Actualités of Friday, 6 October 2023

Source: Le Messager

Cameroun : le réseau, un grand brouillard

Plusieurs routes sont dans des états déplorables au Cameroun Plusieurs routes sont dans des états déplorables au Cameroun

La question du développement du réseau routier est une préoccupation majeure dans un pays comme le Cameroun où, après plus de soixante ans d’indépendance, le faible développement du réseau routier et des infrastructures routières, voire, le manque d’entretien des routes existantes, sont à l’origine des mauvaises conditions de vie des populations et celles des zones rurales en particulier. Existe-t-il une vision gouvernementale de développement du réseau routier, mise en œuvre et perceptible ? On est tenté de répondre à cette question par la négative.

Ce d’autant plus que l’état des routes, d’une région du pays à l’autre, démontre à suffire que le développement du réseau routier demeure le ventre mou du gouvernement. Tout part des axes routiers, appelés routes nationales qui relient des capitales des régions en traversant les départements. On y observe de nombreux creux non refermés, sources d’accidents de circulation. Si à cela on ajoute l’étroitesse de la chaussée, on comprend vite que l’absence d’une vision de développement du réseau routier, est à l’origine de la construction des routes depuis les années 2000, avec la largeur des années 60.

Celle qui ne tient pas compte de l’accroissement de la population, et de la densité du trafic. La largeur de la chaussée de nos jours, devrait être celle que l’on observe sur l’axe lourd Douala-Yaoundé au niveau de la pénétrante Est de la ville de Douala qui va du pont sur la Dibamba jusqu’au lieu-dit « Village » . C’est cette largeur de la chaussée qui devrait être appliquée à toutes les routes en construction, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Le réseau routier est très faible. Là où les routes sont construites, elles sont très étroites et sans entretien. Celles qui ne sont pas revêtues comme c’est le cas dans les arrondissements, constituent la principale cause de la misère des populations rurales. Le calvaire des populations rurales Malgré le phénomène de l’exode rural, il reste tout de même dans nos villages et campagnes, des « gardiens des villages » qui résistent aux attractions de la vie en ville. Ce sont ces derniers qui pratiquent l’agriculture, la pêche et l’élevage pour ravitailler les zones urbaines. L’Etat, il faut l’avouer, a compris la nécessité de maintenir ces populations dans nos villages et campagnes, en y créant les services sociaux de base : écoles, hôpitaux, marchés et des services administratifs déconcentrés pour permettre à ces populations de n’avoir plus à parcourir de longues distances pour satisfaire certains besoins élémentaires.

Malheureusement, c’est comme si l’Etat n’a pas compris que la réalisation principale dans une localité est la route. Et que même si elle n’est pas bitumée, elle doit être régulièrement entretenue pour faciliter le trajet des automobilistes. Nous faisons allusions ici aux routes qui relient les départements ou beaucoup plus encore de celles qui relient les arrondissements aux chefs-lieux de départements. Ces routes sont dans un piteux état qui traduit le manque de considération et de planification du gouvernement sur l’extension et l’entretien du réseau routier. Ils sont nombreux, les arrondissements dans lesquels le gouvernement a construit des infrastructures sociales de base et a établi des services publics et y affectant des agents de l’Etat.

Malheureusement, ceux-ci continuent de rester dans les grandes villes en allant servir qu’une ou deux fois seulement par semaine. Mais la grande majorité ne s’y rend pas du tout, les conditions d’accès étant rares et coûteuses à cause du mauvais état de la route. Les agriculteurs et les éleveurs vivent le calvaire lorsqu’il est question d’écouler leurs produits dans les villes. Puisque les transporteurs ne respectent aucun critère homologué par les syndicats des transporteurs ou par le Ministère des Transports pour fixer les prix.


Ils appliquent plutôt le coup d’opportunité qui tient seulement compte de la demande. Là où il n’y a que deux ou trois transporteurs, la demande en transport devient forte. C’est alors que le sac de pomme de terre, de manioc, d’igname, de macabo ou de patate, est fixé à 2000, 3000 voire 5000f en fonction de la distance. Le prix du passager à la tête revient parfois à 5000f pour une distance de 30 km seulement. Le calvaire des ruraux ne se retrouve pas seulement dans la cherté du prix du transport, mais plus encore dans les conditions de voyage. La rangée de sièges dans les véhicules, prévue initialement pour 3 personnes, est désormais occupée par 5 passagers sans tenir compte de leur proportion physique.

À cet ensardinement des passagers, il faut ajouter les effets dommageables des secousses du véhicule dans les creux tout au long du trajet. Arrivé à destination, on ne se plaint pas seulement des crampes, mais aussi des lombalgies. Des pratiques peu orthodoxes On objectera certainement que l’entretien et le bitumage des routes sont très coûteux et que c’est pour cette raison que le gouvernement y va progressivement. Face à cet argument, l’on peut opposer la théorie des projets prioritaires d’un gouvernement pour laquelle la route occupe la première place. On observe que partout où là la route passe, c’est le désenclavement de la localité qui suit. Par contre, le Cameroun est cité selon les organisations spécialisées, comme faisant partie des pays où le kilomètre de route bitumée est le plus cher sur le continent. Est-il impossible d’imiter les pays de la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, dans lesquels nous avons eu le plaisir de séjourner, où la mercuriale appliquée par les 15 Etats membres de la Cedeao, fixe le bitumage d’un kilomètre de route à 400 millions de Fcfa.

De telle sortes que le Cameroun, en sollicitant les mêmes prestataires, soit capable de faire bitumer 1000 km de routes à 400 milliards Fcfa chaque année. Cela est possible avec le budget actuel de l’Etat. C’est juste une question de vision et de politique publique sur l’extension du réseau routier. L’adoption de la mercuriale de 400 millions fcfa/km et la sollicitation des prestataires qui exercent en zone Cedeao, peut permettre au Cameroun de faire bitumer 1000 km de route par an soit 5000 km de routes en 5 ans pour un montant total de 2000 milliards. Pour le faire, le Ministère du Plan et de l’Aménagement du Territoire, associé au Ministère des Travaux publics devront sortir leurs cadres des bureaux pour sillonner l’ensemble du pays pour recenser les routes à asphalter. Il ne s’agra pas de routes à créer, plutôt de routes à revêtir, c’est-à-dire celles qui existent déjà et qui relient les départements ou qui rallient les arrondissements aux chefslieux de départements. Cahier de charges Seulement, l’extension et l’entretien du réseau routier, appellent à l’adoption de la rigueur et de la fermeté de la part du gouvernement. D’abord, il faudra que le revêtement des routes soit fixé à 400 millions Fcfa/km comme c’est le cas en Afrique de l’Ouest. Ensuite, il faudrait que le gouvernement veille à ce que la qualité du travail réponde au cahier de charge.

Nous avons vu en Afrique de l’Ouest, des entreprises revêtir des routes en trois couches. Ce qui donne lieu à une épaisseur conséquente d’au moins 15 cm pour une durée de vie de plus 50 ans. L’extension et l’entretien du réseau route requiert une véritable volonté publique avec les effets constatables sur le terrain. Il faudra que cesse le revêtement des routes avec une épaisseur qui les contraint à la dégradation six mois après, avec comme conséquence, la réfection d’une même route trois à quatre fois en espace de cinq ans. Il faudra éviter dans l’avenir des spectacles hilarants et insolites à l’instar d’un ministre des Travaux publics qui au cours d’une visite d’inspection de réalisation des travaux de routes, demandait à un prestataire, comment il a fait pour obtenir ce marché. Cette question du ministre des Travaux publics bien que curieuse, a le mérite de mettre en lumière le grand brouillard qui entoure la politique de planification et de passation des marchés de revêtements des routes dans le pays de Roger Milla. C’est ce même brouillard qui obscurcit la suite de la construction de l’autoroute Douala – Yaoundé. La création du raccordement à Boumyembel associé à la construction de nouveaux péages modernes sur l’axe lourd Douala-Yaoundé et non sur l’autoroute constituent les éléments qui militent en faveur de la validation de la thèse qui soutient avec pertinence la fin de la construction de cette autoroute au niveau de Boumyembel.