Actualités of Wednesday, 8 February 2017

Source: camer.be

Comprendre le phénomène des prises d'otages

Des ex-otages de Boko Haram Des ex-otages de Boko Haram

Il y a des faits alarmants qui proviennent du Cameroun profond depuis maintenant deux ans. Les Camerounais installés dans les départements de la Vina et du Mberé dans l’Adamaoua et du Mayo Rey dans le Nord vivent dans un stress quasi permanent. Plus grave, certains ont été tués, d’autres ont abandonné leur village. D’autres encore ont perdu tout ce qu’ils ont comme richesse et errent avec femmes et enfants en ville. Certes, l’on est loin du front contre Boko Haram, mais ces Camerounais sont aussi terrorisés que leurs concitoyens de Fotokol, Kolofata etc. Il s’agit en fait du curieux et persistant phénomène de prise d’otage avec demande de rançon.

Le modus operandi est bien connu. Des hommes armés de fusils arrivent nuitamment dans les bergeries et procèdent à l’enlèvement des éleveurs our leurs familles proches. Des heures plus tard, ils téléphonent pour exiger des rançons avant toute libération. Des rançons qui vont jusqu’à des dizaines des millions. En général, les familles payent. Ceux qui refusent voient leurs proches tués.

Complicité internes

Il y a un an, les propriétaires des bétails ont déserté leurs bergeries. Ils font confiance uniquement aux bergers qui n’étaient pas directement menacés par les preneurs d’otages. Ceux qui habitent dans les zones à risque ont déserté. Certains ont acheté à la hâte des maisons à Ngaoundéré, d’autres louent. Des villages se sont vidés. La population de Ngaoundéré explose. La vie dans le monde rural devient un enfer sur terre. Seuls les téméraires tentent de résister.

Mais la donne vient de changer depuis quelques semaines. Les preneurs d’otages, visiblement bien organisés, viennent de changer de stratégie. Désormais, ils ont pour cible les bouviers. Ils s’en prennent à eux. Les tabassent correctement et menacent de les tuer. Pour ces bandits, c’est grâce à ces bouviers audacieux que les riches continuent de considérer leurs boeufs comme étant leurs propriétaires. Dans l’arrondissement de Nyambaka par exemple, les bergeries sont abandonnées par leurs occupants.

Et la conséquence directe, c’est que les boeufs vont finir par devenir des bêtes sauvages. « Des bouviers sont venus à Nyambaka avec des traces des tortures et ont juré ne plus jamais rentrer en brousse. C’est fini, personne ne peut plus avoir des boeufs. Et c’est l’économie de toute une région qui est détruite », se plaint ce fils d’éleveur. Des informations puisées à bonnes sources indiquent que ces bandits viennent de la Centrafrique. Ils auraient un itinéraire bien connu. Ils organisent des campagnes périodiques dans le Mberé, la Vina sous la coordination d’un de leur chef qui seraient Centrafricain et qui connaitrait bien cette brousse. Mais des questions fusent.

L’Etat a-t-il pris la mesure de cette situation qui menace non pas seulement la vie des Camerounais, mais aussi leurs avoirs, bref leur civilisation structurée au tour du bétail ? Ces bandits bénéficieraient-ils des complicités internes ? Comment parviennent-ils à utiliser des téléphones sans se faire repérer ? Des questions pour l’instant sans réponse.