Selon une enquête du consortium d'investigation Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), depuis son accession à la magistrature suprême il y a plus de quarante ans, Paul Biya a passé plus de quatre ans à l'hôtel InterContinental de Genève, sans compter l'année supplémentaire qu'il faut ajouter si l'on prend en compte les voyages officiels, rappelle Jeune Afrique dans un article.
Le 27 juin, quelques jours après avoir participé au sommet de Paris pour un nouveau pacte financier mondial, le président camerounais a commencé un nouveau séjour à l'hôtel InterContinental de Genève, situé à proximité du Palais des Nations de l'ONU. Malgré sa discrétion, il n'est pas passé inaperçu. Les activistes de la Brigade anti-sardinards (BAS), un mouvement d'opposition apparu après l'élection présidentielle de 2018, envisagent de perturber à nouveau le séjour du président.
Ces perturbateurs ont annoncé qu'ils allaient s'organiser pour se rassembler aux abords de l'hôtel de Genève le 1er juillet. S'ils ne peuvent pas manifester devant l'établissement, ils prévoient de se rassembler dans l'après-midi sur la place des Nations, avec l'autorisation des autorités locales. Les Suisses connaissent bien cet activisme, car depuis de nombreuses années, la paisible Genève est régulièrement perturbée par les troubles de la politique camerounaise.
« Nous savons que Paul Biya est en Suisse et nous envisageons d'aller là-bas », a déclaré un activiste à Jeune Afrique. Du côté de la présidence, aucune information n'a filtré sur les déplacements du chef de l'État, pour des raisons sécuritaires, a indiqué une source. Les autorités veulent éviter tout désagrément qui pourrait nuire au séjour du président camerounais, qui a déjà connu quelques journées mouvementées les années précédentes.
En juin-juillet 2019, le parvis de l'hôtel InterContinental avait été le théâtre d'affrontements entre une quarantaine d'activistes, la Direction de la sécurité présidentielle (DSP) et la Direction générale de la recherche extérieure (DGRE), redoutée. Un journaliste de la Radio télévision suisse (RTS) avait été pris à partie par la garde rapprochée du président, qui lui avait volé son sac et son téléphone, et avait écrasé ses lunettes. Six membres de la sécurité du président avaient été interpellés puis interdits de séjour en Suisse.
Ces actes de violence avaient conduit des parlementaires à prendre des mesures au conseil du canton de Genève. En octobre 2020, le député suisse Sylvain Thévoz avait lancé une pétition pour déclarer Paul Biya persona non grata. Cependant, la pétition avait été rejetée par le conseil du canton, avec 43 voix pour et 27 contre.
Quelques mois plus tard, un autre incident avait obligé l'InterContinental, où le président réservait plusieurs étages aux frais de l'ambassade du Cameroun en France, à renforcer sa sécurité, mais en vain.
Le 17 juillet 2021, malgré la présence des membres de la DSP d'Ivo Desancio Yenwo, qui accompagnent le président lors de ses voyages, une trentaine d'activistes de la BAS avaient lancé une nouvelle attaque contre l'hôtel pour tenter de déloger Paul Biya, lors d'une opération appelée Catcham (attrapez-le !). Cette opération avait dégénéré et plusieurs activistes, dont certains avaient réussi à entrer dans l'hôtel, avaient été arrêtés par la police cantonale avant d'être libérés sous caution.