Dans une interview percutante accordée à Jeune Afrique, Thomas Babissakana a dressé un diagnostic sévère de la gouvernance économique camerounaise sous Paul Biya. Interviewé par Georges Dougueli, il pointe les échecs de la vision présidentielle d'un Cameroun industrialisé à l'horizon 2035.
« L'ambition de départ était bonne, pertinente et mobilisatrice en 2009, lorsque la vision a été formulée à un horizon de 25 ans », a-t-il reconnu dans Jeune Afrique. Mais les résultats n'ont pas suivi, et Babissakana identify plusieurs raisons.
« La principale raison pour laquelle les résultats n'ont pas été à la hauteur de cette vision est l'absence d'un régime de planification stratégique de l'État du Cameroun qui aurait pu permettre une rationalisation de l'allocation des ressources publiques à moyen et long terme », a-t-il déclaré.
Il pointe notamment « une préférence du budget national pour les dépenses courantes plutôt que les investissements ». Un constat qu'il illustre par des chiffres : « Le budget d'investissement public est passé de 25,9 % du budget total en 2009 à seulement 18 % en 2022. »
Pour prouver son propos, il cite quatre entreprises publiques symboles de cet échec : « La Compagnie camerounaise d'Aluminium (Alucam), qui n'arrive pas à déployer depuis dix ans son plan d'investissement ; le Chantier naval et industriel du Cameroun (CNIC), avec son projet de Limbé qui traîne depuis 2005 ; la Cicam, avec un plan de restructuration devenu un serpent de mer ; et, enfin, la Société nationale de raffinage (Sonara) dont l'outil industriel s'est effondré. »