Selon le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés, 887 Nigérians, jusque-là installés dans le camp de Minawao au Cameroun, ont été reconduits de force dans leur pays.
Pour Antonio Canhandula, le représentant du HCR au Nigeria, ces retours aggravent une situation humanitaire déjà précaire. « Les autorités [camerounaises] ont envoyé des camions pour expulser les réfugiés qui ont eu le temps de prendre quelques affaires seulement, explique-t-il. Mais ces réfugiés se sont retrouvés dans une petite ville où il y a déjà un manque cruel d’abris.
En un mois, près de 13 000 déplacés se sont installés à Banki [ville frontalière avec le Cameroun], or il est bien difficile d’assurer un toit pour autant de monde. Cela prend du temps. Et plusieurs réfugiés ont dormi dehors pendant plusieurs jours avant que nous ayons pu les aider. »
Lorsque les réfugiés sont arrivés, il n’y avait plus de nourriture à Banki, précise également Antonio Canhandula. Et pour les aider, il a fallu s’approvisionner depuis Maïduguri. « Cela demande 17 heures de route. Donc ces afflux de réfugiés ont créé une nouvelle crise, dans la crise humanitaire que nous connaissons. On a emmené des réfugiés dans une situation pire que celle qu’ils connaissaient dans les camps au Cameroun car à Banki, aucun service de base n’est assuré. »
Ce n'est pas la première fois que le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) dénonce des retours forcés vers le Nigeria. En mars 2017, les Nations unies avaient déjà accusé le Cameroun d'avoir renvoyé contre leur gré 2 600 Nigérians de l'autre côté de la frontière.
« Inquiétude non fondée »
Les autorités camerounaises, comme elles l'avaient déjà fait en mars, démentent aujourd'hui ces accusations. Issa Tchiroma Bakary, le porte-parole du gouvernement camerounais, ne comprend pas l'inquiétude du HCR et explique que le Cameroun n'a pas vocation à devenir un camp de réfugiés à ciel ouvert.
« C’est une inquiétude non fondée, assure ce dernier, une accusation sans fondement dont l’objet est de jeter le discrédit et le déshonneur sur le gouvernement, mais également le sacrifice consenti par le peuple camerounais qui accueille. Il n’y a jamais eu de rapatriements forcés. »
Issa Tchiroma Bakary tient aussi à préciser que ce camp conçu pour 30 000 abris, est occupé à l’heure actuelle par 70 000 personnes, « et que le gouvernement camerounais à juste titre refuse d’ouvrir un autre camp. Est-ce que vous réalisez ce que cela coûte les Nigérians réfugiés au Cameroun qui sont en attente du rapatriement dans leur pays d’origine ? Ils ne sont pas venus au Cameroun pour s’installer de manière permanente. »
ne réfugiée nigériane dans le camp de Minawao, au Cameroun, en 2014.
© Reinnier KAZE / AFP