Actualités of Tuesday, 20 June 2023

Source: Le Messager

C’est grave : une note piégée atterrie sur la table de Paul Biya

Lettre ouverte à monsieur Paul Biya, président de la République, Chef de l’Etat. Lettre ouverte à monsieur Paul Biya, président de la République, Chef de l’Etat.

Lettre ouverte à monsieur Paul Biya, président de la République, Chef de l’Etat. Par Me YONDO BLACK (*) Monsieur le Président, Excellence Si vous êtes encore en vie, vous ne devriez pas être fier de vous-même. Et Je ne le dis pas par mauvaise langue, ni par un manque de respect pour votre Haute Personnalité, comme un jaloux ou un déçu de votre pouvoir auquel, j’avoue ne pas nourrir l’espoir d’y accéder un jour. Et là, force est de constater que ce pouvoir vous a été légué gracieusement par celui que vous appeliez à la fois religieusement et respectueusement, toute gratitude affichée, votre illustre prédécesseur, par un simple jeu de signature d’un décret, qui a fait de vous, de Premier Ministre, un Chef d’Etat d’un pays, et de quel Pays !

Un Pays que votre prédécesseur avait hissé au rang de Pays à revenus intermédiaires. Je suis de ceux qui, à votre accession au Pouvoir, ce 6 novembre 1982, une date que les camerounais (qui ne sont pas près d’oublier), ont applaudit à tout rompre, se réjouissant comme s’ils s’étaient retrouvés en face d’un événement heureux. Illusion, Triste illusion ! Combien étions-nous à applaudir en vous écoutant clamer haut et fort, « Nous passerons mais le Cameroun restera » Ajoutant, en vous adressant à vos compatriotes que nous sommes, « Demandez-vous ce que vous avez fait pour le Cameroun, et non ce que le Cameroun a fait pour vous » Vous exclamant ainsi, nous rêvions à croire que votre souci était de faire de vos compatriotes non pas de vulgaires jouisseurs, mais des citoyens responsables. Mal nous en a pris. Monsieur le Président, Lorsqu’en 1982, vous accédiez au Pouvoir, le Cameroun était un pays en paix, les mots comme « le vivre ensemble » allaient de soi. Il ne connaissait pas de problèmes à base tribalo-régionaliste, même le dosage que pratiquait votre illustre prédécesseur était fait si élégamment et discrètement qu’il n’agressait personne. Aujourd’hui, par votre mal-gouvernance, le Pays est en lambeaux. Le commun des mortels dit de plus en plus haut et fort que chacun rentre chez soi en visant plus spécialement les originaires d’une ethnie. A l’heure du renouveau, est-ce cela « du vivre ensemble » ? Malgré ce désastre que connait le pays d’Um Nyobe, de Félix Moumie, d’Ernest Ouandie, de Douala Manga, de Martin Samba et autres patriotes camerounais que l’histoire du pays n’oubliera jamais, nous voyons surgir çà et là des appels, vous invitant à solliciter un nième mandat à votre propre succession à l’élection présidentielle de 2025. Faut-il en rire ou en pleurer ? De quoi se demander si ce n’est pas une farce, alors, ce serait donc de la provocation d’un peuple déjà meurtri, qui s’est voué sans compter des années durant à votre cause, pour certains, allant jusqu’au sacrifice suprême.

Vos diverses absences à la tête de la gouvernance du pays, vous conduisant à gouverner par « de très hautes instructions » , des délégations de pouvoir donc, qui détournent de l’essence de la démocratie et ailleurs, s’apparentent à un abandon de poste, ont donné naissance à ce qu’il est convenu d’appeler « les nouveaux riches » , sortis de nulle part et jadis des illustres et sombres personnages. Eux, ils baignent dans l’aisance, dans l’opulence. Méprisants et extravagants, ils continuent de piller les caisses de l’Etat en toute impunité, pendant que vos compatriotes, pour lesquels, vous avez pourtant pris l’engagement lors de vos diverses prestations de serment, d’assurer le bonheur et la prospérité, ploient dans la misère, une misère qui ne donne pas à espérer, pour beaucoup, qu’un jour viendra où ils pourront joindre les deux bouts, se loger décemment sans la crainte d’une expulsion ordonnée à la requête de bailleurs sans le moindre sentiment d’humanité. Plus désarmant est cette désinvolture insolente que vous affichez face à ces divers scandales financiers et autres violations des lois de l’heure, clamant haut et fort : « Où sont les preuves » , consolidant ainsi ces délinquants à col blanc dans leurs forfaitures. Des preuves, il y en a pourtant légions, surtout grâce à cette prolifération des réseaux sociaux dans ce monde planétaire où, il est difficile d’étouffer la vérité. Que devrons-nous retenir de vous demain quand vous ne serez plus ? Quel enseignement les jeunes générations devront-elles retenir de votre passage à la tête du pays ? Gouverner, c’est prévoir, réfléchir et projeter sur le long terme.

C’est au vue de cela que votre prédécesseur a cru devoir s’appuyer sur des plans quinquennaux, avec comme agents d’exécution parmi tant d’autres la SNI dont la principale réalisation fut d’encourager l’initiative privée en initiant la création d’entreprises dans divers secteurs de l’économie, lesquelles devaient être cédées à des privés nationaux. A un moment où le Président Macron, qui ne sait quoi faire pour apaiser son peuple en révolte, crie « Le Mali appartient à la France et non à la Russie » , Vous semblez ne pas être concerné. Rien là d’étonnant. Vous êtes coutumier de cette attitude d’indifférence. En effet, c’est cette même attitude que vous aviez affiché face au monde, lorsque le Président Chirac, pourtant un chef d’Etat étranger défendant l’Afrique à la place de ses dirigeants amorphes et sans ambitions pour leur pays a, en son temps, déclaré : « Nous avons saigné l’Afrique pendant quatre siècles et demi. Ensuite nous avons pillé ses matières premières ; Après on a dit : ils (les Africains) ne sont bons à rien… » Et c’est fort justement qu’Aliou BAH dira : « L’un des plus grands malheurs d’un pays, c’est lorsqu’il manque de dirigeants qui ont le sens de la grandeur » . Votre homme lige, le professeur Mathias Eric Owona Nguini, dont chacun connaît les revirements, de surenchérir : « Le Cameroun a besoin d’un homme d’Etat qui va nous permettre d’oublier les 34 ans de retard et d’obscurantisme, redorer l’image du Cameroun, rendre les Camerounais propriétaires du Cameroun sur le plan politique, économique, culturel et social. C’est une urgence absolue. Pour la jeunesse d’aujourd’hui et de demain, notre devoir est de faire du Cameroun une nation où rêver, travailler et réussir sont des droits, des devoirs et des aspirations légitimes ».

J’ai envie, monsieur le Président Biya, de vous demander quelles décisions, en tant que Chef de l’Etat, Père de la Nation, comme on aime à vous appeler, avez-vous prises au sujet des 180 milliards de francs détournés, qui avaient été octroyés au Cameron par nos partenaires au développement en lutte contre le Covid19 ? Et les 2000 milliards de francs et plus pour la coupe d’Afrique des Nations. Tous des fonds détournés dont les camerounais attendent impatiemment de voir venir votre décision. Mais il n’y a pas que ces deux dossiers Il y a l’assassinat du journaliste Martinez Zogo, dans de pires conditions et d’unecruauté, j’ai envie de dire d’une sauvagerie rarement atteinte dans le monde. Dans ce dossier se trouvent mis aux arrêts de prétendus complices, mais le peuple attend toujours de connaître le ou les auteurs car dans la réalisation d’un crime, il ne saurait y avoir de complices sans auteurs ou co-auteurs.

Avec une police nationale qui regorge de tant de fins limiers et un service de renseignements dont nombre de pays rêvent d’avoir et nous envient, il est incroyable que ces derniers courent toujours, humant l’air de la liberté, faisant place nette à des rumeurs et autres commentaires tendancieux qui sont loin de donner bonne presse au Cameroun. Nous avons peine à croire, Monsieur le Président, Excellence, que vous qui êtes l’homme de la rigueur et de la moralisation, vous puissiez laisser entretenir un tel flou. Des cas d’interrogations sont nombreux et divers, et attendent des réponses précises et claires de vous : Vous qui avez des comptes à rendre à ce peuple qui vous a fait Roi, vous laissant, grâce au mandat qu’il vous a donné de gérer le Pays en ses lieu et place. Pêle-mêle : l’affaire de Glencore, l’expropriation maffieuse de Dikolo à Douala, les ventes des immeubles de l’ex-Oncpb, de la Regifercam, du Port Autonome de Douala. Que sais-je encore ! Il en est de même des enquêtes judiciaires sur des crimes de sang dont on n’a jamais connu les résultats à savoir : le décès de Madame Jeanne Irène Biya, la Première Dame à l’époque, l’assassinat des sœurs de Djoum, le décès du Commandant Motaze, l’assassinat de Monseigneur Plumet, de l’abbé Mbassi, de Me Ngongo Ottou, de l’évêque de Bafia, Monseigneur Bala et je ne saurais les énumérer tous. En plus de tant de scandales, le pays subit des crises nées d’une absence d’écoute et d’anticipation. Les séparatistes du Noso, les adeptes de la secte de Boko Haram sèment la terreur dans ces zones devenues des noman’s land sans que vous n’ayez pu effectuer la moindre descente sur le terrain pour rassurer ceux de vos compatriotes fortement meurtris dans leur chair et leur âme. C’est vrai, j’oubliais et des langues le disent, vos compatriotes vont vous salir en vous approchant trop près de vous !

Monsieur le Président, Excellence, Vous qui êtes un Homme de lois, qui avez fait Sciences PO, comment allez-vous convaincre vos compatriotes que pour sa modernisation et son ouverture à la démocratie, il était nécessaire que le Cameroun soit doté d’un Parlement bicaméral, une Assemblée Nationale et un Sénat, augmentant par le fait même le poids des charges de l’Etat. Déjà, dans votre conception de la gestion de l’Etat, il n’existe pas de séparation de pouvoirs, et cela pose problème. L’Exécutif contrôle tout sans partage, même l’autorité judiciaire se retrouve sous votre influence. On en est à se demander à quoi sert l’Assemblée nationale. En effet, à l’époque où, seule, elle représentait le Parlement, en plus de sa mission du vote des lois, elle avait mission de contrôler l’action gouvernementale. Mais non seulement de toute son histoire, on ne retrouve dans ses archives aucune proposition de lois qui émane d’elle, alors qu’elle a en partage avec l’exécutif l’élaboration des lois, elle est devenue ce que le commun des mortels appelle une chambre d’homologation.

Un gouffre du trésor public, tant la rémunération et les avantages reconnus à ses membres (les députés donc) sont sans rapport avec l’accomplissement de leur mission. Et comme cela ne suffisait pas, vous avez décidé de créer le Sénat, pompeusement appelée la Chambre Haute qui offre au pays, à travers son Président, sa deuxième personnalité sur le plan protocolaire. Vous êtes-vous demandé ce que coûte au pays ce mimétisme ? De quoi penser que vous ne gouvernez pas ; Vous régnez A en croire les réseaux sociaux qui nous informent désormaisface à l’irrégularité des sorties du journal officiel (J.O), le sénat vous sert de cadre de placement des hommes et des femmes que vous ne savez où envoyer afin de les récompenser pour des services qu’ils vous auraient rendu. Et là, j’ai envie de vous dire que le Cameroun peut se passer de son existence, sans que cela ne l’empêche d’aller de l’avant.

En 2013, le budget de ce « machin » comme l’aurait appelé le général de Gaulle était évalué à 15 milliards 500 millions de francs CFA non compris les indemnités de fonction et autres avantages en nature. Et dans l’improvisation de sa création, force est de constater que cette Haute Chambre n’a pas jusqu’à présent de siège et se trouve obligée de squatter par ci - par là. En raison de l’inutilité avérée de cette institution, sa suppression aurait permis la réalisation de bien de structures pour le plus grand bonheur du peuple tout entier, à savoir entre autres,la création des hôpitaux de référence, l’équipement en plateaux techniques plus modernes pour les hôpitaux existants, des routes bitumées, ne dit-on pas que « là où passe la route, le développement suit ? » ,la modernisation de nos villes, les services publics d’hygiène et j’en passe. Vous avez loupé le coche, Monsieur le Président. Vous avez liquidé tout ce que vous a laissé votre illustre prédécesseur et qui rendait le camerounais fier et le Cameroun enviable.

Aujourd’hui, l’heure du bilan a sonné. Il est temps d’arrêter l’érosion et à ce sujet je ne peux que vous citer votre challenger de la présidentielle de 2018, le Professeur Maurice Kamto, qui,clôturant sa plaidoirie devant les Honorables Membres de la Cour Constitutionnelle, a déclaré « Noussommesà une phase de l’histoire de notre pays où il faut que nous ayons le courage de dire qu’il y a un temps pour toute chose et que si le Président Biya aime son pays, comme je crois qu’il l’aime, il doit savoir au fond de lui-même qu’il a donné au Pays le meilleur de luimême et qu’il n’a plus rien à lui donner. Alors, il serait criminel pour ceux qui entonnent ce cantique qu’au Cameroun, il n’y a qu’une personne et une seule qui serait apte à conduire la destinée du Cameroun… Il faut savoir quitter les choses, avant que celles-ci ne vous quittent.

Demain, il sera tard, trop tard et trop c’est trop. Inutile de vous prêter, Excellence, Monsieur le Président, à ce jeu de la succession de gré à gré, ni d’œuvrer dans l’ombre pour céder la place à votre fils. Tout cela est aux antipodes de la démocratie que vous ditessouhaiter que,l’histoire retienne de vous, que vous êtes l’homme qui a apporté au Pays la démocratie et le développement, oubliant ou plutôt faisant semblant d’oublier que vous nous avez fait condamner en son temps, moi à 3 ans, mon compagnon Anicet Ekane à 4 ans d’emprisonnement tout simplement pour avoir tenté de demander au peuple d’exiger de vous le respect de la constitution, la loi fondamentale du pays, qui place le Cameroun sous le règne d’une démocratie pluraliste et non d’un parti unique . Vous fermez les yeux face à vos échecs de gestion qui place le Cameroun au rang de pays sinistrés. Un peu de modestie s’il vous plait, Excellence, Monsieur le Président. En 40 années de Magistrature Suprême, vous vous êtes illustré comme le Président des promesses non tenues, le roi du bluff, l’homme de la destruction du patrimoine national (liquidation des sociétés d’Etat, entre autres), le promoteur de l’impunité et de l’incompétence, le plus grand commun diviseur des enfants de ce pays, mettant ainsi à mal l’unité et la cohésion nationales, au risque de compromettre la paix. Je me permets pour conclure et paraphrasant un de vos hommes lige le professeur Owona Nguini, je dirais : « Le Cameroun a besoin d’un homme d’Etat qui va nous permettre d’oublier les 34 ans de retard et d’obscurantisme, redorer l’image du Cameroun, rendre les Camerounais propriétaires du Cameroun sur le plan politique, économique, culturel et social. C’est une urgence absolue » . N’ajoutez pas au mal que vous avez déjà fait à ce pays que le destin vous a donné en charge pour son épanouissement , mais qu’à la place, vous avez ruiné , mis en lambeaux et qu’il nous faudrait reconstruire dans l’unité, la paix et la concorde.

(*) Ancien Bâtonnier de l’ordre Avocat au Barreau du Cameroun Président du M.S.N.D