Tout est parti d’une banale publication dans les réseaux, de l’acte accordant délégation de signature au ministre d’Etat SGPR, le 5 février 2019. La situation est devenue presqu’incontrôlable, chacun y allant de ses interprétations et davantage de ses supputations, à propos de ces dispositions légales. À la vérité, Ferdinand Ngoh Ngoh, depuis sa nomination en décembre 2011, a toujours exécuté, en étroite ligne aux missions liées à sa lourde fonction, les hautes instructions de sa hiérarchie.
« Le Secrétaire général de la présidence reçoit du Président de la République toutes les directives relatives à la définition de la politique de la Nation ; suit l’exécution des décisions prises par le Président de la République, coordonne l’action des Administrations rattachées à la Présidence ainsi que précisées aux articles 5 et 37 du décret suscité ; instruit les dossiers que lui confie le président de la République et suit l’exécution des instructions données ; … assure la mise en forme, en liaison avec le SG des services du premier ministre ou des ministres concernés… veille à la réalisation des programmes d’action approuvés par le Président ».
C’est en ces termes que s’articulent certaines grandes missions d’un Secrétaire général de la présidence de la République Sg/pr du Cameroun. Ferdinand Ngoh Ngoh, au soir de sa nomination le 09 décembre 2011, a pris le pool de la lourde charge qui incombait à sa modeste personne. L’on se souvient encore qu’il avait déclaré « Je ne faillirai pas ». Le temps a donné raison à l’ancien Sg du ministère des Relations extérieures.
En homme de main du chef de l’Etat, il agit au quotidien selon les ordres de sa haute hiérarchie. Certains observateurs affirment qu’il est les yeux et les oreilles de Paul Biya. Cette marque de confiance est sanctionnée par la promotion au rang de ministre d’Etat avec dérogation de signature au soir du 04 janvier 2019. Malgré les controverses autour de la fameuse citation « Sur hautes instructions du chef de l’Etat », le natif de Minta, localité située dans le département de la Haute-Sanaga continue de suivre à la lettre les missions liées à son poste.
Le magazine Jeune Afrique le soulignait déjà dans l’une de ses parutions. Dans cette édition, l’on peut lire Ferdinand Ngoh Ngoh « l’homme de confiance de Paul Biya », un homme « insaisissable qui prend soin de n’afficher aucune ambition malgré le soutien de la première dame dont il bénéficie ». Des déclarations qui valent son pesant d’or venant de ce célèbre magazine. D’autres spécialistes pensent que ne durent pas à ce poste qui veut, mais qui jouit d’un indéfectible soutien de son patron. Car c’est un maillon stratégique incontournable dans la nomination et les choix tactiques du pays.
L’ancien Sg/Pr, Jean Marie Atangana Mebara (2022-2006) le reconnaissait déjà dans son livre publié en 2016 et intitulé « Le secrétaire général de la présidence de la République du Cameroun : Entre mythes, textes et réalités ». D’après l’auteur, « La plupart des ministres recevaient les instructions présidentielles que je leur transmettais, sans manifester d’humeur particulière. La formule était généralement le chef de l’Etat me charge de vous demander de bien vouloir… ».
D’une manière simpliste, le poste de Sg/pr est sacré. Celui qui l’occupe n’est pas choisi au hasard. C’est un travail de longue haleine qui lie intégrité, loyauté, discrétion, bon ses managériale, expérience professionnelle et politique, etc. Ferdinand Ngoh Ngoh fait partie de ces personnalités ressources. Par rapport à la délégation de signature, l’on rappelle qu’elle date depuis feu Président Ahidjo, qui le fit avec Samuel Eboua ( 17 juillet 1975), ou encore Ferdinand Léopold Oyono (décret n°85-1199 du 30 aout 1985), les Owona Joseph, Esso Laurent, Titus Edzoa, Marafa Ahmidou Yaya, Atangana Mebara, etc, l’ont aussi eu de Paul Biya.
En effet, Marafa Hamidou Yaya, Jean Marie Atangana Mebara et Laurent Esso ont aussi chacun bénéficié d’une délégation permanente de signature du temps où ils occupaient le même poste, à travers respectivement les décrets n°97/220 du 11 décembre 1997, n°2002/222 du 30 aout 2002 et n°2006- 371 du 25 septembre 2006. Dans le cas de M. Ngoh Ngoh, par cet acte présidentiel qui date du 5 février 2019, beaucoup ont estimé que Paul Biya confie les clés du pays à son ministre.
Pourtant, il convient de rappeler que la délégation de pouvoirs se distingue de la simple délégation de signature. Dans le cas d’une délégation de signature, le dirigeant charge simplement une personne de signer des actes en son nom et en ses lieux et place. Le délégataire n’est alors qu’un mandataire du dirigeant ; il ne représente pas la société. Par contre, dans le cas d’une délégation de pouvoirs, le dirigeant délègue une partie de ses pouvoirs au nom et pour le compte de la société.
Le SGPR, Ferdinand Ngoh Ngoh peut donc signer certains actes administratifs, comme les actes d’intégration ou de nomination de certains personnels de la sureté nationale, ou de signer des courriers en son nom. En définitive, l’on retient que le secrétaire général de la présidence de la république n’est pas le seul à bénéficier d’une délégation de signature. En effet, cette pratique est nécessaire voire indispensable dans la haute administration du fait d’une excessive concentration des compétences, au point où, comme le dit Olivier Duhamel et Yves Meny dans le Dictionnaire constitutionnel, « il n’est guère d’autorité administrative qui ne soit habilitée à déléguer ses compétences ».