D’après le rapport Planète vivante 2024, publié le 10 octobre 2024, l’état de la biodiversité depuis les 50 dernières années (1970 et 2020) est alarmant. Il se traduit par une perte accrue de la biodiversité de l’ordre de 73% en ce qui concerne les populations de faune sauvage. Dans ce document, la planète est en train de s’approcher de manière inexorable vers les points de basculement. «Les points de basculement sont à peu près comme les points de non-retour.
Deux régions dans le monde ont été identifiées, à savoir les forêts d’Amazonie, qui ont déjà atteint un taux de déforestation de l’ordre de 17% et le point de basculement pour ces forêts-là se situe entre 20 et 25%. Lorsque ce point de basculement aurait été atteint alors ces forêts qui sont aujourd’hui les piles de carbones, c’est-à-dire qu’elles servent à absorber les émissions de gaz à effet de serre, deviendront donc des sources elles-mêmes d’émission de carbone», explique Alain Bertrand Ononino, directeur national du Fonds mondial pour la nature (WWF).
Au cours d’une table-ronde co-organisée le 19 octobre dernier à Yaoundé par l’Association des journalistes scientifiques du Cameroun (Scilife) et le Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et l’environnement (Remapsen), en collaboration avec le Fonds Mondial pour la Nature WWF, Planète vivante, le rapport que publie tous les deux ans le WWF, a été présenté à une vingtaine de journalistes. A l’occasion, l’on a appris que le Bassin du Congo subit lui aussi des crises environnementales. Les pays de cette région ressentent déjà les effets dévastateurs des changements climatiques que sont les sécheresses, les tempêtes, les inondations et bien d’autres.
Par exemple au Cameroun, les paysans voient leurs récoltes diminuer, car le calendrier des saisons jadis connu de tous est désormais instable. Une situation qui peut provoquer une insécurité alimentaire. Les populations vivant dans les zones côtières sont menacées du fait de la montée des eaux. Les maladies émergentes sont aussi perceptibles. FINANCEMENTS Les pays du Bassin du Congo «ont une ressource extrêmement importante que sont les forêts. Ces forêts sont les régulateurs du climat mondial, le réservoir de la biodiversité, mais également ces forêts fournissent des services écosystémiques non seulement pour nos propres pays, mais également pour le monde entier», indique Jonas Kemajou Syapze, expert financement climatique WWF. Malgré son rôle très capital dans la planète, ces pays ne bénéficient pas d’autant de financements.
«Il est question de tirer le constat selon lequel de la période de 2017 à 2021, ces pays du Bassin du Congo n’ont reçu que 4% des financements par rapport au Bassin de l’Amazonie et au bassin du Bornéo-Mékong », déplore l’expert. «Il faut que cette tendance change afin que nous puissions être davantage rémunérés de ces services que le Bassin du Congo rend à la planète toute entière », renchérit le directeur national WWF. Soulignant la difficulté pour les pays du Bassin du Congo de prendre en charge leurs populations victimes des effets néfastes des changements climatiques et de la biodiversité. D’où l’impératif d’asseoir une bonne stratégie de négociation avec les partenaires lors des différents colloques internationaux.
«Il est important de mettre en avant le rôle que le Bassin du Congo joue comme régulateur du climat et que les pays du Bassin du Congo qui hébergent ces forêts puissent avoir un meilleur accès à la finance climatique. Il est important également pour ces pays-là, de s’organiser de manière concertée. C’est la raison pour laquelle WWF appuie cette initiative sur les flux financiers internationaux, en partenariat avec la Comifac, afin de pouvoir accompagner les pays du Bassin du Congo lors des négociations climatiques lors de la Cop21 (sur les changements climatiques, Ndlr) en Azerbaïdjan, lors de la Cop16 (sur la biodiversité, en Colombie, Ndlr) à Khalil», relève Alain Bertrand Ononino. Contrairement aux deux autres bassins tropicaux du monde, l'Amazonie et le BornéoMékong, le Bassin du Congo a un taux de déforestation très bas. Il varie entre 0,01 et 0,33%.
Du coup, un autre moyen de financement peut être initié. L’optique est «de faire en sorte que ces forêts à haute intégrité puissent générer des financements pour permettre sa protection, mais aussi pour permettre de financer la transition pour une économie verte et l’amélioration des conditions socioéconomiques des populations, des communautés locales et des peuples autochtones qui vivent tout autour de ces zones de forêts à haute intégrité », souligne Jonas Kemajou Syapze. Pour rappel, Le Bassin du Congo s'étend sur six pays : le Cameroun, la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, la République du Congo, la Guinée équatoriale et le Gabon.