Selon Jeune Afrique, jusqu'à présent, rien n'indiquait la moindre animosité entre Moudiki et Ngoh Ngoh. Au sein de l'entourage proche de Paul Biya, ces deux hommes sont semblables. Ils sont tous deux des figures puissantes, endurcies par l'adversité. Raides, sans émotion, impitoyables, ils sont appréciés par leur mentor. Cependant, si le PDG de la compagnie pétrolière doutait encore du pouvoir de Ngoh Ngoh, il en a maintenant pris pleinement conscience.

Adolphe Moudiki détient pourtant des pouvoirs spécifiques pour protéger les intérêts camerounais dans le secteur pétrolier et gazier. Cela lui confère en théorie le droit d'engager la SNH (Société Nationale des Hydrocarbures) sans obtenir au préalable l'autorisation du conseil d'administration. Ainsi, sur le papier, il avait la possibilité d'augmenter la participation de la SNH dans Cotco grâce à un partenariat avec Savannah Energy, qui avait elle-même acquis les actions d'ExxonMobil dans le but de "contrer les prétentions hégémoniques du Tchad sur cette entreprise stratégique [Cotco]".

Adolphe Moudiki, ce haut fonctionnaire solitaire et irascible, a toujours agi en n'ayant comme seul supérieur que le président Biya. La communication directe entre les deux a toujours bien fonctionné. Est-ce que les coups portés par Ngoh Ngoh sont le signe d'une disgrâce imminente ? Ses nombreux détracteurs se réjouissent d'avance. Ceux qui convoitent l'un des postes les plus prestigieux de la République également.

Cependant, il est peu probable que Paul Biya ait approuvé l'opération d'achat des actions d'ExxonMobil avant de se rétracter. Il est également probable qu'il n'en ait pas informé Moudiki, son compagnon de route de cinquante ans, qui se retrouve maintenant contraint de céder. En raison de leur affiliation politique, économique et géostratégique, les affaires pétrolières relèvent du domaine réservé au président. Moudiki vient probablement de goûter à l'amère réalité de la raison d'État. Il était inévitable qu'un jour ou l'autre, elle se retourne contre lui.