Actualités of Sunday, 29 July 2018

Source: www.camerounweb.com

Guerre en Ambazonie: la cinglante lettre d’un Camerounais au Cardinal Tumi

La conférence des anglophones initiée par le Cardinal Tumi devrait se tenir en août prochain La conférence des anglophones initiée par le Cardinal Tumi devrait se tenir en août prochain

La conférence des anglophones initiées par le Cardinal Christian Tumi pour la résolution du conflit dans les zones anglophones du Cameroun semble ne pas recueillir l’assentiment de plusieurs Camerounais comme l’activiste Web Brice Cardeau.

Dans une récente lettre ouverte adressée au prélat et publiée sur les réseaux sociaux, ce dernier trouve que l’initiative risque de ne pas porter les fruits escomptés du fait de la situation réelle dans les zones anglophones et surtout du fait du manque d’objectivité du Cardinal Christian Tumi.

Lire l’intégralité de sa lettre ouverte :

LETTRE À SON ÉMINENCE CHRISTIAN WIYGHAN TUMI : PRÊTRE DE JÉSUS-CHRIST, CARDINAL, MAIS SURTOUT CAMEROUNAIS-ANGLOPHONE

Votre Éminence,

Elle est révolue cette époque où un commerce épistolaire était quasi-impossible entre un dignitaire ecclésiastique de votre acabit et des traîne-savates de ma classe. Du fait de la foi faible, de l'irrévérence notoire et de l'outrecuidance de la malapprise jeunesse à laquelle j'appartiens, j'ai pensé qu'il était nécessaire que je fasse parvenir cette Épître de Brice Cardeau au Prélat camerounais anglophone que vous êtes. Votre Grandeur m’aura pardonné, je l’espère, de n’avoir pas fait usage de toutes les civilités si bienveillantes qui s'y rapportent, et, sans doute, elle n’aura pas imputé cette méprise à ma négligence ou à un quelconque irrespect, mais uniquement à mon ignorance.

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Avant d’avoir encore vu, écouté ou convoqué personne, et, justement, pour ne rien mêler dans cette lettre à l’expression de ma reconnaissance et de mes remerciements pour l'ampleur et la portée de votre œuvre, je n’écris aujourd’hui que deux mots à Votre Éminence.

Vous avez réuni autour de vous mercredi 25 juillet à Douala des Chefs religieux pour poser les jalons d’une future conférence anglophone pouvant contribuer à la fin de la guerre de sécession dans la partie occidentale du Cameroun. Il était donc question de réfléchir sur des possibles solutions de sortie de crise dans les Régions du Nord-Ouest et du Sud-ouest.

Après lecture du communiqué publié au terme de cette réunion de concertation, je découvre qu'à vos côtés, il y avait d'autres hauts dignitaires religieux parmi lesquels le Révérend Babila George Fochang de l’Église Presbytérienne du Cameroun, l'Imam Tukur Mohammed Adamu de la Mosquée centrale de Bamenda au Nord-Ouest et l'Imam Alhadji Mohammed Aboubakar de la Mosquée centrale de Buea dans le Sud-Ouest. Très bien ! C'était donc entre "vous", amis et descendants de Jésus et Mahomet. Comment ne pas remarquer que vous n'avez pas joint à votre initiative un représentant de nos religions traditionnelles ?

Peut-être parce que vous ne savez pas où les trouver, peut-être n'ont-ils pas assez d'influence comme vous, peut-être sont-ils politiquement étiquetés, me diriez-vous. Il est fortement déconseillé dans notre société d'entrevoir (même dès les premières étapes), la résolution d'une crise sans eux, loin d'eux. Ils savent souvent mieux que quiconque, ce qui se passe chez eux. Passons ! Après réflexion, vous avez convenu de la convocation d’une Conférence Anglophone du 29 au 30 août prochain à Buea en précisant que toutes les populations de ces deux Régions sont invitées à cette rencontre qui est aussi ouverte aux contributions nationales et internationales.

Vous précisez en outre que les propositions recueillies au terme de cette rencontre de large débat, seront envoyées au Chef de l’État Son Excellence Paul Biya qui pourrait à son tour convoquer un dialogue national pour trouver des solutions définitives et durables à la fameuse crise anglophone. Un autre aspect a attiré mon attention, vous demandez la libération de toutes les personnes incarcérées dans le cadre de ce malaise social, le dépôt des armes par les rebelles et le retour des réfugiés en terre camerounaise. Votre Éminence, les techniques de négociation nous enseignent qu'il faut commencer à exiger des concessions après le début de la négociation, sachez que chaque camp reste dorénavant très prudent sur cette affaire.

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Nous connaissons la duperie, la fourberie et le jeu-double de nos "chers rebelles sécessionnistes". Aucun dialogue véritable ne sera possible si certains de nos "frères" sont encore en "brousse". Si non, le gouvernement ne sera jamais sûr d'avoir le bon interlocuteur en face de lui. Voyez-vous Votre Éminence, il y a désormais plusieurs catégories d'anglophones et il est devenu difficile de savoir qui peut et doit parler au nom de quelle faction. C'est donc bien de réunir tous les anglophones, mais il serait encore mieux de réunir TOUS les Anglophones (en faisant surtout venir ceux qui manipulent ceux qui sont en brousse, s'ils les contrôlent même encore réellement !).

Malgré tout, je crois fermement que ce que vous avez décidé de faire est exceptionnel. Il n'y a d'âme sensible qui reste silencieuse ou inactive devant le malheur des autres, de surcroît lorsqu'il s'agit d'un malheur imposé à une masse de paisibles âmes, il n'y a aucune raison de rester atone. La seule chose qui permet au mal de triompher est l'inaction des hommes de bien renchérissait alors MACAIRE. Votre initiative est la preuve, s'il en fallait encore, que vous êtes un homme de bien, une grande figure utile et positive que quelques "ratés", par leurs ineptes commentaires et agissements ne parviendront pas à en altérer l'esthétique.

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La dignité de cardinal (seul et unique dans l'histoire de notre pays), la clairvoyance de vos actions passées, la grande estime qu'on vous tient, l'adresse et la maestria qui vous distinguent font de vous l'homme de la situation. Oui Votre Éminence, vous êtes bel et bien l'homme de la situation parce que vous faites mieux que quiconque le consensus en zone anglophone au Cameroun. Que les sons discordants et les faux bruits ne vous dissuadent point ! C'est à vous que revient la lourde charge de reconstruire la paix perdue.
C'est une responsabilité souveraine, vous avez l'obligation morale de répondre aux cris de guerre, aux cris séditieux, mais aussi aux cris de ralliements et aux cris du cœur émis sous l'effet de l'émotion, des hurlements et pleurs des enfants de Notre République.

Cependant, une ALL ANGLOPHONE CONFERENCE à Buea à la fin du mois d'août et donc en pleine période électorale ne sera pas nécessairement une caution pour le retour au calme. Votre Éminence, la situation est bien plus grave que ce que vous vous représentez depuis votre presbytère, d'autres enjeux animent certains "petits esprits". J'ai bien peur qu'au contraire, la rencontre n'envenime l'ardeur impétueuse de la sauvage lutte de souveraineté engagée par les très furieux partisans de ce séparatisme du samedi soir. Le plus dur n'est donc pas de prendre une initiative de ce type, c'est de bien mener la mission et ceci en toute sincérité et sans parti pris, sans opinions préconçues, sans position préalablement arrêtée.

Vous aurez alors fort besoin de la neutralité qui vous a très souvent manqué ces dernières années. Priez sans cesse pour que Votre Dieu vous l'accorde. Je remercie Votre Grandeur de l’accueil qu’elle fera à mon petit billet. S’il ne le mérite assurément pas pour lui-même, il en est digne pour l’émoi qu'il suscitera chez nos adversaires communs.

Daignez, Votre Éminence, agréer l'expression de ma très haute estime.

Brice Cardeau