Le correspondant de Radio France Internationale (RFI), Ahmed Abba, et le journaliste d'investigation Simon Ateba, ont été interpellés dans le nord du Cameroun, officiellement dans le cadre d'investigations liées à Boko Haram. RFI et le Syndicat national des journalistes du Cameroun réclament leur libération.
Ahmed Abba est le correspondant-pigiste de RFI en langue haoussa à Maroua, chef-lieu de l’Extrême-Nord, région régulièrement ciblée par Boko Haram. Arrêté le 30 juillet et transféré à Yaoundé, il est depuis détenu au secret, selon la radio, et ne peut recevoir la visite de son avocat, le bâtonnier Charles Tchoungang. « Les autorités doivent nous informer officiellement sur sa situation réelle » et « les motifs de son arrestation », ou sinon « le libérer immédiatement », a estimé Denis Nkebwo, président du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC), sur RFI.
RFI précise que le délai maximum de garde à vue au Cameroun est de 28 jours, mais que « certaines dispositions permettent aux autorités de dépasser ce délai ». La radio « rappelle son attachement au principe de la présomption d’innocence, et cela d’autant plus qu’un examen attentif de l’ensemble des interventions d’Ahmed Abba à l’antenne permet d’attester de l’impartialité de son travail ». Et RFI d’ajouter qu’elle « souhaite en savoir plus sur le sort de son correspondant » qui « doit sortir au plus vite de cette situation extra-judiciaire ».
Un deuxième journaliste camerounais également interpellé
Par ailleurs, le syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) a exigé dimanche 30 août la « libération immédiate et sans condition » de Simon Ateba, un journaliste d’investigation camerounais. Basé au Nigeria et interpellé, selon le syndicat, vendredi 28 août, il enquêtait sur les conditions de vie des réfugiés nigérians au nord du Cameroun.
Les services de sécurité reprocheraient à Simon Ateba d’avoir travaillé sans accréditation officielle. « Il n’avait pas une accréditation écrite, mais il avait informé les autorités de sa présence au Cameroun (…) et elles ne lui ont pas marqué une objection formelle », a expliqué à RFI Denis Nkwebo, précisant que le camp de réfugiés où Simon Ateba s’est rendu pour enquêter était sous le contrôle du Haut commissariat pour les réfugiés (HCR).
« Les autorités camerounaises ne peuvent pas accuser un journaliste d’espionnage parce qu’il est allé dans un camp sous contrôle international pour interroger les réfugiés nigérians sur leurs conditions de vie », a-t-il dénoncé. Et conclure : « Au nom de la lutte contre Boko Haram, on ne peut pas faire peser une accusation ridicule et aussi grave, sur un journaliste reconnu pour son professionnalisme. »