L'armée camerounaise s'est défendue vendredi des accusations d'exactions lors d'opérations contre les séparatistes des régions anglophones alors que l'Union européenne a réclamé un usage proportionné de la force et que des témoignages à charge se multiplient dans la presse et sur les réseaux sociaux.
"Ces accusations d'exactions relèvent du rêve, nous sommes victimes de la désinformation" et des "fake-news", a déclaré le colonel Didier Badjeck, porte-parole de l'armée à l'AFP, joint par téléphone depuis Libreville.
Depuis plus d'un an, les régions camerounaises anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont secouées par une crise socio-politique alimentée de velléités séparatistes.
Au fil des mois, et en réaction au fort déploiement de troupes opéré par Yaoundé, la cause indépendantiste a pris du poids, et la crise s'est peu à peu muée en conflit armé de basse intensité avec des attaques isolées contre les symboles de l'Etat.
Jeudi, un militaire a été tué à Bamenda (nord-ouest) "d'un coup de poignard dans l'oeil", selon le colonel Badjeck. Sa mort porte à 23 le nombre d'éléments des forces de sécurité tués par des séparatistes présumés en régions anglophones depuis le début de la crise, selon un décompte de l'AFP sur la base des déclarations officielles de Yaoundé.
"Nos soldats se font abattre tous les jours. Nous sommes harcelés. Cela peut arriver qu'il y ait des réactions sur le terrain, qu'un soldat perde ses moyens. Mais ce n'est pas encore arrivé", a déclaré le colonel Badjeck.
Jeudi, l'Union européenne a jugé "essentiel que les forces de sécurité fassent un usage proportionné de la force dans l'exercice de leurs fonctions".
Le porte-parole de l'armée a invité les partenaires du Cameroun à avoir un regard impartial.
"Il faut que les organes, avec qui nous maintenons de bonnes relations, n'écoutent pas qu'un seul camp", au risque d'être victime de désinformation, a-t-il dit, tout en déclarant que ce n'était pas à lui d'apporter une réaction officielle.
"On nous rappelle ce qu'on doit faire, mais il n'y a pas besoin. L'armée est professionnelle. Nous avons une culture de respect des droits de l'homme", a-t-il encore déclaré.
Selon différentes sources, au moins quatre civils ont été tués début février par les forces de sécurité dans le nord-ouest anglophone après la mort de deux gendarmes. Des témoins ont aussi fait état de maisons détruites, de vitres cassées, de radios, téléviseurs et ordinateurs brûlés.
"Nous sommes scandalisés par les fake-news", a dit le colonel Badjeck, qui a estimé que "grâce aux rafles, nous arrivons à mettre la main sur de l'armement".
Les séparatistes "sont forts dans la désinformation ! Les gens ont peur. Il nous faut gagner la guerre des cœurs", a-t-il encore dit.