La lettre que l’ancien directeur général de la Crtv, condamné à 12 ans de prison pour détournements de fonds, adresse au président de la République, date du 9 juin dernier.
Depuis sa cellule de la prison centrale de Kondengui à Yaoundé, Amadou Vamoulké demande au locataire du palais d’Etoudi de faire usage des larges pouvoirs que la Constitution lui confère pour obliger le juge des libertés (juge de l’habeas corpus) du Tribunal de grande instance (Tgi) du Mfoundi de respecter l’avis prononcé par le Groupe de travail sur la détention arbitraire du Conseil des Droits de l’Homme de l’Organisation des Nations unies, qui demande sa libération. Si Amadou Vamoulké a jugé important d’écrire à Paul Biya c’est parce que le procureur du Tgi du Mfoundi a souhaité que cette demande de mise en liberté soit ignorée par le juge des libertés.
En parlant au président de la requête aux fins de l’habeas corpus déposée par son avocat au Tgi du Mfoundi le 4 janvier dernier, Amadou Vamoulké écrit : « lorsque le ministère public dont la mission régalienne est de veiller à l’application de la loi suggère au juge de l’habeas corpus de s’en écarter en évoquant le caractère prétendument “politique” d’une décision prise par une entité mandatée par les États membres du Conseil des droits de l’homme des Nations unies dont le Cameroun fait pourtant partie, il y a lieu de vous saisir en dernier recours ». Séquestration en règle orchestrée par les autorités judiciaires La question est maintenant de savoir quelles sont les chances pour que ce recours aboutisse ? Difficile de pronostiquer, même s’il faut noter que ce n’est pas la première fois que le Groupe de travail sur la détention arbitraire donne un avis de ce genre sur un ancien ponte du régime de Yaoundé poursuivi par la justice pour détournement de fonds. Sauf que jamais avant Amadou Vamoulké un juge d’habeas corpus n’a accordé la liberté en suivant cet avis.
Dans le cas de l’ancien directeur général de la Crtv, le Groupe de travail sur la détention arbitraire constate que les deux mandats de détention provisoire décernés contre lui (en 2016 et en 2018) pour une durée de six mois renouvelables deux fois selon ce que prévoit le Code de procédure pénale ont expiré longtemps avant sa première condamnation. Ce n’est qu’en décembre 2022 qu’Amadou Vamoulké a été condamné à 12 ans de prison par un collège de juges du Tribunal criminel spécial (Tcs) dans la première affaire qui le concerne. La seconde est toujours en cours. C’est fort de cet avis rendu en 2020 qu’Amadou Vamoulké compare sa détention à «une séquestration en règle orchestrée par les autorités judiciaires » . Et c’est aussi pour cette raison que son avocat, Me Guy Léonard Gueyo Kamga, a saisi le juge des libertés du Tgi du Mfoundi pour obtenir la libération de son client. Ce qui est loin d’être gagné.