«J’exprime ma profonde gratitude à mon aîné, le président Paul Biya qui, dans la pure tradition des liens historiques qui unissent le Cameroun et le Tchad, a confirmé l’inaltérable amitié qu’il a pour le Tchad. Je voudrais au nom du peuple tchadien, l’en remercier». En ces mots, Mahamat Idris Deby Itno, a salué la nomination d’Harouna Bako à la tête de la Cameroon oil transportation company (Cotco) ce 4 juillet 2023. Le président du Conseil militaire de transition, président du Tchad venait ainsi de remporter une bataille, certainement la dernière, de la guerre pour le contrôle de la gestion du pipeline Tchad-Cameroun que son pays livrait depuis plusieurs mois contre Savannah energy, la compagnie «britannique» que Ndjamena voit comme une «nébuleuse», et qui revendique le rachat de 41% des actifs de l’ex-Esso, repreneur des parts d’ExxonMobil dans le projet Pipeline Tchad-Cameroun. N’Djamena qui avait dépêché son ministre des Finances pour assister aux travaux du Conseil d’administration du 4 juillet, fonde beaucoup d’espoir en la nouvelle équipe dirigeante. Avec sa compatriote Haoua Daoussa Deby, exDirectrice générale adjointe de la Société tchadienne de raffinage, être promue en second auprès d’Harouna Bako. Le camerounais débarque ainsi sur un port certes en eaux troubles, mais qui voit poindre à l’horizon une certaine accalmie. La partie devrait se poursuivre certainement devant les tribunaux, mais déjà, Yaoundé a joué sa partition pour redonner confiance au voisin et frère qui a connu d’énormes soucis dans la gestion de sa manne pétrolière exploitée depuis sa ville de Doba depuis le début des années 2000.
C’est que Paul Biya a su régler la guerre d’intérêts entre ses propres collaborateurs dans ce dossier, en s’imposant dans la gestion de l’actionnariat, et donc du pouvoir. D’autant plus que la posture du Cameroun laisse envisager une amélioration de sa participation dans l’actionnariat de Cotco. Mais c’est une option voulue par le Tchad : au sortir de son audience avec le président camerounais le 19 juin dernier, Gali Ngothé Gatta le Secrétaire général de la présidence de la République (Sgpr) du Tchad avait indiqué avoir évoqué avec le voisin et partenaire «une bonne cogestion (du pipeline Tchad-Cameroun, Ndlr) et une avancée qui ne permette plus les dissensions que nous avons connues dans le passé». Le chemin est désormais balisé pour cela. Le Conseil d’administration n’a pas cherché trop loin et a trouvé la perle rare dans la même ville : le nouvel homme fort de Cotco était jusqu’à sa nomination Directeur général adjoint du Port autonome de Kribi depuis 2016. Le missionnaire envoyé en colombe à Cotco présente un profil qui semble présager des lendemains glorieux. Agé de 59 ans, Harouna Bako est magistrat de 4ème grade dont les témoignages font état de ce qu’il a su imposer le respect dû à sa personne par son intégrité. Ce qui peut justifier la confiance placée par le Conseil d’administration et entérinée par le président de la République, à cet ancien procureur général près la Cour d’appel de l’Ouest. Sa formation de base est un atout pour une entreprise qui sort progressivement d’une crise qui joue certains de ses épisodes en justice. Mais tant le Tchad que le Cameroun, peuvent dormir tranquille.