Dans une tribune titrée "Ma lecture de 'La recette du porc", ouvrage du professeur Patrice Nganang, Berty le Kamite affirme très haut et fort que l'élite intellectuelle Bamiléké, (opérateurs économiques, autorités traditionnelle) n'a pas assez de cran pour porter ses propres revendications, celles de ses fils.
"Après lecture, je puis vous assurer que le livre est puissant, dense. Un véritable travail d'intellectuel en ce sens qu'il analyse froidement, invite au débat, met non seulement sur la table les questions gênantes, mais propose des solutions concrètes pour en sortir. On ne peut réussir une telle entreprise sans une grande maîtrise de l'histoire de son pays, de ses mutations sociales, etc.
Il ne faut surtout pas se fier au titre qui peut mettre sur une fausse piste. Pour être honnête, en lisant le titre, la table des matières à sa sortie en 2020, je m'étais demandé ce qu'il n'allait pas chez le grand prof pour qu'il mentionne un personnage lugubre comme AMER KMER (El Machette) dans un ouvrage qu'il qualifie lui-même "d'ouvrage de qualité".
En le lisant avec attention lors de mes vacances à Barcelone, j'ai été subjugué par son approche, sa méthode, comment il déploie sa pensée avec objectivité en plus de l'imagination féconde qu'on lui connaît. Par exemple, l'auteur avec pédagogie, part de la dissémination de l'identité Bamiléké dans une tripartite" FRANCOPHONE", "ANGLOPHONE" "BAMOUN" et donc de sa difficulté à dégager une identité Bamiléké claire, pour arriver au nom "PORC" en allemand SCHWEIN, camerounisé en "CHOUAGNE" que les autres utilisent comme stéréotype pour désigner les Bamilékés.
En tant qu'intellectuel, Il a le mérite de prendre position de façon claire sur les sujets tels que le tribalisme, l'identité, les discriminations, fédéralisme, droit des minorités, la guerre du NOSO, etc., exactement là où plusieurs autres intellectuels (notamment les "aînés intermédiaires") ont démissionné, rasent les murs. D'ailleurs, certains, pour éviter de prendre position sur l'épineuse question du tribalisme, ont proposé d'aller vers une absurdité qu'ils appellent le "citoyen détribalisé", sans nous expliquer comment le matérialiser ou même encore en citant des exemples dans le monde où ça a déjà fonctionné.
Dans une partie très importante du livre, il aborde la question de "l'intellectuel Bamiléké" éternel porteur de sac envahie par la peur de s'affirmer, de se définir comme Bamiléké, d'aborder sans langue de bois, les sujets sensibles de notre pays...
Une question centrale sur le rôle des intellectuels Bamiléké qui espérons-le un jour, auront assez de cran pour porter nos revendications. Pour l'instant, et c'est mon avis, l'élite intellectuelle Bamiléké, opérateurs économiques, autorités traditionnelles ont échoué.
Pour finir, TANOU comme nous appelons affectueusement, est un homme fin, généreux, un homme d'action, téméraire, etc. Bien que je partage la plupart de ses positions, faire savoir mes points de désaccord avec lui est un devoir. Ce serait manquer de sérieux et d'objectivité que de ne pas les souligner. Mes critiques seront issues évidemment de la lecture récente du présent ouvrage mais aussi de ceux lus il y a quelques années (j'en ai lu au moins cinq).
Ainsi j'ai remarqué chez l'auteur sa propension à parler du droit des minorités tout en faisant une fixation sur le droit des homo alors qu'il pourrait parler des albinos comme minorité par exemple. C'en devient lassant. Suis-je le seul à l'avoir remarqué ? Évidemment qu'il a le droit de faire un clin d'œil ou même alors de porter la cause LGBT+ mais pourquoi en faire une fixation ? C'est à se demander si l'expression floue de "droit des minorités" vulgarisé par le système dominant ne cache pas en réalité le droit des homos.
Comment peut-on être TANOU, vanter son attachement à sa terre, à ses racines à son peuple, à ses valeurs traditionnelles, et demander à être incinéré, enterré aux États-Unis et non à Bangangté qu'il vante tant ? Doit-on lui rappeler que l'incinération ne fait pas partie de notre culture au même titre que la promotion déguisée de la débauche ?
Autre chose, j'ai du mal à comprendre les intellectuels africains prompts à copier et coller les modèles et concepts étrangers inadaptés à l'Afrique. Par exemple, les concepts de "droite-gauche" ; "républicain-démocrate", qu'il emploi à tout-va en parlant de politique africaine a quel sens, quelle signification pour les Africains que nous sommes ? C'est quoi un Camerounais de gauche, de droite ?
À défaut d'inventer des concepts ou expressions propres à nous, à notre vision du monde, l'intellectuel n'a-t-il pas pour mission d'aller déterrer et redynamiser la conception africaine authentique de la politique, du droit, l'économie inventée par ses ancêtres ?
Merci pour tout grand prof et courage car je sais que tu travailles à finaliser tes mémoires d'enfance. Me lapte !"