Diguio, Abali Abassoloum et Amadou Poulo, trois membres des comités de vigilance des quartiers Galao 1 et 2, ont été arrêtés le 4 décembre 2015 à Koubougué, dans la peripherie de Fotokol. Ceux-ci s’apprêtaient à franchir le fleuve El Beid pour rallier le Nigeria et livrer du matériel à la secte Boko Haram, quand ils ont été interpellés par les forces de défense et de sécurité accompagnées d’autres membres des comités de vigilance.
Les trois comparses qui avaient intégré les groupes de défense populaire en septembre 2015, étaient pistés depuis plusieurs semaines en raison de leur train de vie. «Ils menaient grand train alors même que nous connaissions leur situation. L’un était mécanicien avant de nous rejoindre, l’autre chauffeur et enfin le dernier tenait une petite cafeteria », explique un des bras droit d’Alifa Siko, le grand patron des groupes de défense populaire de Fotokol. La raison de cette vie opulente est désormais connue : les trois comparses avaient succombé à l’appel de la trahison. Profitant des passedroits que leur conférait leur statut, ils fournissaient, selon les premiers éléments de l’enquête, des puces téléphoniques, du carburant et bien d’autres «biens de première nécessité» à la secte.
Les arrestations dans les rangs des membres des comités de vigilance se multiplient ces derniers jours dans la région de l’Extrême-Nord où ces structures se sont développées pour appuyer les autorités dans la guerre contre la secte terroriste Boko Haram. Le 29 novembre 2015, Blama Maidougou, membre du comité de vigilance de Tchakarmari, était interpellé par ses camarades pour collusion avec la secte terroriste. «L’infiltration est le plus gros danger qui guette non seulement les comités de vigilance eux-mêmes, mais toute la nation. Les agents infiltrés ou retournés fournissent à l’ennemi des informations capitales sur les opérations en cours et sur les personnes qui constituent le comité de vigilance de sorte qu’il est possible de faire pression sur elles. Il est nécessaire de les réorganiser en profondeur pendant qu’il est encore temps», explique un officier de haut rang.
Une invite d’autant plus urgente que les critères de recrutement dans les comités de vigilance sont pour le moins fantaisistes. En dehors d’être de nationalité camerounaise et de bonne moralité, il faut être autochtone de la localité et résider dans le quartier qu’on est appelé à protéger. Dans la réalité, c’est le copinage qui est de règle. «C’est un travail difficile mais exaltant. Il n’est pas donné à tout le monde de consacrer sa vie à la défense de la nation. Dans toute chose, il y a toujours des brebis galeuses et notre devoir est d’éliminer les mauvais éléments de nos rangs», poursuit un des proches d’Alifa Siko.