Paul Atanga Nji refait parlé de lui. Le tout puissant ministre de l’Administration territoriale revêt son manteau de tonton flingueur de Paul Biya. Sa nouvelle cible, la chaine de télévision privée Équinoxe TV. Depuis quelques jours, il enchaine les sorties dans le but de faire la misère à cette télévision et à certains de ses responsables. Jeune Afrique livre des coulisses de cette nouvelle guerre.
« Fidèle à ses sorties tonitruantes, c’est par une série de lettres publiées le 16 novembre dernier sur la page Facebook du ministère de l’Administration territoriale que Paul Atanga Nji a une nouvelle fois sonné la charge. Cette fois-ci, il demande au gouverneur de la région du Littoral « de saisir le Conseil national de la communication » et d’ouvrir « des enquêtes administratives » contre Équinoxe TV et plusieurs personnes, dont un journaliste de la chaîne et un militant du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) récemment invité dans l’un de ses programmes », rappelle Jeune Afrique.
« Tout est parti de la diffusion le 3 novembre du talk-show Équinoxe Soir consacré au quarantième anniversaire de l’arrivée au pouvoir de Paul Biya. Sur le plateau, l’un des intervenants, Engelbert Le Bon Datchoua, membre du MRC, tente un bilan de ces quatre décennies et affirme que « Monsieur Biya [est] l’une des malchances que le Cameroun a connues ». Selon le ministre Atanga Nji, ces propos sont « injurieux » et incitent « à la révolte populaire » – des faits punis « par les articles 153 et 154 du Code pénal » relatifs à l’outrage au président, ajoute-t-il, rappelle Jeune Afrique
« Les intentions du puissant ministre sont claires : il veut que les personnes concernées soient entendues par les autorités administratives et, si les faits sont avérés, que « des sanctions appropriées soient prises « . Autrement dit, Paul Atanga Nji veut que le journaliste et le programme soient suspendus d’antenne. Il demande même au patron d’Équinoxe TV de ne plus convier Engelbert Le Bon Datchoua dans ses émissions.Suffisant pour que les acteurs de la société civile dénoncent une dérive autoritaire, et y voient une menace pour la liberté d’expression. Dans une tribune, l’écrivain Roger Kaffo Fokou dénonce ainsi « le signal d’un virage inquiétant vers une forme de répression véritablement inquisitionnelle ». « C’est l’héritage de Paul Biya qui est en train de s’effondrer », affirme-t-il. Quant à Maurice Kamto, le chef de file de l’opposition et leader du MRC, il a exprimé son « soutien » à Engelbert Le Bon Datchoua, tout en demandant « l’arrêt des enquêtes prescrites par le ministre de l’Administration territoriale que rien ne justifie », rapporte Jeune Afrique.
« Ce n’est pas la première fois que Paul Atanga Nji s’aventure sur ce terrain. En mars dernier déjà, Samuel Ivaha Diboua, le gouverneur de la région du Littoral, agissant sur les ordres de son ministre de tutelle, s’insurgeait dans une lettre adressée au patron d’Équinoxe TV contre une ligne éditoriale jugée « outrancière » depuis « plusieurs années ». Lors d’une intervention télévisée, le PDG du groupe Équinoxe Séverin Tchounkeu avait longuement répondu en fustigeant l’attitude du ministre qui, à l’époque, avait pourtant pris soin de ne pas s’afficher comme étant à l’origine des mises en gardes adressées à la chaîne », révèle Jeune Afrique.