L'insécurité imposée par Boko Haram a poussé de nombreuses familles à fuir et à s'installer dans des lieux sécurisés.
Dans l'Extrême-Nord du Cameroun, région frontalière avec le Nigeria, la situation se dégrade et la malnutrition devient plus importante, car il s'agit d'une zone déjà touchée par la pauvreté. Et les organisations internationales et locales ont dû mal à satisfaire les besoins de ces populations.
Selon les organisations humanitaires, les familles déplacées manquent de tout : de vêtements, de revenus et surtout de vivres. D'après le Programme alimentaire mondial (PAM), il y aurait près de 180 000 personnes déplacées ayant fui les violences de Boko Haram. Certaines sont hébergées dans des camps, mais la plupart logent dans des familles d'accueil qui sont elles-mêmes déjà très pauvres.
Dans de telles conditions, la malnutrition gagne du terrain, avertit Jacques Roy, le représentant du PAM au Cameroun. « C’est un problème très, très grave parce que le taux global de malnutrition des réfugiés en camp est de 19%. Ce sont des taux qui sont excessivement élevés parce que lorsqu’on parle de taux acceptables dans une période d’urgence, on parle de 15 %, indique-t-il. Dès que les enfants sont identifiés, nous pouvons les traiter avec une pâte qu'on leur donne. Mais ces produits-là coûtent très cher. Ils viennent de l'étranger et ça prend du temps pour les recevoir. »
Les aides alimentaires du PAM et du gouvernement ne suffisent pas. Le directeur du PAM au Cameroun évoque le chiffre de 30 millions de dollars pour pouvoir subvenir à l’ensemble des besoins de ces réfugiés.
« Nous n’avons pas pu à ce jour donner suffisamment à tout le monde, alerte Jacques Roy. Nous avons encore des vivres disponibles pour les réfugiés pour les mois de mai et juin. Nous venons de nourrir 69 000 personnes, mais après nous n’avons plus rien. »
Ce problème de malnutrition n'est pourtant pas nouveau. Il est dû à un déficit quasiment régulier en céréales ces dernières années.
Mais avec la fermeture de certaines frontières et le ralentissement des activités lié à l'insécurité imposée par Boko Haram, la situation s'est dégradée: « C’est une zone à l’écologie très fragile, comme le fait remarquer Bouba Loumnala qui travaille dans le milieu rural à Maroua. Soit il pleut beaucoup et il y a des inondations, soit il ne pleut pas assez, on ne produit pas assez. Donc dans la zone, il y a toujours un déficit. Par exemple en ce moment, le sac de 90 kg de maïs a déjà atteint les 25 000 francs CFA [plus de 38 euros, ndlr] dans la zone du Mayo Danay. Dans le temps, à pareil moment, les premières pluies étaient déjà là. Mais jusqu'à présent, on n'a pas encore de pluie. Ce qui fait que les prix vont continuer à grimper. »
Les prix grimpent et faute de pluies, les agriculteurs retardent le moment de semer.