Actualités of Monday, 27 February 2017

Source: camer.be

Crise anglophone: révélations fracassantes sur les accords de Foumban

West Cameroon, The Muna Goverment West Cameroon, The Muna Goverment

Le 1er janvier 1960, le Cameroun est indépendant et change de dénomination. Le 9 mai de la même année, le pays devient la République du Cameroun. Ahmadou Ahidjo, élu à l’unanimité premier président de la République, instruit Charles Assale de former le premier gouvernement du Cameroun indépendant.


Le Cameroun intègre l’Onu - l’Organisation des nations unies, le 20 septembre 1960. Le pays, sous tutelle britannique, se divise en deux : le Cameroun septentrional - Northern Cameroon, et le Cameroun méridional- Southern Cameroon.

Le Northern Cameroon s’étend sur près de 44 000 km² et compte environ 687 100 habitants. Rattaché à la province du Nord du Nigeria, il a été administré comme partie intégrante de la fédération nigériane. La majorité des populations n’étant pas d’accord, l’Onu a demandé un plébiscite, le 7 novembre 1959. La majorité s’est prononcée contre le rattachement.


Le Southern Cameroon mesure 42 000 km² pour 753 000 habitants. Son économie, grâce à un sol fertile, repose sur l’agriculture. Sur le plan politique, le pays est d’abord rattaché à la province méridionale du Nigeria, puis à la province orientale. Par la suite, il est divisé en 2 régions avec pour chefs-lieux Bamenda au Nord et Buea au Sud.


Selon le vœu de l’Onu pour savoir si cette partie du pays désire faire partie du Nigeria ou pas, un premier plébiscite a lieu le 7 novembre 1959 au Cameroun. La majorité se prononce négativement. Un autre plébiscite, intéressant les deux parties du Cameroun, a lieu le 11 février 1961. Le Cameroun septentrional se prononce pour le rattachement au Nigéria.


Le 1er Juin 1961, la partie septentrionale du Cameroun est rattachée au Nigeria, et ce jour est considéré comme deuil national. Le Cameroun méridional se prononce pour la réunification avec la république du
Cameroun.


Le 9 juillet 1961, une conférence réunit à Foumban, les délégués des 2 parties du pays pour jeter les bases constitutionnelles de la future fédération. La célébration est fixée, le 1er octobre 1961. La République fédérale du Cameroun réunit à nouveau les 2 parties du pays, séparées depuis plus de 40 ans. De cette réunification nait la République fédérale du Cameroun. Le siège du gouvernement fédéral et l’Assemblée nationale sont à Yaoundé.


République fédérale du Cameroun


Elle est née, le 1er octobre 1961, à la suite du référendum réunifiant les anciens Cameroun oriental et occidental, avec pour président El Hadj Ahmadou Ahidjo, et pour vice John Ngu Foncha. Le « Oui » ayant remporté la majorité à ce référendum sur l’acceptation – Oui, ou le refus – Non, pour un rattachement au Nigéria, tout était fin prêt pour un « mariage » avec le Cameroun occidental pour deux raisons.

Premièrement, le Southern Cameroon est géographiquement trop petit pour former un Etat.

Deuxièmement, le référendum du 11 février 1961 avait vu la victoire du « Oui » pour une réunification avec le Cameroun occidental. Il ne restait plus qu’à organiser une sorte de « Conférence nationale » ou encore «Table ronde» comme on l’appelait à l’époque, pour rassembler les deux pays. L’opinion sera donc surprise qu’à la place de cette Table ronde, on organisa plutôt une conférence dite constitutionnelle à Foumban du 17 au 21 juillet 1961. Cette Conférence est aujourd’hui considérée, par certains observateurs avertis comme celle qui a vu naître le problème anglophone. Que s’est-il donc passé à cette conférence ?


Pomme de discorde


Elle réunissait, autour d’une même table, des délégués du Southern Cameroon, conduits par leur premier ministre John Ngu Foncha et les délégués du Cameroun francophone, conduits par leur président Amadou Ahidjo.


A la surprise générale des délégués anglophones, la partie francophone déposa le projet de constitution d’une république fédérale. Avec le concours des juristes français, Ahidjo avait pris le soin de se rendre à Foumban avec une constitution déjà élaborée avec le concours de Paris. Les délégués anglophones qui s’attendaient sûrement à concevoir ensemble la forme de l’Etat avec une constitution rénovée, étaient pris au piège.


D’autres sources indiquent d’ailleurs que Foncha était au courant de cette manœuvre. Ce que certains historiens anglophones nient. Comment Foncha et ses paires, qui n’avaient apporté aucun contre-projet, ont-ils géré cette situation ? Les délégués anglophones décident néanmoins de consulter le projet de Constitution, proposé par Ahidjo afin d’y apporter des amendements. Ceux-ci portaient notamment sur le drapeau, l’hymne national et la devise du pays, le transfert du siège du gouvernement fédéral à Douala, Buea et Yaoundé - capitales des deux Etats fédérés, le bulletin secret et le droit de vote à 21 ans, les attributions et les pouvoirs du président de la République, le mandat présidentiel réduit à deux, une Assemblée fédérale constituée d’une Assemblée nationale et d’un Sénat, la double nationalité, le système scolaire et universitaire, le retour à l’orthographe Kamerun, la suppression du mot « indivisible » de la Constitution…


A la suite de ces amendements, présentés par les délégués anglophones, le président Ahidjo clôture les travaux de Foumban le 21 juillet 1961 par une réponse à ces amendements. Le mot « indivisible » disparaîtra du projet ; une clause garantissant l’intégrité de la fédération et empêchant toute possibilité de sécession sera introduite. Faute de ressources financières importantes, il ne saurait être question de parlement bicaméral. La « House of chiefs » sera maintenue. Yaoundé demeurera la capitale fédérale. Il n’y aura pas de double nationalité. Le président et le vice-président seront élus au suffrage universel. En attendant la mise sur pied des nouvelles institutions, les fonctions de président et de vice-président seront assurées respectivement par le président de la République du Cameroun et le premier ministre du Southern Cameroon…


Réunification…et problème anglophone


Le fédéralisme est donc décidé et adopté (en consensus?) lors d’une conférence à Foumban entre les leaders anglophones et francophones. Les accords consensuels, signés à Foumban, le 21 juillet 1961, étaient considérés comme un élément fondateur d’une gestion séparée et rigoureuse des deux Etats fédérés. Plusieurs historiens ne sont pas unanimes sur le caractère consensuel de la Constitution, adoptée à Foumban. Pourquoi?


Premièrement, parce que, selon Pierre Messmer - haut-commissaire de la République française au Cameroun, le président Ahidjo était en position de force. Celle-ci venait du fait que son projet de constitution avait été préparé plusieurs mois à l’avance avec l’aide des juristes français. Les délégués anglophones, venus bras ballants, malgré leurs connaissances acquises après une participation à trois conférences constitutionnelles à Londres et à Lagos, n’avaient que trois jours pour étudier de fond en comble le projet qui leur était proposé par Ahidjo.


Deuxièmement, la population du Cameroun francophone était quatre fois plus grande que celle du Cameroun anglophone. Ahidjo était convaincu d’être le porte-parole de la majorité. Ce qui lui conférait le droit d’être au-dessus de ses adversaires. Mais, pour l’écrivain Enoh Meyomesse, dans son ouvrage intitulé La rencontre de la roublardise, de Foumban ou la conférence constitutionnelle de 1961, Ahidjo était en position de faiblesse, parce qu’il était en réalité, sous les ordres de Paris.


Ce projet, selon les dires de Pierre Messmer, lui-même, n’était pas de lui. Le 6 mai 1972, le président El Hadj Ahmadou Ahidjo, président de la république fédérale du Cameroun annonçait devant l’assemblée nationale, la décision d’organiser un référendum pour l’institution immédiate d’un Etat unitaire.


Le 20 mai 1972, le référendum à une majorité écrasante créait la République unie du Cameroun. Les emblèmes nationaux restent les mêmes, sauf le drapeau qui perd une étoile. Celle qui reste n’est plus sur la couleur verte, mais sur le rouge et au centre. Le président de la République est le chef de l’Etat et du gouvernement. Il n’y a qu’un seul gouvernement, composé de ministres, désignés par le chef de l’Etat.


L’Assemblée nationale est la seule assemblée représentative de l’ensemble de la République. Elle compte 120 députés, élus au suffrage universel. Dès lors, si les anglophones estiment avoir été en position de faiblesse, quels sont donc les éléments pour démontrer ce qu’on pourrait aujourd’hui qualifier de «hold-up politique des francophones »? Question à un sou…