Actualités of Wednesday, 5 August 2015

Source: L'Oeil du Sahel

Garoua: La police démantèle une prison Islamique

Police Police

Les éléments du Groupement mobile d’intervention (GMI) de Garoua ont démantelé une prison islamique situé au quartier Kilarou en plein coeur de la ville de Garoua, le 29 juillet 2015. Celleci se trouvait à l’intérieur de la maison de Modibo Sani, un maître coranique exerçant dans ledit quartier.

Sur les lieux, les flics ont retrouvé des enfants, pieds enchaînés et entassés les uns sur les autres. Le tout dans une cellule lugubre de 4 mètres carrés. «Je suis à plus de seize mois dans cette cellule. En venant, on m’avait dit que j’apprendrais le Coran, mais à mon arrivée, je me suis rendu compte que ce n’était qu’un prétexte pour me conduire jusqu’à mon bourreau. On m’a placé des menottes en fer au pied.

Nous urinions dans des bouteilles et déféquions dans des sacs en plastique qu’on vidait tous les matins. Nous faisions tout cela surplace car nous ne pouvions pas nous déplacer aisément à cause de ces chaînes aux pieds. Ces chaînes en fer nous ont été placées par un forgeron recruté pour la circonstance. Il nous est même impossible de nous débarbouiller normalement.

Nous faisons descendre le pantalon juste au niveau des jambes et nous nous lavons sans l’ôter complètement à cause de ces chaînes que nous avons aux pieds», explique Djamal Arabo, un des détenus de la prison de Modibo Sani. Aussi, les policiers ont-ils extrait dix détenus de l’unique cellule de cette prison.

Il s’agit de Souleymanou Atto, Apadam Boubakar, Haman Adama, Ahmed Moubarak, Djamal Arabo, Boubakari Bello, Djaniyo Bouba, Hamadou Mohaman, Mohamadou Nourou et Youssoufa Iya Mohamed. «Voyant ces jeunes, je me demande si l’humain a encore de la valeur pour certaines personnes. Au troisième millénaire, on enchaine encore un être humain comme si on avait à faire à une bête sauvage qu’on conduit à la boucherie. Les fers qu’ils ont aux pieds sont des menottes sauvages, fabriquées artisanalement, qui blessent. Et ils les portent depuis 14, 15 ou 16 mois. Les auteurs de ces actes doivent être sévèrement punis», déclare Ibrahima Sadjo, témoin de la scène.

Le geôlier, Modibo Sani, est un marabout respecté dans la ville de Garoua non seulement pour la qualité de ses enseignements dispensés aux jeunes et aux moins jeunes, mais aussi et sutout à cause de sa grande capacité à remettre sur les rails les enfants «compliqués». Pour y parvenir, le marabout n’hésitait pas à recourir à toutes formes de torture et aux sanctions infligées en fonction de la gravité des accusations des parents.

Les peines de prison variaient généralement de 6 mois à 3 ans, mais certains enfants se sont vus infliger des peines plus lourdes,de 4 à 5 ans de prison. Le geôlier, pour administrer sa «prison», bénéficiait de l’aide des parents des victimes qui n’hésitaient pas à faire des dons en espèces ou de nourriture. Une organisation des rôles qui laisse songeurs plusieurs responsables sécuritaires de la région du Nord.

«Cette prison est le fruit d’une organisation des dignitaires religieux de ce quartier. Tous savaient qu’une telle chose existe et que des enfants y sont inhumainement maltraités, mais personne n’a osé lever son petit doigt pour dénoncer la suite. Et quand bien même la police met hors d’état de nuire le bourreau, les parents plaident curieusement pour sa libération et non celle de leurs enfants. C’est incompréhensible. Les enfants déclarent que quelques-uns d’entre eux ont été régulièrement extraits et n’y sont plus retournés», fulmine un riverain.

En attendant, Modibo Sani est gardé à vue dans les locaux de la division régionale de la police judiciaire du Nord où une enquête est diligentée par le commissaire principal Akpwa Mvembe Célestin. Les enfants, qui ont été débarrassés de leurs menottes le 31 juillet 2015 grâce aux bons soins d’un forgeron, sont également retenus dans cette structure pour besoin d’enquête. Par ces temps où la vigilance est de mise, ce coup du GMI est à porter aux efforts déployés par les forces de police pour sécuriser les citoyens.