A Garoua, parler de l'affaire de la torture à mort du neveu du Lamido peut vous couter très cher. Cette affaire de torture à mort qui a éclaboussée le Lamido de Garoua fin janvier, plane encore sur la ville. Selon le magazine français Jeune Afrique, le Lamido a instauré un climat de terreur dans la ville, de telle sorte que plus personne n'ose parler de l'affaire en publique.
"Cela fait presqu’un an qu’Ibrahim El Rachidine est monté sur le trône du lamidat de Garoua. Mais le début de son règne a été ébranlé par une affaire de meurtre qui secoue la chefferie traditionnelle la plus stratégique du septentrion camerounais…À Garoua, évoquer publiquement les déboires judiciaires du lamido est tabou. Avant de s’y aventurer, votre interlocuteur regardera discrètement à gauche, puis à droite, pour ne finalement lâcher que quelques phrases sibyllines. Dans cette la grande ville du septentrion camerounais, les nouvelles vont à la vitesse de l’harmattan et chacun craint de se retrouver dans le viseur du nouvel homme fort de la cité. Ses mésaventures constituent pourtant le feuilleton de l’après-CAN et meublent subtilement les échanges autour d’un chaï, au coucher du soleil", écrit le magazine dans un article publié il y le lundi 18 avril dernier sur son site internet.
Testicules brouillés, côtes cassées, comment le neveu du Lamido a été torturé
L'homme gentils qui multiplie les actions ces derniers jours, est le même qui a fait torturé son neveu jusqu'à ce que mort s'en suive en février à Garoua.
Le journal Le Jour dans sa parution de ce mercredi 09 février 2021 révèle comment le jeune Aliou a été torturé dans la cour de son oncle le lamido de Garoua Ibrahim El Rachidine jusqu’à la mort. Contrairement au communiqué diffusé par les services du lamido faisant état d’une mort par arrêt cardiaque, les révélations du journal, font état de tortures avec des pratiques surréalistes.
La directrice de l’hôpital régionale de Garoua signataire du certificat médical d’Ali Youssouf mentionnant qu’il est mort d’un arrêt cardiaque a été entendue trois fois par le pool des enquêteurs de la gendarmerie. Une source proche de l’hôpital régional de Garoua a confié sous anonymat que l’autopsie faite par un groupe de médecins légistes révèle que l’adolescent est mort de suites de torture. Il avait sept côtes cassées, les testicules brouillés et la colonne vertébrale éclatée. Dans un communiqué non signé, le lamidat de Garoua expliquait alors que le neveu du Lamido Ibrahim El Rachidine est mort d’un arrêt cardiaque. Et que c’était sous l’emprise psychotique qu’il voulait attenter à la vie de sa maman.
Après l’audition de la mère du jeune Ali Youssouf et trois membres de la Faadah et deux militaires, les enquêteurs ont déféré les mis en cause au Tribunal militaire. Il ressort des enquêtes préliminaires et des déclarations des mises en cause que tous exécutaient les instructions du lamido de Garoua.
La sœur ainée du lamido de Garoua, mère d’Ali Youssouf est accusée de complicité de meurtre et de traitements dégradants. « La mère de cet adolescent est poursuivie pour avoir commandité le meurtre de son fils. Elle est en garde à vue depuis le mercredi dernier. L’affaire a été transmise au tribunal militaire de Garoua parce que nous avons déjà entendu tous les mises en cause », a confié sous anonymat une source proche de l’enquête.
Dans la ville de Garoua, des tracts demandant la destitution du lamido de Garoua circulent. Selon les auteurs de ces tracts, sa majesté Ibrahim El Rachidine, le lamido de Garoua aurait déshonoré le lamidat. « Le lamido Ibrahim El Rachidine humilie le lamidat de Garoua ainsi que les princes et princesses de Garoua par le non-respect des traditions. En bastonnant à mort votre neveu Ali Youssouf, unique fils de votre grande sœur nous constatons que vous êtes inhumain », peut-ton lire sur le document abondamment publié sur les réseaux sociaux et distribué dans la ville de Garoua. Les auteurs du tract achèvent leur pétition en ces termes : « vous n’êtes pas le gardien de nos traditions ».
En rappel, c’est le 1er février 2022 qu’un message porté du gouverneur de la région du Nord adressé au préfet de la Bénoué et au procureur général près la cour d’appel du Nord ainsi qu’au délégué régional de la santé du nord prescrivait l’ouverture d’une enquête sur la mort d’un adolescent au Lamidat de Garoua. Une mort suspecte, qui, selon Jean Abate Edi’i, le gouverneur, aurait été dissimulée. Le lendemain 2 février, le préfet de la Bénoué décide par arrêté, de l’exhumation du corps du jeune Ali Youssouf, 18 ans.
Selon les témoins, les sévices corporels sont visibles sur la dépouille de l’adolescent. Le lamido est alors accusé de complicité de meurtre avec les éléments de sa cour. Il a été retenu depuis plus de 36 heures à la compagnie de gendarmerie, officiellement pour sa sécurité. Le lamidat a été scellé le vendredi 4 février 2022 et le lamido est sommé de ne pas quitter la ville de Garoua. Il a été alors mis sous surveillance dans sa résidence privée au quartier Haut-Plateau, jusqu’au transfert du dossier au Tribunal militaire.