Actualités of Saturday, 2 September 2023

Source: www.camerounweb.com

Cameroun : menaces sur la rentrée scolaire

L'étude réalisée par le ministère lui-même déplore aussi un fort déficit d'enseignants L'étude réalisée par le ministère lui-même déplore aussi un fort déficit d'enseignants

Le gouvernement camerounais ferme près de 500 écoles primaires privées dans six régions du pays pour avoir opéré de façon clandestine. Une décision qui intervient à deux semaines du début de la nouvelle année académique qui commence le 4 septembre.

La décision concerne précisément 494 établissements d'enseignements primaires des régions de l'Adamaoua, du Centre, du Littoral, de l'Ouest, de l'Est et du Sud qui ont reçu l'ordre de fermer leurs portes faute d'autorisation d'ouverture.

Certains établissements ayant au préalable eu l'autorisation de fonctionner font aussi l'objet de sanction pour non-extension de leurs permis, tandis que d'autres ont été fermés pour avoir construit dans des zones dangereuses et pour avoir des infrastructures inadaptées.

La décision des autorités de l'enseignement primaire laisse les parents, les élèves et les acteurs de l'éducation dans les écoles touchées dans un état d'incertitude, presque de desarroi car l'année scolaire 2023/2024 est proche.

Les cours vont reprendre le 4 septembre sur toute l'etendue du territoire mais bon nombre de personnes se posent des questions sur le sort des élèves déjà inscrits dans les écoles désormais considérées comme des institutions clandestines.

Toutefois, cette décision émanant du ministre de l'Education de base, Laurent Serge Etoundi Ngoa, n'est pas une surprise puisque la fermeture des écoles primaires et secondaires avant chaque année scolaire au Cameroun est courante.

D'ailleurs, 362 écoles primaires et 117 écoles secondaires ont été fermées en 2022 au même motif.

Mais le nombre croissant d'écoles primaires clandestines opérant dans six régions du Cameroun laisse planer le doute quant à l'efficacité des institutions et à la capacité du gouvernement à réglementer correctement le secteur de l'éducation contre les activités clandestines. Contacté par BBC Afrique, le ministère de l'Education de base n'a pas voulu se prononcer sur le sujet.

Un deficit de personnel enseignant

Les élèves et les parents ne sont pas les seuls concernés par ce réamenagement à une semaine de la rentrée. Le ministère des enseignements secondaires du Cameroun a aussi décidé de se séparer définitivement du personnel d'appui sans contrat, connu sous le nom d'enseignants vacataires.

Cette décision signée le 16 juin dernier, s'appuie selon le ministère, sur les instructions du premier ministre chef du gouvernement.

En avril 2023, le chef de l'Etat avait signé un décret fixant les modalités d'exercice de certaines compétences transférées, par l'Etat aux Régions en matière d'enseignement secondaire. Et l'article 7 de ce décret précise que le personnel d'appoint dans les lycées et collèges est constitué des agents chargés de l'exécution des tâches courantes, ne relevant pas de l'enseignement et éventuellement des enseignants vacataires, recrutés sur la base d'un contrat de travail.

Or, au Cameroun, les enseignants vacataires des établissements scolaires publics n'ont pas de contrat de travail mais sont payés par heure de cours dispensé.

De plus, l'article 9 précise que les salaires de ce personnel d'appoint sont pris en charge par la région alors que les conseils régionaux mis sur pied récemment et dont les présidents ont été élus en 2020 ne disposent toujours pas de budget.

Il est donc impossible pour ces derniers de procéder à un quelconque recrutement d'enseignants or le pays connait un déficit de plus de cent mille enseignants titulaires.

D'après l'étude 2022 sur le besoin en personnel enseignant de l'enseignement secondaire général disponible sur le site du ministère, l'on constate des inégalités dans la répartition des enseignants sur le territoire national. Par exemple, 70% des enseignants sont concentrés dans des grandes villes comme Yaoundé, Douala, ou encore Bafoussam.

De maniere detaillee, le pays dispose d'un enseignant pour 60 élèves en théorie pour les établissements scolaires en zone urbaine. Mais dans l'arrière-pays, les effectifs sont encore plus pléthoriques et moins contrôlés avec des salles de classe qui frôlent parfois 70 à 80 élèves voire plus, pour un seul enseignant par matière.

L'étude réalisée par le ministère lui-même déplore aussi un fort déficit d'enseignants dans des disciplines comme le français, l'anglais et les mathématiques entre autres. Selon cette source, l'état devrait recruter au moins 1865 enseignants de français pour combler le gap, 1718 enseignants de mathématiques et 1346 enseignants d'anglais, pour ce qui est de ces trois matières.

Et ces déficits étaient jusque-là comblés par des enseignants vacataires.

Menaces de grève

C'est pourquoi, les syndicats du secteur de l'éducation, préoccupés par cette situation menacent d'aller en grève.

En conference de presse cette semaine, les syndicats des enseignants du secondaire ont exposé les problemes auxquels le secteur de l'éducation est confronté.

''Les revendications sont d'ordre structurel, financier, professionnel, sanitaire et social. Bref, toutes ces revendications portent sur la gouvernance ou la gestion de l'éducation au Cameroun, les reformes et les financements. Et depuis 2008, les syndicats revendiquent un forum national de l'éducation qui serait le cadre approprié pour mettre ces questions sur la table. Le gouvernement a promis de se pencher sur cette proposition et depuis, nous sommes en 2023 et rien n'a été fait'' déplore Roger Kaffo, le secrétaire général du SNAES (Syndicat National Autonome de l'enseignement secondaire), et porte-parole des syndicats des enseignants du Cameroun.

Concernant la situation des vacataires exclus de l'enseignement cette année, Roger Kaffo pose la problématique de la formation et de la spécialisation pour pallier la pénurie de personnel enseignant qualifié. ''Il n'y a pas d'éducation de qualité sans enseignant de qualité. On se serait attendu à ce que l'Etat propose un programme pour sortir du vacatariat en recrutant les vacataires compétents, qui ont les qualifications nécessaires, comme enseignants à part entière et qu'on cesse de parler de vacataires'' .

A travers un préavis envoyé au gouvernement il y a quelques semaines, le mouvement OTS (On a Trop Supporté), dénonce cette décision d'exclure les vacataires du système éducatif et appelle le gouvernement a trouver des réponses aux problèmes soulevés par des enseignants lors de leur dernière grève il y a un an.

Si des solutions ne sont pas apportées d'ici-là, ils menacent de paralyser la rentrée scolaire fixée pour le 4 septembre 2023.

Avec la BBC