Actualités of Monday, 15 November 2021

Source: www.bbc.com

Contraception masculine : quelles sont les formes sûres et efficaces, et pourquoi certaines ne sont-elles pas largement utilisées (ou même connues) en Afrique ?

Un homme en couple Un homme en couple

Il existe en effet plusieurs options pour les hommes qui souhaitent empêcher une relation de déboucher sur un enfant, et d'autres sont en cours de développement.

Commençons par trois dont vous avez peut-être entendu parler :

Le préservatif masculin

C'est la technique de contraception masculine la plus connue et la plus répandue.

Utilisé correctement, le préservatif peut être efficace à 98 % pour prévenir la grossesse, et c'est d'ailleurs la seule méthode qui protège également contre les IST.

Afin de bien les utiliser, il convient de vérifier la date de péremption et de s'assurer qu'il n'est pas abimé (avec des trous ou des déchirures).

Il faut aussi préférer les préservatifs en latex qui sont réputés plus efficace selon l'OMS (l'Organisation mondiale de la santé) et UNFPA (Le fond des Nations-unies pour la population).

Malgré leur efficacité, les raisons invoquées pour ne pas utiliser de préservatifs peuvent aller du coût ou de la disponibilité à des plaintes d'inconfort ou de perte de sensation.

Le coït interrompu ou retrait

C'est une méthode gratuite mais peu fiable avec 27 % d'échecs, selon l'OMS.

Cette méthode consiste à retirer son pénis du vagin de sa partenaire avant d'éjaculer.

Le NHS, le service public de santé britannique, ne le considère pas comme une méthode de contraception.

En effet, les spermatozoïdes peuvent être libérés avant l'éjaculation et provoquer une grossesse.

Néanmoins, Moussa Diabaté, expert sénégalais en santé de la reproduction, explique que la méthode du retrait, ou coït interrompu, qui dit-il, est avec le préservatif la méthode de contraception la plus populaire du Sénégal, produit de bons résultats.

Mais, pour le chirurgien urologue congolais, Dr Mobile Kampanga, ce n'est pas une méthode de contraception qu'il recommande à ses patients.

''La méthode du coït interrompu n'est pas très efficace pour dire vrai parce que beaucoup d'hommes prétendent le faire, mais en fait ils ne vont pas le faire et certains ne le font pas à temps. Il y a aussi le fait que les couples peuvent avoir un deuxième rapport sexuel et il se trouve que quelques spermatozoïdes sont restés dans l'urètre et peuvent passer dans le vagin'' fait-il valoir.

La vasectomie

Il s'agit d'une opération mineure qui consiste à couper et bloquer les canaux déférents qui transportent les spermatozoïdes à partir des testicules.

Elle est généralement effectuée sous anesthésie locale, c'est-à-dire que vous êtes éveillé mais ne ressentez aucune douleur, et dure environ 15 minutes.

Une vasectomie est efficace à plus de 99 % selon le site du NHS, le service public de santé britannique.

Elle est considérée comme une stérilisation permanente, bien qu'elle puisse être réversible dans certains cas.

Notons que ce n'est pas une méthode populaire sur le continent.

Dr Kampanga affirme que la demande de vasectomies est ''quasi-inexistante'' en RD Congo. En 27 ans de pratique, le chirurgien urologue dit qu'il n'a fait que 10 vasectomies.

''Très peu d'hommes recourent à la vasectomie'', raconte-il a BBC Afrique. ''Certains invoquent des motifs religieux. Ils ne veulent pas se mutiler. Alors souvent ils obligent les femmes à prendre la contraception et ils peuvent échapper à la vasectomie''.

Alors, que disent les hommes ?

Nous avons posé la question de la contraception aux hommes dans plusieurs capitales africaines - Cotonou, Kinshasa et Dakar. Voici ce que trois d'entre eux nous ont dit sous couvert d'anonymat :

  • ''Je n'utilise aucun moyen de contraception d'un commun accord avec ma femme, elle ne s'intéresse même pas à cela. … Je sais me contrôler, savoir quand il faut éjaculer et quand il ne faut pas éjaculer. J'ai beaucoup d'enfants, je ne peux même pas les compter mais j'ai déjà fait mon choix, ce n'est pas maintenant que je vais changer d'avis. Si l'enfant vient, c'est Dieu qui donne''.
  • ''Depuis que je suis marié je n'utilise plus de préservatif. Ma femme sait compter ses jours favorables et défavorables. Quand on sait qu'il y a un risque de grossesse on s'abstient même si j'ai déjà entendu des assistantes sociales dire qu'on peut utiliser cette méthode et tomber enceinte''.
  • ''Vasectomie, vasectomie ! Le mot même me répugne déjà ! Ça n'a pas de sens. … J'ai un enfant déjà qui a juste un an, donc j'utilise des préservatifs pour éviter que ma femme tombe enceinte parce que je ne fais pas confiance aux autres méthodes''.

Quels sont les usages sur le continent ?

De façon générale, l'usage de contraception masculine est faible dans notre sous-région.

Par exemple, une étude récente menée à l'hôpital régional de Fatick au Sénégal a révélé que 2,4% des couples utilisent une méthode contraceptive masculine. Dans ce pourcentage, 5,1% pratiquent le coït interrompu, 2% l'abstinence, 7,6% utilisent le préservatif.

La contraception peut souvent incomber à la femme, que ce soit par le suivi de son cycle via le planning familial naturel, la prise de la pilule ou d'injections, ou l'insertion d'un dispositif intra-utérin.

Pour le docteur Medina Ndoye, chirurgienne urologue à l'hôpital de Grand-Yoff à Dakar, ''l'explication peut être culturelle, cultuelle, mais aussi surtout liée à la prééminence de la contraception féminine … même si cette dernière est souvent téléguidée, autorisée ou stoppée au gré de l'époux''.

Bolozi Kalombo, résident à Kinshasa, nous raconte qu'il a interdit à sa femme d'utiliser les contraceptifs ''parce que j'aime que la femme soit naturelle et parce leur corps à tendance à changer lorsqu'elles utilisent des contraceptifs. C'est pourquoi ni moi-même ni ma femme n'utilisons aucune méthode de contraception parce que je suis aussi chrétien. Et ça va à l'encontre de ce que la Bible nous enseigne.''

Comme le fait remarquer le Docteur Ndeye Khady Babou, experte en santé publique internationale, la responsabilité du contrôle des naissances a longtemps été, et reste, dévolue à la femme. Les recherches se sont de fait essentiellement concentrées sur son corps.

Dr Babou pense qu'une démocratisation de l'usage des contraceptions masculine doit passer par un changement dans la façon dont les sociétés appréhendent la santé de la reproduction.

Il faut, dit-elle, que les gens se demandent pourquoi les femmes portent la charge de la contraception dans le couple.

''Si les gens commencent à se poser cette question, et que les activistes et la société civile s'en emparent, cela peut inciter les autorités à réorienter les politiques en matière de santé de la reproduction''.

Dr Babou rappelle aussi que les méthodes contraceptives que les femmes utilisent ont dans de nombreux cas eu des effets secondaires ayant causé des maladies graves ''et aux Etats-Unis et en France des laboratoires pharmaceutiques ont essuyé des procès.''

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Qu'en pensent les religieux ?

Abbé Alfred Wally Sarr, professeur de théologie morale et chargée de la Fondation paroissiale de Kounoune au Sénégal, explique que l'église catholique promeut la contraception naturelle telle que l'observation de la température, l'allaitement maternelle, ou encore l'abstinence du couple lorsque les époux s'entendent dessus.

L'église, avance-t-il, est contre ''la contraception artificielle, et totalement opposée à la vasectomie''.

''Pourquoi un homme opterait pour la contraception ? Le, don de la vie est une dimension essentielle du mariage. L'église encourage la vie et encourage la procréation'', conclut Abbé Alfred.

L'imam Ahmadou Makhtar Kanté indique qu'en islam, les jurisconsultes admettent que la contraception dans le couple est autorisée lorsqu'il s'agit d'une décision adoptée par les deux époux.

Mais lorsqu'il s'agit de la vasectomie, les jurisconsultes affirment que c'est interdit par la religion musulmane.

''Personne n'a le droit d'arrêter le fonctionnement naturel d'un organe. Il faut privilégier d'autres moyens de contraceptions licites pour arriver à des résultats licites'', lance l'imam. Il ajoute qu'un musulman ne peut subir la procédure que pour des raisons médicales.

La recherche sur la contraception masculine se poursuit

Beaucoup d'autres méthodes sont à l'étude ou sont déjà utilisées dans certaines régions du monde.

La pilule masculine ou contraception hormonale masculine (CHM)

Les scientifiques l'étudient depuis un demi-siècle, mais à ce jour il n'en existe pas sur le marché.

Des chercheurs ont testé la diméthandrolone undécanoate (DMAU) chez une centaine d'hommes et les résultats sont prometteurs selon le professeur de médecine à l'Université de Washington, Stephanie Page, l'un des auteurs d'une étude publiée sur le site de l'Endocrine Society.

Il existe toutefois un moyen de contraception masculine hormonale pour les hommes de moins de 45 ans. Il s'agit d'injections hebdomadaires intramusculaires de testostérone que l'OMS recommande de ne pas faire plus de 18 mois d'affilés.

L'efficacité contraceptive de la CMH par injections intramusculaires hebdomadaires de 200mg d'énanthate de testostérone a été démontrée dans 2 études de l'OMS en 1990 et 1996.

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Celle de la CMH utilisant l'undécanoate de testostérone (forme à libération prolongée injectée une fois par trimestre) a été démontrée dans 2 études chinoises en 2003 et 2009.

Le docteur congolais Mobile Kampanga nous précise que beaucoup de médecins ne la recommande pas à cause des effets secondaires qui sont notamment des perturbations hormonales et métaboliques fâcheuses pour les patients.

La contraception masculine thermique (CMT)

Elle consiste à inactiver les spermatozoïdes par la chaleur grâce au port d'un slip ou d'un anneau pénien chauffant durant minimum 15 h par jour pendant au moins 3 mois.

La CMT a démontré son efficacité sur au total 51 couples et 536 cycles d'exposition : une seule grossesse a été observée, consécutive à une mauvaise utilisation de la méthode, selon l'Association Française d'Urologie.

L'injection de gel spermicide

L'ONG américaine Parsemus Foundation étudie depuis plusieurs années l'injection d'un gel spermicide, dans les testicules pour bloquer le passage des spermatozoïdes. La méthode est réversible, car le gel peut être dissout au moyen d'une autre injection.

Selon l'Association Française d'Urologie, à ce jour, seuls des essais précliniques sur le lapin et sur le singe ont montré son efficacité mais sa réversibilité n'est pas encore complètement démontrée.

Le spray nasal

Des chercheurs britanniques travaillent depuis 2016 sur un spray nasal qui est censé à terme rendre les spermatozoïdes inefficaces.

C'est l'œuvre de deux scientifiques de l'Université de Wolverhampton, le professeur John Howl et le docteur Sarah Jones.

Ils ont fait équipe avec l'université d'Aveiro, au Portugal, dans le cadre d'un projet triennal doté d'un budget de 194 000 euros, afin d'étudier l'impact des peptides pénétrant dans les cellules, et en particulier la manière dont ils peuvent contrôler la fonction des spermatozoïdes.