d’un juriste de Reporters sans frontières

A la suite de la plainte, suivie de la convocation du Dp à la direction régionale de la police judiciaire du Centre, un juriste de Reporters sans frontières fait ces quelques observations. Pour lui, les journalistes n’ont fait que leur travail en servant au nommé Amougou Belinga une demande d’informations en bonne et due forme. Nul ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude, il ne reste plus au sociopolitiste de Nkumadzap la voie d’un droit de réponse, au lieu d’aller pleurnicher au commissariat pour faire taire les journalistes.

Le Pdg du groupe l’Anecdote aurait déposé plainte contre deux journalistes du journal La Nouvelle pour injures et diffamation. Selon les textes en vigueur au Cameroun, la première incrimination appréhende et punit d’un emprisonnement de 5 jours à 3 mois et d’une amende de 5 000 à 100 000 Fcfa ou de l’une de ces deux peines seulement, l’individu qui, sans avoir été provoqué, use à l’encontre d’une personne, par des procédés destinés à atteindre le public, d’une expression outrageante, d’un geste, d’un terme de mépris ou d’une invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait.

Amougou Belinga estime donc que les deux journalistes, par des procédés destinés à atteindre le public, ont usé à son encontre des termes de mépris et des expressions outrageantes alors qu’il ne les a pas provoqués. La seconde appréhende et punit de 6 jours à 6 mois et d’une amende de 5 000 à 2 millions de Fcfa ou de l’une de ces deux peines seulement, l’individu qui, par l’un des moyens prévus à l’article 152 (procédés destinés à attendre le public) porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne en lui imputant directement ou non des faits dont il ne peut rapporter la preuve. Ici Amougou Belinga estime qu’il a été porté atteinte à son honneur par des procédés destinés à atteindre le public alors que les journalistes incriminés n’ont pas la preuve des faits qu’ils lui imputent. En résumé, Amougou Belinga estime que la publication de l’article sur lui, dans le journal « La Nouvelle », intitulé « Braquage à ciel ouvert, cet homme est dangereux », a porté atteinte à son honneur et à sa considération et veut par conséquent, voir les journalistes auteurs de ces articles condamnés à 6 mois (peine la plus lourde) et à 2 millions de Fcfa ou à l’une de ces deux peines seulement.

ELÉMENT LÉGAL

Toutefois, lorsqu’il dépose sa plainte, Amougou Belinga a-t-il oublié qu’une correspondance, ayant pour objet : « demande d’informations », signée par François Owona, rédacteur en chef du journal « La Nouvelle », lui avait été adressée au préalable ? Cela lui coûtait quoi d’apporter des éclaircissements par rapport aux informations qui étaient en possession des journalistes et qu’il savait sur le point d’être publiées ? Le refus de sieur Amougou Belinga de répondre à cette demande d’informations qui lui a été présentée, avant la publication des faits qu’il estime aujourd’hui injurieux et diffamatoires, entraine deux conséquences juridiques à savoir : 1- Il s’est rendu complice de la publication qu’il déplore aujourd’hui. Il est un principe en droit qui voudrait que « nul ne puisse se prévaloir de sa propre turpitude», autrement dit, personne ne peut se prévaloir de sa propre faute. Monsieur Amougou Belinga, en ne répondant pas à la demande d’informations qui lui a été présentée sur le sujet, a sciemment laissé publier les renseignements qui étaient contenus dans la demande d’information. Il ne peut donc laisser le journal « La Nouvelle » publier des faits le concernant et partir se lamenter à la police en arguant d’injures, avec le secret espoir de voir ses « frères » emprisonnés après cette publication. 2- Toute infraction, pour qu’elle soit punissable, doit contenir trois éléments : l’élément légal, l’élément matériel et l’élément intentionnel. Il suffit qu’un de ces éléments fasse défaut pour que l’infraction ne soit pas caractérisée. Ici la demande d’informations adressée à sieur Amougou Belinga ôte toute intention diffamatoire aux journalistes qui ont publié l’article.

L’article 74 du Code pénal dispose en effet qu’« aucune peine ne peut être prononcée qu’à l’encontre d’une personne pénalement responsable. Est pénalement responsable celui qui volontairement commet les faits caractérisant les éléments constitutifs d’une infraction avec l’intention que ces faits aient pour conséquences la réalisation de l’infraction ». Quel homme doté d’un bon sens peut croire que les journalistes qui ont publié l’article, que sieur Amougou Belinga qualifie de diffamatoire, avaient l’intention de le diffamer à partir du moment qu’ils ont porté ces faits à sa connaissance pour information et qu’il est resté muet « comme une carpe » ? Non les journalistes n’avaient aucune intention délictuelle.

CONTOURS JURIDIQUES

Et puis, pourquoi sieur Amougou Belinga auraitil tendance à envoyer des gens en prison s’il n’avait pas lui-même peur ? Pourquoi n’avoir pas, dans le cas d’espèce, fait usage du droit de réponse, en application de l’article 53 de la loi N° 90/052 du 19 décembre 1990 sur la liberté de la communication sociale qui dispose que « le directeur de publication d’un quotidien est tenu d’insérer dans les quarante-huit heures suivant sa réception la réponse de toute personne nommée dans la publication…… ».

S’il n’a pas voulu faire des observations avant la publication des faits, pourquoi n’avoir pas usé du droit de réponse que lui confère l’article ci-dessus visé ? Le Code de procédure pénale, en son article 9 définit le suspect comme « toute personne contre qu’il existe des renseignements ou indices susceptibles d’établir qu’elle a pu commettre une infraction ou participer à la commission de celle-ci ». Sieur Amougou peut juridiquement être qualifié de suspect et cela ne devrait pas constituer une infraction, pour qui le déclare car les faits, en ce qui le concerne, épousent les contours juridiques d’une telle qualification. La situation, dans le cas d’espèce, se présente donc ainsi : les journalistes reçoivent des renseignements et sont en possession d’indices susceptibles d’établir que sieur Amougou Belinga a dû commettre des crimes économiques.

En privé et en toute discrétion, ils portent ces faits à sa connaissance en lui dévoilant même leur source, et provoquent sa réaction. Amougou Belinga reste muet. Ils publient l’article sur ce sujet. Au lieu de profiter de l’occasion pour se « blanchir » aux yeux de ses « délateurs et jaloux », tel qu’il les considère, en publiant sa réponse sur le sujet, on voit plutôt, dans les réseaux sociaux, qu’il a déposé une plainte, comme si une plainte était un fait justificatif. La plainte ne justifie pas les faits qui font de lui le suspect de criminel économique. Le Code pénal camerounais a prévu les faits justificatifs qui sont : l’exécution de la loi, l’obéissance à l’autorité légale, la légitime défense, l’état de nécessité. Si Amougou Belinga se trouve dans un de ces cas de figure, par exemple s’il doit sa fortune à l’exécution de la loi ( il se dit que c’est en exécution de la loi qu’il tient son argent autrement dit l’Etat a la possibilité de créer, dans sa souveraineté des hommes d’affaires), a-t-il besoin de poursuivre des gens qui lui prêtent la qualité de délinquant ? Il devrait les considérer comme des ignorants et les éclairer plutôt. Sieur Amougou Belinga, si vous êtes poursuivi par la clameur publique, n’ouvrez pas la boite à Pandores.