L’ancien président de l’Alliance des forces progressistes (Afp), revient sur les raisons de son retrait de la présidence du parti.
Qu’est ce qui justifie votre départ à la présidence de l’Afp ?
Mon départ est justifié par les statuts du parti. Je pense que si un parti politique ne prend pas ses statuts au sérieux, s’il faut les violer chaque fois, ce n’est pas lorsque vous serez président que vous allez toujours respecter la Constitution du Cameroun. Mon départ est statutaire. Deuxièmement, je pense aussi qu’à l’âge de 76 ans, il était temps que je passe le témoin à la nouvelle génération notamment la jeunesse, parce que demain, ce sont ces jeunes qui seront élus présidents, qui iront à l’Assemblée nationale et auront de l’énergie pour nous représenter dans les autres administrations publiques. J’ai passé deux mandats de quatre ans à la tête de l’Afp et je pense qu’il était temps que je passe la main à une autre génération.
Quel bilan pouvez-vous faire des huit années passées à
la tête de l’Afp ?
En 2007, lorsque nous avons créé ce parti politique, j’avais expliqué que l’Afp est un parti de proposition. Pendant huit ans, nous avons fait beaucoup de propositions aux populations, en publiant notamment les livres Orange (les couleurs de notre parti politique) pour leur expliquer les principes du parti. Notre programme que nous avons établi précisait les objectifs à atteindre si nous sommes élus à la tête de l’Etat du Cameroun. Donc le premier devoir d’un parti politique c’est d’informer ses militants sur les objectifs du parti. Ce que nous avons fait et cela est déjà un acquis. Deuxièmement, nous avons privilégié certaines valeurs comme la crainte de Dieu, nous avons promu les valeurs comme l’honnêteté qui selon moi doivent être le socle d’un leader politique qui aspire à diriger notre pays dans la démocratie. Nous avons donc préparé le terrain pendant huit ans pour que les Camerounais puissent avoir un esprit de discernement en politique. Je pense que cela commence à porter les fruits parce que beaucoup commencent à comprendre cela. Nous avons l’ambition de progresser en ayant les députés dans notre parti politique. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a Elecam qui se dit être un organe indépendant alors que nous savons que c’est le contraire.
Qui sera le candidat de l’Afp aux élections présidentielles de 2018 ?
Le moment venu l’Afp décidera de la personne qui sera le candidat à la présidentielle de 2018. Je pense que la présidente actuelle de notre parti politique va consulter tous les membres pour la désignation d’un candidat à la présidentielle, mais aussi les leaders des autres partis d’opposition pour voir s’il est possible de désigner un candidat consensuel pour battre le Rdpc aux prochaines élections présidentielles.
Restons dans les électionsprésidentielles notamment avec certains sénateurs et hautes personnalités de la République qui ont commencé à inviter Paul Biya à être candidat. Quel est votre commentaire sur ces multiples appels ?
Tant que Paul Biya est en vie il a le droit de briguer un autre mandat en 2018 parce que la Constitution lui donne ce droit. Je pense que les problèmes auxquels notre pays fait face ne sont pas liés à la personne de Biya, mais c’est le Rdpc en général parce que plusieurs militants nommés à certains postes de responsabilités profitent de leur position pour détourner des deniers publics. Certains sont déjà en prison. Mais il est important que si Paul Biya gagne en 2018 qu’il trouve d’autres personnes à qui il doit confier les responsabilités dans le gouvernement pour que la politique du Cameroun change. Les gens avec lesquels il dirige ne peuvent rien lui apporter de nouveau.
Quel est votre commentaire sur le réaménagement du gouvernement survenu en début octobre dernier ?
Plus ça change plus ça reste les mêmes, c’est-à-dire les gens du Rdpc qui utilisent de l’argent pour frauder dans leurs comités de base respectifs. Ce gouvernement n’a rien apporté de nouveau dans la politique de Paul Biya. Les gens continuent à voler sans penser au peuple qui croupit dans une misère totale. Ce gouvernement n’est pas capable de conduire notre gouvernement à l’émergence comme on nous fait croire à travers les slogans.
Quels sont les leçons tirées lors du dernier discours de Paul Biya à la Nation ?
La personne qui a conseillé le président de la république de Parler des allocations familiales l’a induit en erreur parce que l’allocation familiale concerne seulement les fonctionnaires. On doit élargir cette mesure pour tous les Camerounais y compris ceux du secteur informel. Cette annonce du chef de l’Etat est perçue comme une mesure discriminatoire parce que seuls les fonctionnaires sont concernés. Le second constat est que le président décide de baisser les prix de carburant au moment où le prix du baril a chuté sur le plan international. Et chez nous, la réduction devait être considérable. Baisser le prix du carburant à 20FCfa le litre cela est insignifiant et cette mesure semble ne pas avoir un impact positif sur le quotidien des Camerounais.
Comment trouvez–vous la gestion de la guerre contre Boko haram ?
Nous avons attendu longtemps pour prendre les précautions. Quand Boko Haram sévissait au Nigéria, nous n’avons pas pensé qu’en partageant les mêmes frontières avec ce pays, Boko Haram devait entrer chez nous. Beaucoup de gens parlent également de cette guerre en disant que ce sont des Camerounais qui font partie de ce mouvement terroriste. Mais je peux vous dire une chose, ce sont des gens qui ont la carte nationale d’identité camerounaise. Ils ont obtenu ces cartes d’identité parce qu’il fallait frauder lors des élections. Dans cette zone frontalière, il y a certaines autorités de notre
pays qui sont partis au Nigéria pour chercher les gens dans le souci de voter à leur avantage.
Aujourd’hui, comme ces gens sont pauvres, lorsque que Boko Haram leur donne 1000F, ils sont obligés d’aller combattre à leurs côtés. Nous pouvons tout dire de Boko Haram mais le terrain a été préparé par nous. Le président de la République doit associer tous les partis de l’opposition dans la lutte contre cette guerre parce qu’il s’agit d’une affaire qui nous concerne tous.