Tronçons de rues réhabilités, nids de poules replâtrés, commerces détruits…, la communauté urbaine engage des travaux d’urgence pour donner un visage moins hideux à la capitale, à trois jours de l’arrivée du président français.
A trois jours du début de la visite officielle du président français Emmanuel Macron à Yaoundé, les rues qu’il va parcourir font leur mue. Le long de l’itinéraire de la rue de l’aéroport, les nids de poules qui jonchaient la chaussée il y a encore quelques jours ont disparu : ils ont tous été replâtrés dans la nuit de mercredi à jeudi. A la poste centrale, c’est un nouveau décor qui se présente. Des agents commis à l’entretien routier sont à pied d’œuvre pour le bouchage des trous creusés par les eaux de ruissellement.
L’itinéraire allant du carrefour Tongolo au lieu-dit « Montée Noah » est en chantier. Cet axe abandonné sans entretien depuis plusieurs années au grand malheur des automobilistes fait peau neuve. Rien de surprenant, le patron de l’Elysée qui séjournera à Yaoundé pendant trois jours passera par-là pour se rendre au lieu-dit « Village Noah », un espace de rêve développé par son illustre compatriote Yannick Noah.
À un jet de pierre de la gare routière de Tongolo, un bruit fort retentit avec des vibrations souterraines. C’est un Caterpillar qui fait des travaux de terrassement pour remblayer les caniveaux qui ont subi l’effet de l’érosion. Pour les riverains, l’analyse de cette situation reste mitigée.
« Il faut dire que c’est une belle initiative de penser à réhabiliter cette rue. Ces travaux de réfection g routes s’accompagne du curage des caniveaux et du nettoyage des secteurs insalubres. Ceux qui ont l’habitude de passer ici savent bien que nous étions abandonnés sur cet axe, les nids de poule avaient pris des proportions inquiétantes. Cependant, il faut dire que c’est aussi une honte pour nous qui profitons du passage d’un président étranger pour bénéficier des réfections de nos routes. Donc, si Macron ne venait pas chez Noah, cet axe n’allait jamais être réhabilité ? », s’interroge Samuel Donfack, habitant de Tongolo.
Il faut noter que ces travaux de réfection arrivent jusqu’à la « montée Noah », où les populations installées le long de la route ont subi des casses. Boutiques, bars, restaurants et autres lieux d’activités lucratives ont subi les assauts de la pelleteuse de la communauté urbaine. Selon les riverains, c’est un coup dur qui intervient en cette période difficile.
« Moi, par exemple, je suis à 720 000 Fcfa de dépense sur cet espace aménagé il y a seulement quelques jours. Nous avons payé les taxes et les impôts plus les occupations temporaires. Ils devraient en principe nous avertir et donner un temps pour que nous nous préparions à quitter les lieux. Toutes ces opérations se sont déroulées le mercredi 20 juillet 2022. Ils ont signalé en soirée qu’ils vont démolir les maisons qui sont en bordure de route. Nous sommes pour la plupart des parents d’élèves qui avons investi en cette période pour préparer la rentrée de nos enfants. Nous sommes dépassés par cet acte de la communauté urbaine qui dit vouloir arranger les voies avant l’arrivée de Macron », s’indigne une victime.
Pour certains, le mal est profond. Démolir des commerces pour le motif du passage du président français est un mépris à l’égard de la population.
« L’officier qui a conduit les opérations ici nous fait savoir que l’instruction vient d’en haut. Ils cassent parce que le président Macron sera de passage sur cet itinéraire. Nous ne comprenons pas ce motif car si c’est pour aménager la route, ça ne saurait terminer en trois jours. Nous sommes des parents, ce gouvernement veut qu’on aille manger à la poubelle parce qu’un président vient en visite chez nous ? Il y sera pour quelques jours seulement et on détruit ce que les gens ont investi pendant des années ? Qu’est-ce que le président français peut bien apporter à nous qui sommes du bas peuple ? Je pense que le rôle de l’Etat c’est aussi de protéger ses populations », se lâche un propriétaire de tapisserie. Pour l’instant, la visite de Macron plonge les populations situées sur cet axe dans le désarroi.