Actualités of Monday, 23 July 2018

Source: camer.be

L’âge de Paul Biya est un risque- Mouangue Kobila

Paul Biya a annoncé sa candidature sur Twitter Paul Biya a annoncé sa candidature sur Twitter

Vice-recteur à l’université de Douala, enseignant d’université, auteur qui compte de nombreux ouvrages à son actif et observateur avisé de la scène politique nationale, cet agrégé de droit fait une lecture de l’actualité politique brûlante du moment : la présidentielle du 7 octobre 2018. James Mouangue Kobila analyse les forces et faiblesses des candidats déclarés.

Le corps électoral est convoqué. Le président de la République a annoncé sa candidature. C’est quoi la suite selon vous ?

Avant de répondre directement à votre question, il importe de faire remarquer que c’est bien la loi du 19 avril 2012 portant Code électoral, modifiée et complétée par celle du 21 décembre 2012 qui régira l’élection présidentielle du 7 octobre 2018.

Sur ce point, le chef de l’Etat a su éviter d’ouvrir la voie aux manœuvres opportunistes de ceux qui réclamaient parfois bruyamment la révision du Code électoral en vigueur, alors que ce texte, adopté après la présidentielle de 2011, n’avait pas encore été appliqué à l’élection présidentielle. Le Code électoral de 2012 régira donc pour la première fois l’élection présidentielle. Quoi qu’on en pense, nul ne peut contester que la stabilité du Code électoral est un facteur de sécurité juridique qui renforce l’Etat de droit au Cameroun, l’instabilité des normes étant un grand mal, dénoncé de tout temps, sous tous les cieux.

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Pour en venir à votre question, le chef de l’Etat ayant convoqué le corps électoral dans la journée du 9 juillet 2018, les potentiels candidats et les candidats annoncés ont une dizaine de jours pour déclarer solennellement leur candidature et soumettre le dossier y relatif à Elections Cameroon (Elecam) qui est chargé de se prononcer sur la recevabilité ou l’irrecevabilité des candidatures, au vu des exigences du Code électoral de 2012.

Avez-vous le sentiment que l’opposition soit préparée au moment où le corps électoral est convoqué?

J’imagine que l’opposition est préparée, puisque des congrès et conventions des partis politiques ont été organisés depuis plusieurs mois pour désigner des candidats de l’opposition à la présidentielle pour laquelle le corps électoral est désormais convoqué. Les partis de l’opposition semblent du reste déjà en campagne avant la lettre : on a vu la semaine dernière que certains candidats annoncés sillonnent les villages – en commençant par les leurs – , d’autres sillonnent des pays étrangers.

On a vu que tel ou tel opposant s’est rendu dans telle ou telle partie du monde, en Amérique du Nord, en l’Europe ou en Afrique. L’opposition est par conséquent tout à fait prête. Ce qui est curieux, c’est que la plupart de ces candidats semblent davantage rechercher la légitimité et les suffrages à l’étranger, voire dans les missions diplomatiques situées à Yaoundé que là où se trouve l’essentiel du corps électoral.

Du coup l’on aimerait savoir, de votre point de vue, quelles sont les forces et les faiblesses de cette opposition ?

J’indique d’emblée que je me prononce en tant qu’observateur de la vie politique camerounaise jouissant de 60 ans d’expérience politique, malgré mes 51 ans, dans la mesure où j’ai étudié en 1990 dans le cadre de mon mémoire de maîtrise trente-deux ans d’histoire politique du Cameroun entre 1958 et 1990, et qu’à partir de 1990 j’ai été journaliste politique pendant douze ans avant d’être un observateur très attentif de la scène politique camerounaise jusqu’à ce jour. Sur ce fondement, je puis affirmer que l’opposition camerounaise affiche quatre faiblesses rédhibitoires.

D’abord, son manque d’implantation sur le territoire national. Les statistiques sont formelles : on a vu que pour les législatives et les municipales, les partis politiques de l’opposition ont toujours été incapables jusqu’à présent de présenter des listes de candidatures dans plus de la moitié des circonscriptions. Ils apparaissent donc comme des partis politiques départementaux ou, au mieux, régionaux. C’est une faiblesse majeure aggravée par leur deuxième faiblesse, l’amateurisme qui caractérise la plupart des partis politiques de l’opposition, car les dirigeants des partis politiques de l’opposition manquent singulièrement de professionnalisme, au point qu’on peut douter de la pertinence de l’expérience politique dont se targuent certains d’entre eux.

En troisième lieu, je mentionnerai la vacuité du discours des candidats de l’opposition. L’on y cherche en vain une idée originale. Plusieurs d’entre eux singent éhontément des modèles éculés d’Europe de l’Est, allant même jusqu’à s’habiller en conséquence.

D’autres s’enorgueillissent de ressembler à tel ou tel président d’un pays occidental tout en prônant la fin du néocolonialisme. Au-delà de ces considérations et en dernier lieu, la sempiternelle question de la division de l’opposition demeure. Si vous entendez abattre un éléphant politique de l’envergure du président Paul Biya – dont vous me permettrez de prononcer le nom avec le grand respect et toute l’affection que je lui porte –, il vaut mieux utiliser la stratégie des lions plutôt que la stratégie du tigre. Malheureusement il se trouve que le symbole de cet éléphant est le lion. Il est donc difficile d’envisager que ses adversaires utilisent ses propres stratégies…

Indépendamment des qualités de stratège qu’on lui prête, peut-on encore faire confiance au candidat Paul Biya ?

Ecoutez, le président Paul Biya apparait objectivement aujourd’hui comme le candidat de l’âme du peuple camerounais, au vu des appels à sa candidature venus des profondeurs du pays et portés par les chefs traditionnels qui sont les gardiens vigilants de nos traditions ancestrales. Ensuite, au vu des appels de divers autres acteurs sociopolitiques, il apparait comme le candidat le plus consensuel de l’essentiel des segments sociopolitiques du Cameroun.

J’ajouterais que, parmi les candidats annoncés, il est incontestablement celui qui a les épaules les plus larges pour occuper la magistrature suprême, de par son expérience inégalée et sa haute science du pouvoir reconnue de tous, autant que par sa connaissance encyclopédique du Cameroun et des Camerounais.
On peut aussi dire qu’il est le meilleur candidat, parce que c’est le seul qui ne se présente pas avec un esprit revanchard et qui n’est pas prisonnier d’aucun lobby, de quelque nature que ce soit, visible ou invisible.

Contrairement à certains candidats, nous savons par ailleurs que sa réputation d’intégrité est parfaite, dans la mesure où il ne traîne aucune casserole. Il n’est par exemple accusé de plagiat nulle part et toutes les recherches menées par ses adversaires à travers le monde pour l’associer, de près ou de loin, au scandale dit « des biens mal acquis » sont demeurées vaines.

Ils n’ont rien trouvé ! C’est pour cet ensemble de raisons objectives que nous pensons que le président Biya est le meilleur de tous les candidats annoncés.
Mais au-delà de ces motifs objectifs et rationnels, par sympathie pour cette très haute personnalité, il me semble qu’il faut lui rendre justice en lui laissant le temps de ramener la paix dans l’ensemble du pays et de mener à bien les grands projets d’investissement qu’il a engagés et qui sont désormais en voie d’achèvement pour la plupart.

Pourquoi voulez-vous que ce soit par exemple quelqu’un d’autre qui lance la coupe d’Afrique des nations en juin 2019, alors que c’est Paul Biya qui a obtenu que cette CAN se déroule au Cameroun et que c’est lui qui a lancé les immenses chantiers des stades à travers le pays pour accueillir cet évènement footballistique majeur ?

Enfin, j’ajouterai que le président Paul Biya se singularise par son patriotisme incandescent. Je me souviens que pendant que je couvrais l’affaire de la Frontière terrestre maritime qui a opposé le Cameroun au Nigeria, connue sous l’appellation d’« affaire Bakassi », mes investigation m’avaient permis d’apprendre que le président Paul Biya avait personnellement reçu chacun des conseils du Cameroun, chacun des membres de l’équipe qui a plaidé pour le Cameroun devant la Cour internationale de justice, afin de l’engager spécialement dans cette noble cause de la défense de l’intégrité territoriale du Cameroun.


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Il est d’autant plus patriote qu’on l’a vu, pendant que certains candidats annoncés vont chercher des soutiens, des parrainages ou des financements occultes dans certaines chancelleries étrangères, avec les conséquences que chacun peut imaginer sur le patrimoine national, le président Paul Biya reste farouchement attaché à la souveraineté du Cameroun, tout en restant ouvert à tous les aspects de la coopération internationale, qu’elle soit bilatérale ou multilatérale.

Il n’en est pas moins présenté comme un risque, le meilleur certes, mais un risque tout de même… Qu’en dites-vous ?

Le seul risque que l’on peut entrevoir concernant la candidature du président Paul Biya est lié à son âge. Mais un proverbe douala nous enseigne que « c’est dans les vieilles marmites qu’on fait les meilleurs plats ». J’ai donc la faiblesse de croire que sa remarquable longévité aussi bien physique que politique est un immense atout pour le Cameroun. Je le préfère mille fois à ceux qu’un auteur africain, Paulin Joachim, désignerait comme de « frénétiques ambitieux qui ne travaille[nt] que pour leur promotion au rang d’idoles ». Ecoutons Tchicaya U Tam’si qui insiste sur ce que « le gouvernement d’un pays doit être dans les mains des plus méritants, des plus capables, des plus sages ».

Pensez-vous que ce soit suffisant comme arguments de campagne pour convaincre ?

Il faut tenir compte de la conjoncture actuelle du pays qui est marquée par la situation dans les deux Régions du Nord- Ouest et du Sud-ouest, par la lutte contre le terrorisme de Boko Haram et par les menaces sécuritaires qui pèsent sur la Région de l’Est ; mais qui est aussi marquée par une situation économique délicate, qui a conduit le Cameroun à négocier un financement spécifique avec le Fonds monétaire international.

Dans ce contexte marqué par la fureur des évènements politiques, économiques et sécuritaires, il apparait clairement qu’il ne faut pas ajouter à ce cocktail qui constitue déjà un défi majeur en soi, le tumulte d’une transition politique dans l’immédiat.

C’est pour cet ensemble de raisons et pour celles que j’ai énoncées précédemment que je constate que le président Paul Biya est mieux placé que tout autre candidat annoncé, d’autant qu’il prouve quotidiennement qu’il est à l’écoute du peuple : il a déjà pris ou ordonné plus d’une soixantaine de mesures pour répondre aux problèmes soulevés par nos frères anglophones. Accordonslui le temps de résoudre ce problème et tous les autres, car il est mieux outillé à cet effet.

L’échange téléphonique entre les présidents Paul Biya et Emmanuel Macron est toujours d’actualité en ce moment où les évènements politiques et sécuritaires rythment la vie quotidienne ici. Quelle lecture faites-vous de la position de la France vis-à-vis de la crise anglophone ?

En ce siècle, aucun Etat ne peut supporter les sécessionnistes dans un autre Etat. La réponse à votre question coule donc de source. Le président français ne peut pas être pro-sécessionniste. Et s’agissant de la conversation téléphonique qu’il a eue avec le président Paul Biya, il est important de noter que c’est le président français qui a téléphoné au président Paul Biya.
Ce n’est pas le président Paul Biya qui a téléphoné au président français. Cela montre d’abord l’intérêt de la France pour le Cameroun et l’engagement de la France aux côtés du Cameroun dans tous les défis auquel notre pays fait face en ce moment.

Vous savez que, s’agissant notamment des négociations avec le FMI, depuis le début de la crise économique de la fin des années 1980, le Cameroun a toujours bénéficié d’un soutien explicite, constant et fructueux de la France dans le cadre de ses négociations avec les institutions du Bretton Woods.

Pour en revenir à ce coup de fil, il résonne comme une manière de confirmation de la position qu’a toujours adoptée le président français Emmanuel Macron, à savoir qu’il faut respecter la souveraineté des Etats dans tous les aspects de la vie nationale et internationale.