C’est la bataille de sa survie professionnelle que mène actuellement Clément Atangana, président du Conseil constitutionnel depuis deux semaines. Le chef de la juridiction judiciaire suprême du Cameroun est fléché par l’opposition, d’avoir violé le serment qu’il a prêté en tant que membre du Conseil constitutionnel, de demeurer neutre, le temps de son appartenance à cette juridiction dont la neutralité politique est inviolable. Or une Assemblée générale de l’Association pour le développement économique et social et culturel du Nyong-et-So’o (Adenso) s’est tenue le 28 octobre dernier à Mbalmayo, à laquelle a pris part Clément Atangana, et au terme de laquelle une « motion de soutien, de fidélité et d’engagement au président de la République ».
L’invitant à se représenter à la présidentielle de 2025. Or Selon l’article 5 de la loi N°2004/005 du 21 avril 2005 fixant le statut des membres du Conseil constitutionnel, « les membres du Conseil constitutionnel doivent s’abstenir de tout ce qui pourrait compromettre l’indépendance et la dignité de leurs fonctions. Ils s’interdisent en particulier pendant la durée de leurs fonctions, de prendre une position publique ou de consulter sur des questions ayant fait ou étant susceptibles de faire l’objet de décisions du Conseil constitutionnel… de façon générale, de faire apparaitre de quelque manière que ce soit leur appartenance politique ou syndicale ».
Si Clément Atangana ne s’est pas affiché lors des travaux de l’Adenso dont il est membre (et ancien président) en tant que militant du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), parti au pouvoir, il reste que lors de l’Assemblée générale de cette instance apolitique) qui œuvre pour le développement sociocommunautaire du département du Nyong-et-So’o et dont le président du Conseil constitutionnel revendique la qualité de membre, l’invitation adressée à ce fils du Nyong-et-So’o, et qui a fuité sur les réseaux sociaux, mentionne sa qualité de président du Conseil constitutionnel. Et au terme des travaux, les membres de l’instance présidée par Martin Mbarga Nguélé, Délégué général à la sureté nationale, un « appel à candidature » a été lancé à l’endroit de Paul Biya, président de la République et non moins président national du RDPC, parti au pouvoir dont les textes font du président national le « candidat naturel » du parti à l’élection présidentielle.
Du coup, l’opposition au premier rang de laquelle le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) de Maurice Kamto estime que, « un appel de cette nature, pour une association, sort de la neutralité et devient politique ». Et donc que le président du Conseil constitutionnel a « violé le serment de la loi ». Maurice Kamto a aussitôt attaqué ce qu’il appelle « prise de position partisane », en justice, appelant en même temps Clément Atangana à démissionner. En s’appuyant sur l’article publié par Cameroon Tribune du 30 octobre 2024, comme pièce à conviction.
Clément Atangana est aussitôt sorti de sa réserve pour contre-attaquer. Dans une correspondance adressée au quotidien gouvernemental par son conseil Me Paul Elouga Zogo, exploit d’huissier, Clément Atangana indique que « les faits relatés dans cet article sont inexacts ». Précisant que « Monsieur Atangana Clément… a reçu une invitation en tant qu’élite et force vive dudit département, pour assister à une assemblée générale statutaire de l’Adenso dont l’objectif est de promouvoir le développement de sa localité d’origine ». Bien plus, que « l’ordre du jour lui a été communiqué, et à l’ouverture des travaux, cet ordre du jour a été lu et approuvé, et que nulle part, il n’était question d’une motion au président de la République, encore moins à un quelconque parti politique ». Mieux, « que restant fidèle à l’ordre du jour qui lui a été communiqué, Monsieur Clément Atangana s’est retiré en s’excusant à 13h lors de la suspension de séance pour regagner Yaoundé ». Alors, « il ne saurait répondre des points traités après lui en dehors de ce qui était prévu à l’ordre du jour ».
Clément Atangana exige de publier ce droit de réponse en respect de la loi de 1990 sur la communication sociale, faute de quoi « nous serons contraints d’en tirer toutes les conséquences de droit ». C’est une bataille qui s’annonce peut-être longue, en cette veille d’année électorale au Cameroun. Clément Atangana, lui, relativise les faits. L’homme n’a pas encore réagi aux accusations du MRC.