L’affaire de la suspension du directeur général de l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle, Bohoussou Loukou Denis, le 14 octobre 2021, est très loin d’être rangée dans les placards. On va de rebondissement à rebondissement. Le Bénin qui assure la présidence du conseil d’administration, le Cameroun qui abrite le siège de l’institution et la Côte d’ivoire dont est issu le directeur général aujourd’hui en indélicatesse avec l’Oapi, s’écharpent, ou presque.
Dans une correspondance, le ministre camerounais des mines et de l’industrie, Gabriel Dodo Ndoke, va saisir son homologue du Bénin, Alimatou Sha-diya Assouman, en l’occurrence présidente du conseil d’administration (PCA) qui a procédé à la suspension du DG de l’Oapi. Celle-ci sera aussi saisie dans la foulée par et son homologue ivoirien, Souleymane Diar-rassouba le 03 novembre dernier.
En cause, l’opposition de la présidente du conseil d’administration de convoquer une assemblée extraordinaire pour se pencher sur la suspension de Bohoussou Loukou Denis, ce, avant la tenue d’une assemblée générale ordinaire prévue le 03 décembre prochain.
Le ministre ivoirien rappelle que « l’article 33, alinéa 4, de l’Accord de Bangui dispose que te directeur général prend part, sans droit de, vote, à toutes les sessions du conseil d’administration. Il est d’office le secrétaire desdites sessions. Or, votre décision de suspendre le directeur général le met dans la situation qui ne lui permettra pas d’assurer pleinement cette attribution prévue par l’acte fondateur de notre organisation commune. Par conséquent, la tenue de la 61e session ordinaire ne saurait se tenir sans qu’une session extraordinaire n ’examine et ne délibère souverainement sur la suspension du directeur général de l’OAPI, prise par votre décision. Au vu de tout ce qui précède, je considère votre lettre comme un refus de mettre en œuvre une disposition de l’Accord de Bangui ».
Ainsi, pour le ministre ivoirien de l’industrie, la convocation d’une session extraordinaire du conseil d’administration, telle que demandée par les administrateurs, conformément à l’article 6 du Règlement intérieur du conseil d’administration, qui reprend l’article 29 de l’Accord de Bangui, est nécessairement un préalable à la tenue de ladite session ordinaire, appelée à statuer sur la gestion du directeur général.
Dans la foulée, en vue d’éviter un blocage institutionnel de l’organisation, le ministre ivoirien demande aux administrateurs de l’Oapi que le vice-président du conseil d’administration, assuré par pays siège, convoque le conseil d’administration. Notons que c’est Gabriel Dodo Ndoke, représentant du Cameroun en tant que Etat-siège, qui assure la vice-présidence de l’Oapi.
Le Cameroun s’aligne sur la posture de la Côte d’ivoire. C’est la raison pour laquelle, toujours le 03 novembre dernier, Dodo Ndoke a saisi dame Alimatou Shadiya Assouman, pour la tenue d’un conseil d’administration extraordinaire, avec en objet la situation du DG suspendu. Selon le ministre camerounais des mines et de l’énergie, cette session extraordinaire est requise par plus du tiers des États membres (11 sur 17). De quoi en principe faire plier la Pca, puisque le minimum du tiers requis des membres y a exprimé avis favorable.
Dans sa correspondance, Dodo Ndoke soutient : «Ayant donc pris de façon unilatérale la décision de suspension du directeur général de l’Organisation, vous avez exactement enclenché les leviers d’une session extraordinaire dans les conditions précisées aux dispositions combinées des articles 27 (g) et 29 (2) de l’Accord de Bangui.
Rappelant à toutes fins de droit, que les demandes formellement exprimées par la majorité de vos pairs administrateurs, sont l’expression de la souveraineté des États respectifs qu’ils représentent dans l’appréciation des décisions engageant au plus haut niveau la vie de l’organisation, j’attire à nouveau humblement votre attention sur le fait que vous ne disposez pas de liberté d’appréciation sur l’opportunité de faire droit ou non à leur demande».
Il ajoute : « Persister à ignorer cette évidence, ne contribue pas qu ’à aggraver une crise dont le mérite n’aura été jusqu’ici que d’écorner l’image de l’OAPI aux yeux du monde. Dans ce contexte, te Cameroun, État du siège continuera de convoquer tous les moyens de droit, à l’effet du rétablissement de la légalité».