La ladrerie de nos dirigeants nous perdra un jour ; imbus d’eux-mêmes comme seuls peuvent être des arrivistes. Pendant ce temps, la pauvreté augmente de façon significative. Du cartésianisme à l’envers, pardon en enfer. Comme la peste, au 19e siècle, ce fléau répand la terreur et, est, de facto, infra développementaliste.
Lors de sa prestation de serment le 06 novembre 1982, à 10 heures, le président Paul Biya avait annoncé, en grandes pompes, le déroulement de son autorité aspirante sous le prisme de « la rigueur et de la moralisation ». Des années plus loin, les résultats pourraient être évalués avec sobriété : corruption galopante, dépravation à outrance des mœurs, incivisme professionnel caractérisé, distraction des fonds publics à nul autre pareil et tutti quanti. Qui plus est, il apparait éloquent que le train-train quotidien des camerounais connait des préoccupations existentielles d’une importance capitale et de grande envergure. L’impression s’impose alors que la croisade contre les fléaux que sont : la corruption et la démolition des caisses de l’Etat, ne semble pas avoir donné des aboutissements escomptés : lutte ralentie et rapetissée par des soubresauts de tout ordre. Comment comprendre et faire entendre raison au citoyen lambda qu’un inspecteur des régies financières, moins de quelques années après sa sortie de l’Enam, puisse aligner au moins trois villas cossus, rouler carrosse et mener grand train ? À ce stade de sa carrière professionnelle, un tel fonctionnaire n’aurait pas 250.000 FCFA, par mois comme salaire. Il ne remplirait aucune condition dans la plus modeste banque du cru pour qu’un crédit lui soit octroyé
Dichotomie
Comment parvient-t-on à une telle dichotomie entre les revenus, les réalisations sociales et un accomplissement de ses projets de vie ? Cette question taraude les esprits et pourrait même s’étendre à d’autres corps de métier, notamment l’ensemble du corps judiciaire, des gestionnaires de crédit et les autres dispensateurs du bien-être public. Pendant ce temps, la majorité silencieuse croupit dans une misère noire et abjecte. Ces nouveaux riches, parfois peu attentionnés à l’existence des autres, aveuglés par l’argent astucieusement subtilisés dans les caisses de l’Etat, roulent les mécaniques dans une vulgarité importune, dédaignant au passage, les simplettes règles de la morale publique. Devant cette brutalité rébarbative pour laquelle l’on ne s’aurait garder le silence, de peur d’être coupable, fusent déjà les réactions des bien-pensants autoproclamés déclarant à hue et à dia : « on va faire comment ? Le pays est ainsi fait et ce, depuis des lustres ! ». Il est dès lors, superfétatoire de se résigner devant la paupérisation rampante des masses et face à l’embourgeoisement effréné d’une minorité. Par voie de conséquence, on pourrait proposer, quitte à les voir jeter dans les tiroirs de l’oubli, des panacées contre la corruption et l’atteinte de la fortune publique. Après la répression de ces tares par les dispositions du code pénal, le constat est constant : les lignes n’ont pas bougé d’un iota. Une Caste triée sur le volet est bien déterminée à poursuivre l’enrichissement sans vergogne : duplex et villas dignes de Miami en Floride, sortent de terre plus vite que les champignons dans nos campagnes, des véhicules derniers cris illuminent toute honte bue nos rues et autres cités et la pauvreté n’a de cesse de frapper de plein fouet les populations. Dans ses différentes adresses à la nation, Paul Biya n’a de cesse de fustiger ces atteintes à la fortune publique et ces enrichissements sauvages et sans justificatifs. Mais rien n’y fait, puisque ses plus proches collaborateurs sont concernés au plus haut point par ces dérives comportementales. Un peu comme si le code pénal n’a jamais existé et qu’il n’est pas assez dissuasif. Corruption, concussion, favoritisme, faux dans des actes, trafic d’influence, indélicatesse avec les finances publiques vont progressant avec une obstination sans épithètes, et peu comme si rien n’était.
Tribunal criminel spécial
Pour pallier les insuffisances à lutter contre ces fléaux relevés dans le code pénal, les pouvoirs publics ont créé, de guerre lasse, et comme dans un souci d’efficience, le Tribunal criminel spécial (Tcs, Ndlr). Les personnalités de la république passent à la trappe depuis pas mal d’années. Parfois sans honte, ni remords, chacune plaide non-coupable : sans que pour autant leurs différentes fortunes dont elles jouissent puissent se justifier tant au Cameroun qu’à l’extérieur, ou des comptes à prête-noms seraient de gros matelas financiers et fournis par l’argent du petit contribuable camerounais. Jusque-là, rien ne semble atténuer ou décourager les uns et les autres de marauder. On a comme l’impression que les concussionnaires inventent même de nouvelles approches qui ne laissent plus de traces. Des techniques assez innovantes sont expérimentées pour continuer de spolier impunément le petit peuple. Ainsi, voit-on des marchés publics non achevés, des localités sans salles de classes convenables, sans centres de santé. Dans certains coins de la république, la distance est au 100 km ! L’électrification relève encore du monde onirique, dans plusieurs villages.
C’est dire la détermination des uns et surtout des autres à la kleptomanie. De qui se moque-t-on finalement avec l’élargissement en cascade de certains responsables ? L’université de Douala par exemple ploie sous le poids des dettes, tous les anciens gestionnaires ont été relaxés. L’eau et l’électricité manquent, mais certains dignitaires respirent la liberté. Comme l’avait prédit Albert Camus dans « l’homme révolté », nous tendons vers un bouleversement ample où « la révolte (sera né) du spectacle de la déraison, devant une condition injuste et incompréhensible. Il est donc de bon ton de continuer à nettoyer les Ecuries d’Augias, ces prévaricateurs n’ont de cesse de se bomber le torse, un peu comme si cela relève de source de l’intelligibilité et de cohérence.