Aucune information officielle sur son évolution n’est communiquée. La garde à vue des suspects s’étend indéfiniment. Le peuple s’inquiète, le gouvernement réagit.
Il ne faudra pas s’attendre, de la part du gouvernement, à une « communication gouvernementale plus intense et plus régulière » sur l’enquête mixte police-gendarmerie ouverte à la suite de l’assassinat du journaliste Martinez Zogo. C’est ce qu’il faut retenir d’un communiqué signé hier par le ministre de la Communication, René Emmanuel Sadi.
« Le ministre de la Communication tient à rappeler que depuis la disparition de M. Martinez Zogo cinq interventions publiques par voie de communiqués de presse ont été faites par la présidence de la République et le gouvernement pour condamner ce crime odieux assurant les uns et les autres que les procédures en cours permettront d’établir l’identité et les responsabilités de toute personne impliquée dans cet assassinat (…)», écrit le porte-parole du gouvernement.
Cette sortie arrive alors que les Camerounais dans leur grande majorité demandent à en savoir plus sur l’évolution de l’enquête et surtout s’inquiètent du temps qu’elle prend et des différentes rumeurs contradictoires qui circulent. Ces inquiétudes, d’après le ministre de la Communication, insinuent « comme une volonté délibérée de rétention de l’information » Pour René Emmanuel Sadi, les communications sur les enquêtes en cours sont encadrées par des dispositions de la loi et seuls les officiers de police judiciaire, après visa du procureur de la République peuvent en faire.
Avocats
En effet, depuis l’assassinat du journaliste, aucun élément de l’enquête en dehors d’un communiqué du secrétaire général à la présidence de la République qui annonçait des arrestations n’a été communiqué. Qui a été arrêté ? Qu’elles autres arrestations ont suivi ? Il a fallu pour la presse et l’opinion s’appuyer sur des « fuites » et les réseaux sociaux pour évoquer des noms. Mais à ce jour, si l’on sait qu’au moins une trentaine de personnes ont été interpelées, les autorités, malgré le fait que les rumeurs vont dans tous les sens et que des personnalités haut placées dans l’appareil sécuritaire de l’Etat ont été cités, sont restées muettes.
Le 17 février, les avocats de Jean Marie Amougou Belinga, le Pdg du groupe l’Anecdote, qui a été interpellé le 6 février, ont décidé de briser le silence au cours d’un point de presse donné à l’immeuble Ekang. Lors de la première confrontation le 7 février 2023, il a été demandé à Monsieur Jean Pierre Amougou Belinga s´il maintenait sa première déclaration suivant laquelle il connaissait bien le Lieutenant-colonel Justin Danwe. Il a répondu par l´affirmative en indiquant notamment que ce dernier venait souvent le voir pour le dépannage et lui filait souvent les informations sur les activités sécuritaires frontalières avec la Centrafrique et la Guinée équatoriale », a déclaré Me Charles Tchoungang. D’après Reporters sans frontières notamment, ce sont les aveux du Lieutenant-colonel Danwe qui auraient permis l’interpellation du Pdg du groupe L’Anecdote, présenté comme le commanditaire de l’assassinat du journaliste.
« Les différentes positions du Lieutenant- colonel Justin Danwe caractérisées par des rétractations, des aveux contradictoires et des accusations légères, ne peuvent résister à une analyse sérieuse, car il donne l´impression d´être à tout moment sous influence », a ajouté Me Tchoungang. Ces propos ont aussitôt suscité la réaction de Me Jacques Mbuny, l’avocat du directeur des opérations de la Direction générale de la recherche extérieure (Dgre). «J´ai du respect pour l’ancien bâtonnier, mais des propos ont été prêtés au Lieutenant-colonel, il ne se reconnaît pas dans ces propos et ne les a jamais tenus », a-t-il déclaré.
Suffisant pour semer à nouveau le trouble dans les esprits. Tout comme les deux passages des suspects au tribunal militaire qui se sont soldées par un retour dans les cellules du Sed pour une garde à vue qui se prolonge sans explications. L’enquête est-elle bloquée ? Si oui, pourquoi ? Ces interrogations sont sur toutes les lèvres et il faudra, d’après le porte-parole du gouvernement, se contenter d’attendre.