La grève des enseignants en cours soulève un pan de voile sur le ressentiment des citoyens piégés par des dysfonctionnements et pesanteurs multiformes.
Le premier indice qui expose le malais ambiant dans le pays, est le soutien massif accordé aux enseignants par la cité et surtout par les parents d’élèves qui devraient être logiquement les premiers à se plaindre du débrayage rendu à sa cinquième semaine.
On se souvient que par le passé, les Camerounais ont dans l’ensemble été contre le corps social qui entrait en grève et leur causait des souffrances. Il en a été ainsi par exemple des transporteurs urbains, où la population s’est souvent dressée directement contre eux sans chercher à comprendre le bien- fondé de leur débrayage.
Cette fois, les choses vont autrement car la société a pris fait et cause pour les grévistes, demandant au gouvernement de satisfaire entièrement leurs revendications. Comme pour verser de l’huile sur le feu, les élèves eux- mêmes, les premières victimes de l’arrêt des cours, au lieu de se plaindre de leurs enseignants emportés par le mouvement « craie morte », sont plutôt les adjuvants de ceux qui les sevrant du savoir.
Le gouvernement en tire-t-il les enseignements suffisants ? On voit de plus en plus des élèves manifester dans la rue pour que leurs enseignants soient payés. Paul Atanga Nji, le patron de l’Administration, a compris très vite la dimension du danger et a demandé aux autorités administratives de sensibiliser les parents d’élèves pour ne pas dire les habitants, sur les mesures idoines du chef de l’Etat pour répondre aux revendications des grévistes.
Le deuxième signal est la menace de l’effet domino. « On a trop supporté (Ots) », en mettant à mal le gouvernement, en lui tenant tête pendant plus d’un mois sans céder, a créé un gros trou d’air dans lequel beaucoup de corps sociaux frustrés s’engouffrant. Les enseignants de l’éducation de base ont réussi, ceux du supérieur s’activent ; on a vu « Ots santé » circuler sur la toile. On se demande si la chose traîne davantage, dans quel état sera demain la société dans sa globalité.
A côté des frustrations liées aux traitements salariaux indécents du personnel de l’Etat, viennent se greffer les services publics défaillants dans l’approvisionnement en eau et en électricité, deux secteurs névralgiques de la société. Comme on le voit, les domaines sensibles qui suscitent l’intérêt du grand nombre des Camerounais ou sont susceptibles de soulever au plus vite des remous sociaux, sont ceux qui ces derniers temps frustrant les attentes partout dans le pays. Tout se passe exactement comme s’il y avait une main intelligence à l’œuvre pour jouer avec les nerfs de la population, pour la tester et voir de quoi elle est capable. Si c’est un jeu, il s’agit là de la roulotte russe, mortel.
Les contingences internationales La guerre en cours en Ukraine, vient mettre un terme aux exportations de blé en provenance de l’Ukraine et même de la Russie frappée par les lourdes sanctions économiques occidentales. Cette guerre emporte la flambée des produits à base de blé comme le pain. Il est déjà noté une augmentation de 25 à 50 Fcfa en fonction du grammage. Cela signifie que les familles seront encore touchées au niveau du porte-monnaie.
L’autre pan de la flambée des prix née dans le sillage de cette guerre, est l’augmentation inévitable des produits pétroliers et gaziers. La Russie qui est le princpal fournisseur des hydrocarbures en Europe, en fermant les vannes, renchérit sérieusement les prix des produits importés et même de la production locale. Il est à se demander si le gouvernement ne va pas æ trouver obligé d’augmenter le prix du carburant à la pompe.
A l’allure où va la crise mondiale, il y a lieu de penser que cela est presque inévitable. La conséquence inéluctable est que dans les jours à venir, le panier de la ménagère sera de plus en plus vide. Si le Cameroun veut minimiser le coup, il est temps de s’investir en cette saison de semailles, à une assistance aux producteurs pour maximiser les récoltes. C’est une voie à l’heure où tous les pronostics sont des plus pessimistes pour les pays africains, avec des soulèvements populaires comme ceux de février 2008.