Si en Europe Irène et Paul Biya filaient le parfait amour, les choses ont été tout autre lors que le jeune premier ministre fut nommé président de la République du Cameroun par son prédécesseur Ahidjo. Ne reconnaissant plus son mari qui serait devenu adepte de pratiques occultes après le coup d’Etat manqué de 1984, Irène Biya a tenté à plusieurs reprises, de quitter son mari. Sa tentative de fugue avec un jeune sous-officier de la marine a été déjouée par les services de renseignement de la présidence de la République. Ami intime du président de la République à l’époque des faits, le journaliste et écrivains Ebale Angouno raconte la triste fin du jeune cadre de l’armée camerounaise.
Un couple modèle? Au départ, oui. Lorsqu'ils se sont mariés, ils croyaient en l'amour. Ils y croyaient encore lorsqu’ils sont rentrés au pays, sûrs de s'aimer, et de vivre ensemble selon la formule usuelle, "pour le meilleur et pour le pire". Les choses ont basculé quand il a fallu qu'il devienne chef d'Etat. Certes, c'était très beau au départ. Puis, elle a commencé à ressentir comme un relâchement; il n'était plus à elle, il ne lui appartenait plus. Le temps qui passait les détachait graduellement. Elle sentait qu'il ne s'intéressait plus à elle, comme jadis. Et cela l'inquiétait.
Jusqu'au jour où les choses finirent par se préciser, après le putsch manqué. Les pratiques magiques et la sorcellerie les éloignaient davantage l'un de l'autre, physiquement et moralement. Au point de ne même plus pouvoir s'adresser la parole des journées entières, et de faire des efforts pour éviter de se rencontrer. Considérant cette atmosphère, elle lui demanda à plusieurs reprises qu'ils aient une causerie sérieuse, mais il a toujours pu trouver une porte de sortie, en évoquant "ses lourdes responsabilités", lesquelles ne le lui permettaient pas. Si bien qu'elle en est arrivée à envisager une fugue; car il n'est pas facile pour une femme d'accepter d'être trahie par son époux, et qui plus est, avec des hommes, comme s'il avait trouvé en eux mieux que ce qu'elle lui apportait. Plus grave, lorsque sous son nez, l'époux pousse le bouchon jusqu'à la zoophilie. C'est dire qu'il n'a vraiment plus besoin d'elle, au point de lui préférer des animaux.
L'infortunée épouse va alors s'allier à un jeune sous-officier de la marine, en service à la sécurité présidentielle, pour solliciter son aide, et envisager une fugue ensemble. Ce beau marin, quoique plus jeune qu'elle, pourrait bien être son compagnon, une fois parvenus sous d'autres cieux. Certes, si son neveu, Motaze Roger, l'Aide de camp du chef de l'Etat, avait accepté de l'aider à fuir, les choses auraient pu être envisagées avec plus d'optimisme. Mais le capitaine dit avoir juré "honneur et fidélité" à son Président, et ne pourrait le trahir de quelque façon que ce soit. Les préparatifs de la fugue vont bon train, mais c'est sans compter avec la perspicacité des services spécialisés du Palais. Le jeune marin va être subitement détaché de la sécurité présidentielle pour rejoindre son corps d'arme, et aller immédiatement au front, où des manœuvres militaires opposent, en zone frontalière, le Cameroun à un de ses voisins. Jeanne-Irène apprendra bien vite, les jours qui suivront, qu'il est tombé sur le champ de bataille, d'une balle dans le dos.