Une décision de la Haute cour fédérale du Nigeria instruit pourtant le gouvernement de ce pays, à porter le dossier des « sécessionnistes » camerounais auprès des juridictions internationales.
Les sécessionnistes camerounais accusent le gouvernement nigérian de violer une décision de justice rendue par la haute cour fédérale de ce pays. Cette décision prononcée le 5 mars 2002, demande aux autorités d’Abuja de porter la cause des militants de l’indépendance du Southern Cameroon auprès des institutions internationales.
Les faits remontent au 14 février 2002. Douze membres du Southern Cameroon national council (SCNC) saisissent le juge Roselyn Nonyelum Ukeje, alors magistrate de ladite juridiction, afin d’obtenir l’aide du Nigeria dans le processus de revendication de l’autodétermination des peuples des régions anglophones du Cameroun. La haute cour fédérale du Nigeria avait décidé que la République fédérale du Nigeria devait introduire un dossier auprès de l’Onu et de la Cour internationale de Justice (Cij), concernant des points spécifiques.
Dans un article paru sur son site internet, l’agence des Nations Unies pour les peules autochtones et les minorités (Unpo) précise qu’il s’agissait principalement de connaitre si « l’union envisagée dans le cadre du plébiscite organisé en 1961 entre la République du Cameroun et le Cameroun méridional était entrée en vigueur conformément aux résolutions des Nations Unies; en particulier la résolution 1352 (XIV) du 16 octobre 1959 du Conseil de tutelle des Nations Unies et la Résolution 2013 (XXVIV) du 31 mai 1960 » ; dire si « la population du Cameroun méridional n’a pas le droit à l’autodétermination sur un territoire propre, différent de celui de la République du Cameroun », et enfin savoir si « c’est le Southern Cameroon ou la République du Cameroun qui partage une frontière maritime avec le Nigeria ».
Le gouvernement du Nigeria n’a jamais donné une suite favorable à cette décision, ce qui a amené le groupe Global conscience à déposer une nouvelle plainte auprès de la Commission africaine des droits de l’Homme et des libertés à Addis Abeba.
Global Conscience y affirmait qu’en ignorant la décision de la haute cour fédérale du Nigeria, les autorités d’Abuja ont « violé les articles 19, 20 (1), (2) et (3) de la Charte africaine ».
En août 2007, la Commission africaine a accusé réception de cette plainte signée par Samba Churchill, directrice générale de Global Conscience, en indiquant qu’elle allait être présentée lors de sa 42ème session ordinaire qui s’est tenue en novembre 2007 à Brazzaville (Congo).
Cette procédure n’a toujours pas porté de fruits, et le Nigeria n’a jamais entamé une procédure en faveur des sécessionnistes. En décembre dernier, le président nigérian Muhamadu Buhari a dépêché un émissaire à Yaoundé, alors qu’une certaine opinion prétendait que le Nigeria servait de base arrière aux militants sécessionnistes.
L’ambassadeur et envoyé spécial Lawan Abba Gashagar a déclaré à cette occasion que « son pays ne soutient pas les sécessionnistes et que son pays est favorable au retour rapide à la paix au Cameroun et à la préservation de son intégrité territoriale. »
Avec l’annonce de l’arrestation du leader de l’Ambazonie le 5 janvier 2018, le Nigeria semble se positionner aux côtés du Cameroun dans la lutte pour son intégrité territoriale. Une position que certains leaders d’opinion nigérians ne partagent pas.
C’est le cas notamment de Femi Falana, un célèbre avocat nigérian basé à Lagos et spécialisé dans la défense des droits de l’Homme. Pour celui-ci, le gouvernement fédéral du Nigeria, ne devrait pas impliquer l’armée nigériane, « dans une guerre par procuration du président Paul Biya ».