Les actes de piétinement de son autorité fusent de toutes parts comme s'il avait reçu le brassard de l'équipe gouvernementale du 4 janvier 2019, un peu par accident. Immersion dans un monde d’incongruités ! Qui est le véritable patron du gouvernement camerounais ? Le Secrétaire général à la présidence de la République, ministre d'État, Ferdinand Ngoh Ngoh ou bien Joseph Don Ngute? Les actes de piétinement de son autorité fusent de toutes parts comme s'il avait reçu le brassard de l'équipe gouvernementale du 4 janvier 2019, un peu par accident, pour boire jusqu'à la lie les humiliations qui accompagnent toujours les lustres du pouvoir. Comment vit-il la dernière scène en date où l'envoyé de la présidence de la République, par ailleurs son ministre d'État, parcourt les villes du pays qui vont abriter les poules de la Can, flanqué de son ministre des Sports et de l'éducation physique comme s'il prenait désormais ses ordres ailleurs !
Comment vit-on une telle scène, au moment où les hôpitaux, les stades, les routes, les hôtels et autres infrastructures construites sous la diligence du chef du gouvernement sont visitées officiellement par une tierce personne, comme pour donner une certaine onction, par-dessus tout par une personnalité sous votre autorité, agissant en dehors de son aval? Précisons que l'opération est encore en cours. Il devra regarder à la télévision Ngoh Ngoh et les autres aller de Bafoussam à Douala, de Douala à Limbe et Buéa, de là à Garoua et de Garoua à Yaoundé. C'est de toute façon au cours de ce périple que le Premier ministre de Paul va goûter dans toute sa saveur le côté pernicieux du pouvoir. Et là on le constate, il n'a pas toussé car il sait bien que c'est son boss qui a dépêché ses ministres sur le terrain, sans lui. Et même si cela n'avait pas été le président de la République, qu'aurait-il fait? Quelle marge de manœuvres dispose-t-il pour rappeler à l'ordre tel ou tel de ses collaborateurs qui s'émancipe un peu trop vite de son autorité de capitaine d'équipe ?
Il y a plus d'un an, on se souvient que certainement submergé par le libertinage de ses ministres dans la prise de parole publique, il avait sifflé la fin de la récréation. Avait-il été compris et respecté par ses ministres? On n'en doute si on s'en tient à la dimension de tonnes de communications gouvernementales sensibles qui inondent de nos jours la place publique, même celles portant sur sa personne. Bien plus encore, le 16 janvier dernier à Ebolowa, certainement qu'en regardant son ministre de l'Enseignement supérieur à la télévision, Jacques Fame Ndongo, réunir autour de lui une bonne brochette de ministres originaires du Sud et d'ailleurs, il a dû ravaler sa colère d'humiliation même si par extraordinaire il aurait été informé de ces assises du Sud. Sur le coup, le patron du Rdpc dans la région natale du président de la République s'est comporté comme un véritable Premier ministre, convoquant ou invitant, c'est selon, les uns et les autres de ses collègues à donner des explications à une population particulièrement remontée contre lui ou les élites à cause du sous-développement tous azimuts.
Une concurrence institutionnelle et anglophone
C'est connu de tous. Les deux principaux pôles du gouvernement sont d'une part le Secrétaire général de la présidence de la République et celui des Services du Premier ministre. En réalité, c'est ce dernier qui reçoit les Hautes instructions du chef de l'État avant de les dispatcher aux ministères concernés. C'est un mécanisme classique qui peut être outrepassé. On a vu des lettres du Secrétariat de la présidence directement adressées aux ministres. Et Joseph Dion Ngute dans tout cela? L'affaire du cabinet Atou impliqué dans la gestion des résiduels des actifs de Camrail, de l'Oncpb et autres, a livré toute la précarité du poste du chef du gouvernement au Cameroun.
Est-il le Premier ministre ou le Premier des ministres? Cette problématique semble subsidiaire mais conserve toute sa pertinence. Quelques faits récents, encore des faits, viennent agrémenter cette litanie en défaveur de Joseph Dion Ngute. C'est le ministre de l'Administration territoriale qui lui avait infligé la première humiliation lors du lancement du Grand dialogue. Il avait été violemment contredit par le très présent Paul Atanga Nji, dont tous évitent de marcher sur ses plates-bandes.
Toujours comme si c'était sa communauté anglophone d'origine qui lui donnait tous les tourments du monde, lors de sa récente visite dans le Nord-Ouest, les coups de feu qui l'ont accueilli pouvaient symboliquement signifier la volonté ambiante de certains acteurs dans la zone de lui contester toute forme de leadership légitime comme si Paul Biya avait fait une erreur de casting en jetant son dévolu sur lui le 4 janvier 2019.
Et c'est précisément là où les choses deviennent intéressantes. Joseph Dion Ngute, un Premier ministre brocardé de toutes parts rappelle un certain Paul Biya, Premier ministre de 1975 à 1982 du régime Ahmadou Ahidjo ! Il avait avalé toutes les couleuvres sans broncher, il avait supporté les humiliations les plus indicibles, mais cela n'enleva rien d'un iota sur son sinueux chemin vers la quête du pouvoir d'État. A vous qui le flinguez de gauche à droite, prenez de la graine. Le silence de Dion Ngute peut faire son humiliation tout comme celui de ses adversaires face à son silence. C'est toujours Paul Biya qui distribue les cartes du pouvoir. Acte!