Dans l'une de ses récentes sorties, le Dr Dieudonné Essomba a fait une analyse et lecture de la succession de Paul Biya que beaucoup trouvent très intéressantes.
Dans une sortie médiatique sur Vision4, aucun opposant y compris Maurice Kamto et Cabral Libii, ne peut succéder à Paul Biya. Dans son analyse, il dresse le profil de celui qu'il qualifie comme l'héritier de Paul Biya.
"La succession se joue entre les héritiers de Paul Biya. Parmi ces héritiers, il y a des camps, il y' a des élites comme le Premier ministre et les autres des autres communautés qui sont en retrait parce qu'ils savent bien ce qui se joue. L'héritier de Biya, c'est quelqu'un qui est armé ou contrôle l'armée. Il a des machettes", a déclaré Dieudonné Essomba.
La vidéo de la sortie de Dieudonné Essomba ici diffusée (à la fin de l'article) donne plus de détails sur le point de vue de l'analyste. Mais ce n'est pas la première fois que l'économiste décrit le profil du successeur de Biya.
Dans la tribune ci-dessous, il donne des précisions
Peu de Camerounais acceptent suivre un raisonnement qui ne participe pas de leurs désirs profonds. La majorité attend plutôt que les analyses viennent les conforter dans leurs propres certitudes, même lorsqu’elles sont fausses. Malheureusement, ce n’est pas comme cela que le monde fonctionne.
Il en est ainsi des thèmes majeurs des débats actuels au Cameroun, incontestablement la succession du Président Biya. Les débats se dispersent autour des hypothèses multiples, telles que le gré à gré, la succession dynastique, le choix démocratique, la rotation tribale, l’implosion du pays, etc.
Même si à la vérité, personne ne peut savoir ce qu’il va advenir réellement, il n’empêche qu’on peut anticiper sur la base des observations pertinentes de la vie politique de nos pays, et singulièrement, de l’Afrique Centrale. Et dans ce genre d’analyse, on n’occulte rien ! Certains voudraient par exemple qu’on occulte de l’analyse la dimension ethnique, mais comment peut-on exclure une donnée aussi fondamentale et espérer tout de même faire une bonne prospective ? C’est impossible ! Le spécialiste des Sciences sociales n’est pas là pour défendre les idéologies, mais pour tirer sur la base des faits constants et vérifiés des conclusions qui s’imposent logiquement. Cela ne signifie pas que des prévisions ainsi faites avec toute la rigueur de la Science vont nécessairement se réaliser, mais elles éclairent les dynamiques futures du système et permettent d’anticiper.
Pour revenir au problème de la succession de Biya, la première question à poser est la suivante : depuis les indépendances dans années 1960, y a-t-il jamais eu de transition démocratique dans un pays d’Afrique Centrale ? La réponse est sèche: non !
Le Tchad a-t-il jamais connu une transition démocratique ? Jamais ! Là-bas, les transitions, c’est uniquement par les coups d’Etat et la guerre.
La Centrafrique en a-t-elle connue ? Non, car là-bas, c’est une succession de coups d’Etat, de rébellions armées, et les quelques élections qui ont pu aboutir à un choix démocratique ont toujours été le fruit d’une pacification par la Communauté Internationale.
Le Congo a connu une succession de coups d’Etat qui se sont arrêtés avec SASSOU NGUESSO, lequel est entrain de bloquer le pouvoir au sein de la famille.
La Guinée Equatoriale n’a connu que la famille OBIANG NGUEMA et son fils se prépare à assurer la succession.
Au Cameroun, on a connu un seul gré à gré entre Ahidjo et Biya qui s’est par ailleurs mal achevé avec une malheureuse tentative de récupération du pouvoir par coup d’Etat.
Au Gabon qui a aussi connu un gré à gré entre Léon Mba et Bongo, le pouvoir a fini par caler dans la famille de Bongo qui se le passe de père en fils.
En RDC, c’est le désordre et la dictature depuis l’Indépendance, et la transition n’a pu avoir lieu que sous la pression internationale exercée sur Kabila, lequel a refilé le pouvoir à Tshisekedi de manière controversée…
Au Rwanda, au Burundi, partout en Afrique Centrale, c’est toujours la même histoire : le pouvoir est d’abord et avant tout une épreuve de force.
Quand on explique aux Camerounais qu’en tant que pays de l’Afrique centrale, nous ne pouvons pas échapper à ce triste sort et qu’en conséquence, l’après-Biya ne sera qu’un rapport de force dans lequel ses héritiers sont lourdement avantagés, certains continuent à bâtir des scénarios.
Il n’en a qui nous parlent de la France en oubliant les conditions d’intervention de celle-ci. La France, comme d’ailleurs, toutes les autres puissances n’agissent que sur les lignes de force, telles qu’elles se dessinent sur le terrain. Elle ne vient pas fabriquer des gens nouveaux, mais s’appuient sur des forces qui sont déjà là et présentent suffisamment de puissance pour faire le poids dans le combat ! La France n’appuiera jamais un camp trop faible !
Du reste, son influence s’est considérablement érodée depuis de longues années et des pays comme le Mali ou la Centrafrique fonctionnent bien contre elle. Pour le cas du Cameroun, la France n’a aucun moyen opérationnel d’empêcher les héritiers de Biya de s’emparer du pouvoir.
Quant à la prétendue démocratie, il faut être d’une incroyable naïveté pour croire que des faucons, des durs entre les durs, comme les NGO NGO, les MVONDO AYOLO, les Grégoire OWONA ou les EYEBE AYISSI, sans compter les moins connus qui ne sont pas les moins radicaux peuvent sortir volontairement d’Etoudi pour laisser la gestion des 5.700 Milliards de FCFA à d’autres, surtout s’ils ne sont même pas Ekang.
Cela va se passer comment ?
Quand quelques gringalets viennent plastronner en disant qu‘ils s‘opposeront au gré à gré, ils ne savent pas à quel point ils suscitent un immense éclat de rire des NGO NGO et consorts. Ils vont s’opposer en quoi faisant ? Les héritiers de Biya ne les voient pas ! Ils s’en foutent du qu’en dira-t-on et poursuivent sereinement leur projet, la seule entrave se réduisant aux antagonismes qu’ils peuvent entretenir entre eux.
Ils vont conserver le pouvoir de force et ils ont tous les arguments à leur faveur : le Conseil Constitutionnel, l’administration, les unités militaires, et surtout, la population de la capitale, là où tout se joue (ce qui n’est pas un détail, bien au contraire !). A quoi i faut ajouter une batterie d’intellectuels extrêmement durs, implacables et très acharnés…
Il n‘y a aucune place pour un individu venant de l’extérieur de leur cercle, à moins qu’il ne vienne les chasser à coups de bazooka… ce qui est bien une toute autre affaire…
Celui qui ne voit pas qu’après Biya, c’est Biya est un idiot. D’ailleurs, le moment venu, les Camerounais seront informés d’une « haute instruction » et ce sera terminé.
Et il n’y aura rien ! En tout état de cause, les mécontents n’auront aucun moyen même de faire la moindre illusion de résistance à Yaoundé.
Pour finir, je reviens à ce que j’ai toujours dit et redit : le seul combat qui vaille la peine aujourd’hui, ce n’est pas d’entrer au Palais d’Etoudi, mais de sortir une bonne partie du pouvoir et de l’argent qui y sont logés, et de les disperser dans des pôles de gestion régionaux.
Il nous faut un système du type nigérian qui nous sortira de cette mélasse dans laquelle toute l’Afrique Centrale est embourbée.
C’est la bonne solution et il n’y a pas d’autre.
Ceux qui se focalisent sur Etoudi nus perdent du temps et avec eux, nous pouvons être certains de subir pendant 40 autres années un autre Biya, peut-être plus borné encore, et sans la moindre possibilité d’y faire quoi que ce soit, en dehors d’inoffensives vociférations Facebook."