MARCHE PUBLIC. Suite à une commande initiale d’un peu plus de 5 millions de francs exécutée mais non payée, la représentation nationale se voit exiger aujourd’hui un peu plus de 725 millions de francs par un prestataire qui met en exergue divers préjudices subis par son entreprise. L’affaire a été appelée pour la première fois le 1er septembre 2022.
L’Assemblée nationale du Cameroun a-t-elle encore un gestionnaire à sa tête ? La question est incontournable au regard du procès dans lequel se trouve impliquée depuis quelques semaines la chambre basse du parlement du Cameroun devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif. Pour un tout petit marché public d’environ 5 millions de francs attribué à un opérateur économique en octobre 2019, la représentation nationale se trouve désormais menacée de payer un peu plus de 725 millions de francs. C’est en tout cas ce que le plaignant sollicite en réparation des divers préjudices qu’il dit avoir subis du fait de l’insolvabilité réelle ou organisée de l’Assemblée nationale.
Le plaignant dans cette affaire s’appelle Alain Bertrand Bandji Belate, promoteur de l’Etablissement Philppa-Négoce. Il dit avoir été adjudicataire à travers sa société le 22 octobre 2019 auprès de l’Assemblée nationale du Cameroun d’une lettre de commande relative à l’entretien et au dépannage des climatiseurs et réfrigérateurs du cabinet et de la résidence du président de l’Assemblée nationale, M. Cavaye Yegue Djibril. Il devrait exécuter cette commande dans un délai de 12 mois dans le but d’obtenir paiement total de la somme toutes taxes comprises (TTC) de 5,2 millions de francs. La commande a été exécutée et a fait l’objet de quatre procès-verbaux de réception techniques respectifs des 23 septembre 2019, 6 janvier, 13 février, et 2 juin 2020.
Intérêts moratoires…
Le problème, c’est que le prix de ce marché public n’a jamais été payé depuis lors, en dépit de toutes les démarches du prestataire. Philppa-Négoce a d’ailleurs effectué des travaux supplémentaires pour le compte de l’Assemblée nationale, qu’il a facturés à 4,3 millions de francs environ. Faute de paiement jusque-là, M. Bandji Belate a constitué un avocat pour se faire payer. Et ce dernier, au regard du dossier de son client, considère que Philppa-Négoce se trouve désormais face à «un retard de paiement anormalement long, injustifié et fortement préjudiciable, tombant sous le coup du bénéfice pour le cocontractant des intérêts moratoires» prévus par certaines dispositions du Code du marchés publics. D’où la procédure judiciaire engagée contre l’Assemblée nationale.
Avant de déposer sa plainte, le prestataire a adressé un recours gracieux préalable au secrétaire général de l’Assemblée nationale avec copie à l’Agence de régulation des marchés publics (Armp). Et comme le veut la réglementation en la matière, le régulateur a pris acte de la situation dans une correspondance adressée à M. le SG de l’Assemblée nationale. La correspondance est loin d’avoir sorti la représentation parlementaire de son sommeil dans le dossier. Et désormais, M. Bandji Belate sollicite que la justice condamne son adversaire à lui payer pas moins de 725 millions de francs, dont presque 195 millions de francs de préjudice moral, 219 millions de francs de préjudice matériel et financier et presque 300 millions de francs de manque à gagner. Programmée pour la première fois le 1er septembre dernier, l’affaire revient le mois prochain pour l’ouverture des débats.