Au début des années 1950, Jean Bedel Bokassa est sergent dans l’armée Française ; Il a participé au débarquement en Provence et à la bataille du Rhin, avec les Forces françaises libres. Il va même se battre en Indochine aux côtés des troupes françaises.
Au Vietnam, Bokassa tombe follement amoureux d’une jeune vietnamienne Nguyen Thi Hué Ba. Les deux tourtereaux convoleront en justes noces. La jolie Hué tombe enceinte et donne une fille à Bokassa. Bokassa est aux anges. Il décide de la prénommer Martine car elle est née le jour de la Sainte Martine.
Malheureusement, l’histoire va les séparer. La France subit une cuisante défaite à Diên Biên Phu et retire ses troupes précipitamment. Bokassa n’a pas le temps d’emporter sa petite famille avec lui. Le cœur meurtri, il est envoyé en France, puis mobilisé sur le front algérien. Il abandonne donc sa jeune épouse avec un bébé d’à peine 6 mois.
Hué élève seule sa fille. Elle explique à celle-ci que son père, soldat de l’armée française, ne reviendra plus. Il est peut -être mort en guerre car on n’a plus eu de ses nouvelles : aucun courrier !
Le capitaine Bokassa est décoré de la Légion d’honneur et de la Croix de guerre pour avoir combattu pour la France. Il décide de rentrer en Centrafrique. Son cousin David Dacko qui a pris le pouvoir le nomme chef d’Etat Major. Profitant de ce poste stratégique, Bokassa fomente un putsch contre son cousin et devient le deuxième président de Centrafrique.
Devenu Président, Bokassa se souvient alors de sa fille et de son épouse qu’il avait abandonné au Vietnam. Il demande aux autorités françaises de les retrouver. Une métisse qui avait flairé le bon coup avec ses parents, se fait appeler Martine Bokassa et dit être la fille du nouveau président. Tout le monde tombe dans le panneau.
Une grande cérémonie est organisée pour marquer les retrouvailles entre Bokassa et sa fille. Tous les diplomates sont présents. L’émotion est à son comble. Les journaux du monde entier s’en font l’écho.
Bokassa découvre la supercherie et fait arrêter la fausse « Martine » ; selon lui, c’est une espionne de la France. Ayant appris cela, à Saigon au Vietnam ; 16 autres jeunes filles vont se faire connaître et réclame toutes être des « Martine », filles de Bokassa. A cette époque, les tests de paternité n’existaient pas encore. Bokassa ne sait plus où donner de la tête. Il ne reconnaît pas avoir eu 17 enfants du même âge au Vietman.
Un crime n’étant jamais parfait, la mère de la vraie Martine découvre la supercherie en lisant la presse.
Avec l’aide de plusieurs journalistes, la vraie Martine et sa mère parviennent à joindre le président Bokassa au téléphone. Hué, lui rappelle comment il s’est cassé un petit doigt à moto, à Saigon. Elle lui donne des détails sur leur intimité. Elle montre des photos où elle est prise aux côtés de Bokassa notamment lorsque celui-ci, blessé, reposait dans un hôpital à Saigon en 1953.
Les arguments sont imparables. Fou de rage, le président centrafricain s’avoue humilier, prétend que les Français ont glissé une espionne au palais.
En 1970, la petite dame vietnamienne et sa fille quittent la pauvreté des faubourgs de Saigon au Vietnam pour atterrir au palais de Bangui avec tous les honneurs. Un véritable conte de fée.
Avec le temps Bokassa se calme et décide d’adopter la fausse Martine le 22 février 1971, à l’occasion de son 50e anniversaire. La vraie Martine est surnommée "Martine Kota" parce qu’elle était légèrement plus grande que l’autre qui devient "Martine Keté" ou la "fausse Martine".
Bokassa proclame que tout centrafricain d’origine peut demander la main de ses filles. Le premier à se manifester est le jeune médecin Jean-Bruno Dédéavodé. Les fiançailles des deux jeunes gens, célébrés à Bérengo le 15 juillet 1972 sont suivies en octobre de celles de la "fausse Martine" avec Fidèle Obrou. En effet, la vraie Martine se marie le jour de ses 20 ans et a pour parrains le président de la Côte d’Ivoire, Félix Houphouët-Boigny, et le roi du Maroc, Hassan II.
Elle se mue en femme d’affaires prospère. Elle ouvre un premier restaurant vietnamien, puis une station d’essence et de gaz. Une vraie femme d’affaires qui a le sens du business.
Le 3 février 1976, Fidèle Obrou, l’époux de la fausse Martine tente d’assassiner Bokassa à l’aéroport de Bangui. Mais la grenade jetée aux pieds de Bokassa n’explose pas.