Actualités of Monday, 30 May 2016

Source: camer.be

Ce que risque le Cameroun l'affaire Mebara

Photo d'archives utilisée à titre d'illustration Photo d'archives utilisée à titre d'illustration

Après la décision de la CADHP condamnant le Cameroun dans le cadre de l’affaire JM Mebara Atangana, le sérail semble désormais jouer sa carte. Cependant, la société civile prévient des multiples pressions.

Plus de 20 jours après la publication de la condamnation du Cameroun par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Cadhp) dans le cadre d l’affaire Jean-Marie Atangana Mebara, le gouvernement est muet comme une carpe. Même le ministre camerounais de la communication cité dans le rapport et habitué des "défenses" lorsque le Cameroun est attaqué sur la scène internationale, semble n’avoir pas encore dit son dernier mot au regard de quelques indices. Toujours est-il que le Ministre de la communication attend toujours la réaction de ses collègues de Justice et des Relations extérieures pour rendre publique la position du Cameroun sur le sujet.

Pour autant, le gouvernement prépare sa riposte selon des indiscrétions. Si rien ne filtre encore sur la suite à donner sachant que le Cameroun dispose selon les textes de la Cadhp de 180 jours soit 6 mois pour faire appliquer ladite décision, quelques hypothèses sont d’ores et déjà tracées par la société civile camerounaise, notamment celle qui défend les droits humains. "Si le Cameroun ne se conforme pas à la décision de la Cadhp, il sera vu comme un pays qui n’honore pas ses engagements. Comme vous le savez, les rapports avec  et entre les Etats sont d’abord des rapports diplomatiques. Contrairement à la Cour qui est dotée d’un pouvoir de coercition et dont les décisions sont contraignantes, les décisions de la Cadhp n’ont pas la même force si on les mettait sur une balance" précise Cyrile Rolande Bechon, président de Nouveaux Droits de l’homme, section du Cameroun (Ndh-Cameroun).

Par ailleurs,"il est important de souligner que le protocole sur la mise en place de la cour Africaine des Droits de l’Homme indique en son article 2, la corrélation entre cette dernière et la Cadhp. Ce qui suppose des voies de pression multiples qui peuvent être mise en commun" pour faire plier le Cameroun ajoute pour sa part Philippe Nanga, coordonnateur national de l’Ong Un monde Avenir. "En tout état de cause" poursuit-il, "Yaoundé est désormais dos au mur, et l’opération épervier fortement discréditée".

De toute évidence, quelqu’en soit l’option prise par Yaoundé, c’est "un coup très dur contre le système politico-judiciaire camerounais" postule Alex Gustave Azebaze juriste et membre honoraire du Réseaux des défenseurs des droits de l’homme en Afrique centrale (Redhac). Plus est, "son inapplication va simplement renforcer auprès des bailleurs de fonds et partenaires du régime camerounais, la perception d’un Etat permanent de non droit" poursuit-il. Dans cette logique, Alex estime que "le règne de l’Etat de droit est un critère d’appréciation de la qualité de la gouvernance publique et politique d’un pays".

Il convient de rappeler que le Cameroun a été condamné par la Cadhp pour violation des droits de Jean-Marie Atangana Mebara durant la procédure judiciaire dont il fait l’objet depuis son arrestation en 2008. Cette décision qui selon Alex Gustave porte un grave préjudice à l’économie du Cameroun, est intervenue à la veille de la plus grande rencontre d’investissement de Yaoundé qui s’est achevé sous fond de promesse. Même si l’ensemble des participants qui ont fait le déplacement ont mis un point d’honneur sur l’"Etat de droit" que devrait être le Cameroun.

En attendant la réaction officielle du Cameroun, plusieurs acteurs politiques et de la société civile y voient un acheminement vers un dénouement à la Titus Edzoa et Michel Thierry Atangana libérés de prison après environ deux décennies de détention, grâce aux nombreux groupes de pression. Pour ne pas crédibiliser cette thèse, Yaoundé a toujours brandi la "grâce présidentielle" qui n’a attendu que près de 17 ans pour qu’ils en soient les bénéficiaires.