Actualités of Tuesday, 14 May 2024

Source: Christelle Nadia Fotso

'J’ai commencé à écrire toute petite pour ne pas avoir à hurler'

Christelle Nadia Fotso Christelle Nadia Fotso

Il y avait ces longs séjours dans les hôpitaux français dès mes premiers mois pour corriger une malformation que celle qui m’a mise monde prenait pour une malédiction, une punition et qui lui toujours fait honte en faisant de moi même avant que je ne sache parle un problème. Je devais être difficile pour justifier tant de choses, trop de choses…

Un nourrisson sent tout cela et je crois que sentir autant de mauvais et petits sentiments autour de moi m’a conduite à l’écriture…. On pourrait dire que cela était écrit d’avance: une enfant noire qui naît dans un monde fou et faux que son père protège en montrant son amour et qui parce qu’elle voit trop de choses prend la plume aussitôt qu’elle apprend à lire. Ecrire était une manière de hurler.

Défigurée est mon livre d’adieux à Fotso Victor. Une mère, surtout lorsqu’elle est une fille, sent bien quand son enfant souffre et se meurt. Je savais que c’était fini et croyais qu’en le hurlant, les siens, son parti et son pays l’aideraient à finir sa vie dignement… ils l’ont mangé !

Cette image me confirme que ce livre est enfin lu… je remercie au lecteur pour la belle photo et dois lui dire que ce livre n’a vu le jour que parce que comme mon père, je suis autant patiente qu’entêtée lorsque mon cœur sait…. Je me souviens des ricanements du personnel du barreau de Bruxelles qui se demandaient pour qui je me prenais pour oser penser que je pouvais écrire un livre après une chute spectaculaire et une opération chirurgicale gravissime… je me souviens des autres qui n’y croyaient pas parce qu’ils ne savent pas ce que peuvent les mots contre la sauvagerie…

Ne jamais se taire devant ceux qui pensent que surtout en Afrique et pour les Africains, la force est tout… ce mot que j’ai eu pour le bâtonnier du barreau de Bruxelles : l’Histoire. Je suis une femme de couleur en situation de handicap qui écrit sans aucun doute pour ne pas qu’on gomme l’histoire de Fotso Victor, la sienne qui montrent que la vie africaine compte et les êtres africains ont toujours fait l’Histoire bien que la mémoire du monde soit défigurée.