L'ambassadeur du Kenya au Conseil de sécurité de l'ONU, comme beaucoup de leaders africains, condamne la décision de la Russie d'envoyer des troupes dans les régions séparatistes ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk, et de les reconnaître comme des États indépendants.
"L'intégrité territoriale et la souveraineté de l'Ukraine sont violées. La charte des Nations unies continue de flétrir sous l'assaut incessant des puissants", affirme Martin Kimani dans un discours prononcé à l'ONU lundi soir.
"Nous comprenons que les personnes séparées puissent regarder avec nostalgie au-delà des frontières dans l'espoir d'une réintégration, mais le Kenya refuse qu'une telle aspiration soit poursuivie par la force", ajoute-t-il.
Sa déclaration, qui est majoritairement saluée sur Twitter, établit des comparaisons entre l'expérience africaine du colonialisme et la crise russo-ukrainienne.
"Cette situation fait écho à notre histoire. Le Kenya et presque tous les pays africains sont nés de la fin d'un empire. Nos frontières n'ont pas été dessinées par nous-mêmes. Elles ont été tracées dans les lointaines métropoles coloniales de Londres, Paris et Lisbonne, sans aucun égard pour les anciennes nations qu'elles ont séparées", dit-il.
"Au moment de l'indépendance, si nous avions choisi de poursuivre des États sur la base de l'homogénéité ethnique, raciale ou religieuse, nous serions encore en train de mener des guerres sanglantes ces nombreuses décennies plus tard", ajoute-t-il.
"Au lieu de cela, nous avons convenu que nous nous contenterions des frontières dont nous avons hérité, mais que nous poursuivrions l'intégration politique, économique et juridique du continent", poursuit-il.
"Plutôt que de former des nations qui regardent toujours en arrière dans l'histoire avec une dangereuse nostalgie, nous avons choisi de regarder vers l'avant, vers une grandeur qu'aucune de nos nombreuses nations et aucun de nos nombreux peuples n'avait jamais connue", explique l'ambassadeur.
"Nous avons choisi de suivre les règles de l'Organisation de l'unité africaine et la charte des Nations unies, non pas parce que nos frontières nous satisfaisaient, mais parce que nous voulions quelque chose de plus grand, forgé dans la paix", précise-t-il.
Les commentaires de M. Kimani marquent un changement marqué par rapport à la position précédente du Kenya au Conseil de sécurité des Nations unies, où il s'abstenait de voter.
Le Gabon et le Ghana, qui sont également des membres non permanents de l'organe, condamnent également les actions de la Russie contre l'Ukraine.
Certains craignent que le coût de la vie n'augmente en raison de la crise.
Le journal Business Daily du Kenya a publié mardi un titre en première page "Comment le conflit Russie-Ukraine va nuire aux foyers kenyans".
"Les perturbations résultant d'une action militaire ou de sanctions pourraient également entraîner une hausse des prix du pain et de la farine de blé au Kenya, qui dépend des importations de blé en provenance d'Ukraine et de Russie", indique le reportage.
Un article du site d'information sud-africain Daily Maverick prévient qu'une guerre en Europe de l'Est "aura bientôt des répercussions et sera ressentie dans chaque village et ville d'Afrique du Sud et du monde".
Le Mali, dont l'alliance croissante avec la Russie a aggravé les tensions diplomatiques avec ses partenaires occidentaux, n'a pas encore commenté officiellement l'imminence du conflit.