C'est avec un vieux véhicule impropre et dangereux qu'Abdel, conducteur de taxi, transporte ses clients à longueur de journée à Yaoundé. Cette vieille guimbarde, malgré ses défaillances techniques, dispose curieusement d'une vignette attestant qu'elle a subi avec succès un contrôle de visite technique.
« C'est un ami à mon patron qui le lui a délivré parce que cette voiture n'a jamais été envoyée dans un centre de contrôle. Pas à ma connaissance », confie notre interlocuteur. Sur nos routes, de tels engins dangereux sont légion et c'est à se demander à quoi servent tous les centres de contrôle de visite techniques qui se multiplient à travers le pays.
Cette situation s'explique par la complaisance des agents des brigades de contrôles qui laissent circuler des voitures qui, à vue d'œil, sont en mauvais état. A cela s'ajoute le fait que de nombreux promoteurs de centres de contrôle technique qui doivent parfois rembourser des crédits bancaires se préoccupent davantage du retour de leur investissement. Dans ce contexte, la sécurité des usagers de la route n'est pas toujours leur premier souci.
C'est pour cette raison que des vignettes authentiques sont régulièrement délivrées à des voitures qui devraient au préalable aller dans un garage faire remplacer les pièces défectueuses. Mais, mus par l'appât du gain, de nombreux responsables des Centres de contrôles ferment les yeux sur ces manquements, conscients qu'ils évoluent dans un environnement concurrentiel.
On comprend dès lors pourquoi le ministre des Transports (MINT), Edgard Alain Mebe Ngo'o déclare que 25 à 30 % des accidents de la route sont causés par l'état physique des véhicules. « Nous avons des véhicules qui ont un système de freinage approximatif, avec de vieux amortisseurs qui mettent à mal le confort des passagers. Et c'est en cas d'accident qu'on se rend compte de la gravité de la situation. Il faudrait que l'impunité cesse », s'indigne Paul Awona, usager de la route.
Pour remédier à la situation, le ministre des Transports (MINT) a inauguré vendredi dernier à Yaoundé, un nouveau Centre de contrôle de visite technique avec géolocalisation et prises de vues. Prêchant par l'exemple, il a soumis son véhicule au contrôle de visite technique.
« Je viens de recevoir mon procès-verbal qui stipule qu'il est en bon état même s'il est âgé de 14 ans. Je souhaite que tous nos compatriotes aient ce reflexe », a déclaré Edgard Alain Mebe Ngo'o. D'après le ministre, ce Centre pilote va permettre de lutter contre l'irresponsabilité, le manque de professionnalisme et la complaisance. « Nos équipements ont été fabriqués à la commande et sont neufs.
C'est un système qui atteste de l'effectivité du contrôle de tout véhicule avec les photos à l'appui sous toutes les vues. Il va faciliter la tâche aux forces de maintien de l'ordre dans le cadre de leur contrôle », a expliqué Jocelyn Ngae Nkenime, le promoteur du Centre. L'ambition du MINT est d'étendre ce système aux autres Centres de contrôle. « Je viens d'autoriser mes services compétents à expérimenter un système de géolocalisation et de visualisation en temps réel de passage effectif de véhicules dans les Centres de contrôle technique.
Et le cas échéant, me faire connaître tous les cas de mauvaises pratiques qui feront l'objet de sanctions exemplaires. Un tel système innove dans la rigueur des contrôles effectués. C'est un Centre pilote pour la nouvelle génération des Centres de contrôle technique appelée à être généralisée », explique le MINT.